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Resserrer l’étau autour du terrorisme

Chaïmaa Abdel-Hamid, Mercredi, 09 mai 2018

La nouvelle loi sur la mise sous séquestre et la gestion des fonds terroristes vient d’être ratifiée. Elle vise à couper les sources de financement des groupes terroristes.

Resserrer l’étau autour du terrorisme
La nouvelle loi devrait limiter le trafic illégal d’armes.

Dans le cadre des efforts de lutte antiterroriste, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a ratifié cette semaine la loi sur la mise sous séquestre et la gestion des fonds terroristes. Jugée nécessaire pour pouvoir contrôler le financement clandestin des groupes terroristes, cette loi a été élaborée par le gouvernement et approuvée à l’unanimité par le parlement. Elle réglemente la mise sous séquestre et la gestion des fonds des groupes terroristes. La loi prévoit la mise en place d’un comité judiciaire indépendant, chargé de traquer, de recenser et de mettre sous séquestre les fonds de tout groupe, entité ou personne classés par la justice comme terroriste ou condamnés pour implication dans un acte terroriste.

Ce comité, dont le mandat sera d’un an renouvelable, est composé de 7 juges de la Cour d’appel, choisis par le ministre de la Justice. Leur nomination doit être approuvée par le président de la République après l’accord du Conseil suprême de la magistrature. La loi donne au comité le droit de recourir aux organismes gouvernementaux ou non gouvernementaux, aux banques et institutions de l’Etat, et de les obliger à fournir tous les documents, données ou informations requis, sans nuire ni à la confidentialité, ni à la sécurité nationale.

Dans son article 11, la loi stipule aussi qu’en cas de jugement définitif, le comité a le droit de disposer des fonds en question, et de les transférer au Trésor public. Pour garantir la transparence, l’équité et la légalité des procédures de confiscation des fonds, la loi confie à la Cour des référés l’examen des plaintes déposées contre les décisions du comité dans un délai de 8 jours à compter de la date de notification de la personne dont les avoirs ont été saisis. La cour doit donner sa décision dans les 30 jours suivant la présentation des plaintes.

Combler les failles

La promulgation de cette loi est perçue comme une nécessité pour couper les sources de financement des groupes terroristes, mais aussi pour légaliser les procédures de mise sous séquestre des fonds appartenant aux groupes terroristes et éviter qu’ils fassent objet de pourvoi.

En 2015, une loi sur les entités terroristes a été promulguée, définissant les critères qui permettent de placer des personnes ou des groupes sur la liste terroriste. En outre, la loi stipulait le gel des avoirs de toute personne figurant sur cette liste. Un comité administratif a été chargé de saisir les avoirs des personnes classées terroristes ou condamnées pour crime terroriste. Mais la nature administrative de ce comité a fait que ses décisions ont fait l’objet de recours judiciaires, et leur légalité et constitutionalité ont été contestées.

A titre d’exemple, il y a deux semaines, la Cour suprême administrative a confirmé le dégel des avoirs du célèbre footballeur Mohamad Abou-Treika, accusé d’avoir financé la confrérie interdite des Frères musulmans. Début 2018, l’ancien joueur avait bénéficié d’une décision de justice en sa faveur, un tribunal ordonnant le dégel de ses avoirs, jugement confirmé en appel samedi dernier. Il revient désormais à la Cour constitutionnelle de se prononcer définitivement sur ce dossier.

En mai 2015, une commission du ministère de la Justice, chargée de confisquer des avoirs appartenant aux Frères musulmans, avait gelé ceux d’Abou-Treika, notamment ses actions dans une agence de voyage. Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, les anciens comités seront abolis comme le stipule l’article 17. « Le plus important dans ce nouveau texte c’est qu’il évite les failles législatives ou constitutionnelles. La nouvelle loi confie entièrement à la justice la tâche de mettre sous séquestre les fonds et les biens terroristes. Ce qui évitera que ces décisions soient invalidées pour non-constitutionnalité », explique Diaeddine Daoud, membre de la commission des lois au parlement, qui a participé à la rédaction de la loi. Il souligne que cette loi « ne vise pas les Frères musulmans, mais tous groupes terroristes ».

Sur un autre volet, le député Yéhia Al-Kédwani, membre de la commission de la défense et de la sécurité nationale au parlement, explique que cette loi est une échéance constitutionnelle, puisque l’article 237 de la Constitution de 2014 stipule que « l’Etat s’engage à lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes, et à couper ses sources de financement, suivant un calendrier précis, car le terrorisme est une menace à la patrie et aux citoyens. Il faut donc lutter contre ce fléau sans nuire aux droits et aux libertés publiques », affirme Al-Kédwani. Et d’ajouter : « Pour en finir avec le terrorisme, il est nécessaire de couper ses sources de financement ». L’importance de cette loi réside dans le fait qu’elle enlève aux groupes terroristes tous les moyens de financement possibles qui leur permettent d’acheter des armes et des explosifs, insiste le député. Il rappelle que cette mesure va de pair avec la stratégie de lutte antiterroriste adoptée par l’Egypte, qui a récemment participé à la Conférence sur la lutte contre le financement du terrorisme tenue à Paris.

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