Al-ahram Hebdo : Vous êtes désormais le président du syndicat des Journalistes, quelles sont vos premières impressions après cette élection ?
Abdel-Mohsen Salama : D’abord, je remercie l’assemblée générale des journalistes qui m’a accordé sa confiance. La participation massive à ces élections prouve que l’assemblée générale est consciente plus que jamais des défis de taille qu’envisage le métier et qui nécessitent qu’on resserre nos rangs. Les journalistes n’ont pas voté pour ma personne mais pour l’unité du syndicat, un étendard sous lequel se regroupent tous les journalistes de toutes tendances politiques. J’avoue que ces élections étaient l’une des plus importantes dans l’histoire du syndicat. Elles se sont tenues dans un contexte exceptionnel où les journalistes étaient plus que jamais divisés sur le rôle et l’exercice du syndicat. La mauvaise gestion de l’ex-président du syndicat, Yéhia Qallach, de la crise de l’invasion par la police des locaux du syndicat a créé un bras de fer injustifiable avec le gouvernement. Moi aussi j’étais contre cette invasion mais je trouve que l’affaire devait être traitée avec plus de lucidité. Et voici que l’affaire s’est terminée par une poursuite judiciaire contre l’ex-président du syndicat accusé d’abriter des journalistes faisant l’objet d’un acte d’arrestation.
— Justement, c’est à cause de cette affaire que certains estimaient que vous étiez soutenu par le gouvernement dans ces élections en vue d’évincer Qallach ...
— Il ne s’agit que de rumeurs infondées parmi d’autres véhiculées pendant la campagne électorale. Je l’ai dit à maintes reprises : je ne suis pas le candidat du gouvernement même si je maintiens de bons rapports avec ce dernier. Et ce n’est pas une accusation à mon encontre, ni en tant que journaliste ni aujourd’hui en tant que président du syndicat. Ces canaux avec les responsables permettent de négocier les droits des journalistes et de résoudre leurs problèmes. Cela ne s’oppose en aucun cas à l’indépendance du syndicat.
— Quelle sera donc votre position vis-à-vis du procès de Qallach et de deux autres membres du syndicat, dont le verdict est attendu le 28 mars ?
— Certes, je les défendrai coûte que coûte. C’est le rôle du syndicat de défendre ses membres quand il s’agit de questions de libertés. Je n’interviens pas dans les affaires de la justice, mais je souhaite qu’ils ne soient pas condamnés à des peines de prison.
— Quelles seront vos priorités en tant que président du syndicat ?
— Tout d’abord, je réaffirme que je représenterai tous les journalistes de toutes tendances politiques. Mais je ne permettrai pas que le syndicat dévie de son rôle professionnel ou qu'il soit manipulé par un quelconque courant politique comme auparavant. Ce genre de pratiques n’a entraîné que la régression du rôle essentiel du syndicat, à savoir la défense des droits des journalistes et de la liberté de la presse. Par ailleurs, il est temps de se pencher sur les dossiers cruciaux. La presse écrite traverse une phase critique vu la situation économique. Plusieurs journaux privés ont dû fermer et des dizaines de journalistes ont été licenciés, les entreprises officielles endurent aussi les impacts de cette crise. C’est un véritable défi que de faire sortir l’industrie de la presse de sa crise, et parallèlement oeuvrer à améliorer les salaires des journalistes. Je vais entamer avec le gouvernement des négociations sur la possibilité de subventionner l’encre, le papier et les coûts d’impression, à cause de l’augmentation faramineuse des prix.
Sur le volet professionnel, la structure législative régissant la presse écrite nécessite un changement radical. Le syndicat luttera pour des législations garantissant la liberté de la presse et le libre-échange d’informations. Je vais aussi oeuvrer à la modification de la loi du syndicat, datant des années 1970, en vue qu'elle aille de pair avec les grandes évolutions qu’a connues la presse.
Lien court: