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Réaction mesurée

Mohamad Abdel-Hady, Mardi, 25 septembre 2012

Après le film produit aux Etats-Unis, un hebdomadaire français, Charlie Hebdo, a exacerbé la colère des musulmans en publiant des caricatures sur le prophète Mohamad. En Egypte, les dessins n’ont provoqué aucune réaction violente.

Réaction mesurée

Alors que les répercussions du film anti-islam, diffusé sur Internet il y a plus d’une semaine, continuent à se faire sentir en Egypte et à travers le monde islamique, un hebdomadaire français, Charlie Hebdo, a décidé de défier les sentiments des musulmans en publiant des caricatures représentant le prophète Mohamad.

Les autorités égyptiennes ont renforcé la sécurité des bâtiments autour de l’ambassade de France, dans le quartier de Guiza. Les écoles et centres culturels français en Egypte ont fermé jeudi par mesure de précaution, a déclaré le consulat dans un message adressé par e-mail à la communauté française.

Mais les Egyptiens n’ont pas réédité leurs manifestations de la semaine dernière devant l’ambassade américaine suite au film anti-islam. Aucun mouvement islamiste n’a appelé à manifester dans la rue.

Devant l’ambassade de France, ils n’étaient qu’une cinquantaine à manifester vendredi contre les « atteintes à l’islam ». Le mufti d’Egypte, Ali Gomaa, a tenu à appeler les musulmans offensés par les caricaturesreprésentant leur prophète de suivre l’exemple de ce dernier. « Mohamad et ses compagnons essuyaient les pires insultes de la part des non-croyants sans répondre à ces insultes », a rappelé le mufti.

« Nous sommes dans un pays où la liberté d’expression est garantie, la liberté de caricature aussi. Mais si vraiment des personnes se sentent heurtées dans leurs convictions et pensent qu’il y a eu dépassement du droit — nous sommes dans un Etat de droit, cet Etat de droit doit être totalement respecté — elles peuvent saisir les tribunaux », avait déclaré le premier ministre français, Jean-Marc Ayrault, résumant un débat qui a divisé le long de la semaine dernière l’opinion publique française. Le Parti Liberté et Justice (PLJ), bras politique de la confrérie des Frères musulmans dont est issu le président Mohamad Morsi, a demandé au gouvernement français de « prendre des mesures fermes et rapides contre ce magazine », évoquant « la position sévère des autorités françaises contre ceux qui nient l’Holocauste » en France.

Le parti a également réclamé enfin aux Nations-Unies « un accord international » pour protéger les symboles religieux. Prenant les devants, l’avocat de la confrérie des Frères musulmans, Abdel-Moneim Abdel-Maqsoud, a annoncé la formation d’une équipe d’avocats d’Egypte et de France pour engager des poursuites contre Charlie Hebdo.

Le PLJ s’interroge par ailleurs sur le moment choisi pour publier ces caricatures extrémistes, quelques jours après le film américain portant atteinte au prophète, et se demande si cela veut dire que « des mains cachées poussent le monde occidental à provoquer les peuples arabes et musulmans, qui ont commencé à se libérer des régimes dictatoriaux corrompus ».

Dans les cercles intellectuels et francophones, si l’on admet (ou admire) le respect des libertés dont celle de la parole dans les sociétés occidentales, peu de gens apprécient ce genre de provocations gratuites. L’écrivain et journaliste Chérif Al-Choubachi pense que le ton ferme de la France pour défendre ses principes laïques est justifiable car, selon lui, la France craint une montée en puissance des courants islamistes fondamentalistes venus d’Afrique du Nord. Toutefois, il affirme que cette liberté d’expression, qui est chère aux Français, reconnaît « des limites à travers des lois incriminant l’antisémitisme et le négationnisme ».

De son côté, Gamal Al-Ghitani, un autre écrivain francophile, déplore que dans leurs réactions, certains responsables français n’ont pas ménagé les sentiments des musulmans, notamment les 5 millions de musulmans qui vivent en France.

Mais préférant s’arrêter plutôt devant la réaction de ses compatriotes, Al-Ghitani estime qu’il est capital que les Egyptiens apprennent à gérer leur colère et à manifester pacifiquement. « Déchirer, brûler le drapeau américain et le remplacer par l’étendard noir d’Al-Qaëdaen la journée de commémoration des attentats du 11 septembre c'était une folie qui ne doit pas se reproduire », a-t-il conclu. Tandis que les responsables français défendaient bec et ongles la « liberté d’expression », l’ambassade de France au Caire a refusé de s’exprimer sur le sujet

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