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Pluies : Eviter les scénarios du passé

Chaïmaa Abdel-Hamid, Mardi, 02 octobre 2018

A l’approche de la saison des pluies, le gouvernement a pris une série de mesures visant à faire face aux risques des inondations. Explications.

Pluies : Eviter les scénarios du passé
L’Organisme de la météorologie a averti que la saison des pluies débuterait cette année plus tôt que prévu.

Des villes inondées, des rues bloquées, des coupures d’électricité et des morts. Ces scènes ont marqué ces dernières années la saison des pluies en Egypte. L’Organisme de la météorologie a averti que la saison des pluies débuterait cette année plus tôt que prévu et a appelé les instances concernées à s’y préparer. Déjà, le 1er septembre, la ville de Sainte-Catherine a été touchée par des pluies torrentielles, une vingtaine de jours avant le début de l’automne. Aucun dégât sérieux n’a été signalé. Selon le ministère de l’Irrigation, le nouveau lac de stockage, creusé l’année dernière à Sainte-Catherine, a emmagasiné environ 10 000 m3 d’eau, qui peuvent être utilisées dans l’irrigation ou dans la consommation courante. « De même, le barrage d’Alasbaia, récemment achevé, a empêché la précipitation des eaux des pluies », signale Mohamad Abdel-Ati, ministre de l’Irrigation et des Ressources hydrauliques.

Un travail de prévention

Ainsi, pour éviter une répétition du scénario des années passées, le Conseil des ministres a annoncé la création d’une cellule de crise regroupant les représentants de 18 ministères. Son travail ? Suivre les rapports de la météorologie et coordonner avec les instances concernées pour gérer une éventuelle crise. Des camions équipés pour aspirer l’eau ont été fournis aux municipalités, et des plans d’urgence ont été mis en place pour faire face au blocage éventuel des routes et aux coupures d’électricité causées par les pluies. La cellule de crise, censée travailler 24 heures sur 24, regroupe, entre autres, les ministères de la Défense, de l’Intérieur, de l’Irrigation, des Transports, de la Santé, de l’Electricité ainsi que des représentants de l’Organisme de météorologie. Le ministre de l’Irrigation indique que le gouvernement « travaille sur deux axes : réduire les éventuels dégâts des inondations, surtout au niveau des infrastructures, et profiter au maximum des eaux des pluies. Pour y parvenir, le plan d’action du gouvernement porte sur l’indentification des zones menacées et l’achèvement des barrages, des réservoirs et des lacs de stockage ». Selon le ministre de l’Irrigation, le gouvernement a lancé, il y a 2 ans, un plan de 2 milliards de L.E. qui consiste à construire 160 installations pour faire face aux inondations dans plusieurs régions menacées, notamment le Sinaï, la mer Rouge, Marsa Matrouh et Alexandrie. Aussi, le gouvernent est en course contre la montre pour achever la construction de quelque 46 barrages, 40 lacs et 250 citernes avec un budget de 1,7 milliard de L.E. pour stoker les eaux des pluies et s’en servir dans l’agriculture. Les travaux d’entretien et de nettoyage des réseaux de drainage et des égouts sont en cours, affirme en outre le ministre de l’Irrigation.

L’état inquiétant des infrastructures

Les pluies torrentielles ne suscitent que la crainte. Les inondations sont une aubaine dans les régions éloignées de la vallée du Nil qui comptent principalement sur les eaux souterraines. C’est ce qu’explique le géologue Abbas Al-Chéraki, expert hydrique au Centre des recherches et des études africaines de l’Université du Caire. Il affirme qu’avec la pénurie d’eau dont souffre le pays, les pluies constituent une richesse qu’il faut chercher à exploiter au maximum pour combler le déficit hydrique. « L’année dernière, l’Egypte a pu stocker 1,25 milliard de m3 d’eau de pluie, une quantité qui pourrait augmenter en mettant en place des barrages et des citernes supplémentaires », affirme Al-Chéraki, qui salue l’intérêt accordé par le gouvernement à ce volet qui n’est pas moins important que les dégâts des pluies.

En ce qui concerne les mesures préventives, l’expert les juge insuffisantes. « Le véritable problème réside dans l’absence d’un plan qui détermine les priorités. Le gouvernement doit établir des priorités dans la mise en place de canaux qui transportent l’eau des pluies pour les verser dans des lacs ou dans le Nil et de barrages dans les zones densément peuplées de Rass Ghareb, Safaga, Noweibaa et Hurghada, ainsi que de certaines villes de Haute-Egypte », pense Al-Chéraki. Sur la même longueur d’onde, l’urbaniste Medhat Al-Chazli se demande si le gouvernement est vraiment en mesure de gérer la saison des pluies. « Les déclarations officielles montrent que les travaux ne sont pas encore achevés. Il fallait se préparer à la saison des pluies beaucoup plus tôt », critique Al-Chazli, qui pense que le manque de budget freine les plans du gouvernement. « En dépit des moyens financiers limités, le gouvernement poursuit les travaux de creusement des citernes et des lacs, ce qui est important, mais cela reste insuffisant. Les infrastructures de certains villes et quartiers n’ont pas été entretenues depuis les années 1950. Les municipalités les nettoient et les désinfectent, mais cela ne permet pas d’éviter les problèmes des égouts. Il faut donc remédier à ces problèmes accumulés en rénovant l’ensemble des infrastructures et en assurant le budget nécessaire selon un plan déterminé accordant la priorité aux zones les plus endommagées par les pluies », assure-t-il. Même son de cloche pour Ahmad Abdel-Aal, président de l’Organisme de météorologie. Il estime cependant qu’on ne peut pas éviter à 100 % les dégâts causés par les phénomènes naturels. « Le rôle de l’Organisme se limite à avertir les instances concernées en cas de changements climatiques pour qu’elles mettent en place les dispositifs nécessaires. Or, parfois, en Egypte comme partout dans le monde, la force de précipitation des pluies ou la force des intempéries dépasse les capacités de les gérer », explique Abdel-Aal. Il donne l’exemple des Etats-Unis qui disposent d’infrastructures modernes et de moyens importants, et qui sont souvent touchés par les phénomènes naturels.

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