
Il faudra encore beaucoup de temps pour établir des liens directs entre la culpabilité de la famille Moubarak
et les fonds bloqués en Suisse.
(Photo : Loula Lahham)
Depuis 2011, et suite à la révolte qui a chassé Hosni Moubarak du pouvoir, les autorités égyptiennes ne cessent de demander l’aide de la Suisse pour récupérer les fonds détournés par Moubarak et qui sont déposés dans des banques suisses. La Suisse avait en effet bloqué environ 590 millions de francs suisses appartenant à l’ex-raïs ou à ses proches. C’est dans ce contexte que s’inscrit la visite, cette semaine au Caire, des représentants du Ministère Public de la Confédération suisse (MPC), avec à leur tête, le procureur général suisse, Michel Lauber. Les responsables suisses ont rencontré des responsables du pouvoir judiciaire en Egypte.
La visite de Michel Lauber intervient au lendemain de la décision de la Cour de cassation, la plus haute instance juridique d’Egypte, de confirmer les peines prononcées contre l’ancien président et ses deux fils Alaa et Gamal, pour corruption et détournement de fonds publics dans le procès des palais présidentiels. En mai dernier, ils avaient été condamnés à une peine de 3 ans d’emprisonnement. Ils devront aussi s’acquitter d’une amende de 125 millions de L.E. (environ 16 millions de dollars) et restituer 21 millions de L.E. (2,45 millions d’euros) au Trésor égyptien.
Moubarak et ses deux fils ne seront pas emprisonnés, ayant déjà passé plusieurs années en détention provisoire. « La Suisse est prête à restituer les fonds bloqués uniquement en présence d’un lien direct entre le procès de Moubarak pour corruption et les fonds placés dans les banques suisses. C’est pour cette raison que le verdict dans le procès de l’ancien raïs doit être soigneusement étudié en rapport avec l’argent placé en Suisse par la famille Moubarak », a déclaré Michel Lauber lors d’une conférence de presse samedi au Caire. Et d’ajouter : « Tous les verdicts qui ont été récemment prononcés pour corruption contre Moubarak et sa famille seront analysés par la Suisse. Mais tant qu’un lien direct entre le crime et l’argent en question n’aura pas été établi, la Suisse ne sera pas dans l’obligation de restituer à l’Egypte ces fonds ».
Le procureur suisse a souligné que les échanges directs entre responsables suisses et égyptiens sont très importants pour faire avancer l’enquête. « Une coopération internationale coordonnée est indispensable et la contribution des autorités égyptiennes est essentielle pour permettre au MPC de prendre les décisions adéquates », a déclaré M. Lauber. « Le MPC avait mené ses investigations en restant très attentif aux nombreux jugements rendus en Egypte. Or, depuis le début de la procédure, le MPC avait sollicité des informations, par l’envoi d’environ 30 demandes d’assistance judiciaire, auprès des autorités juridiques égyptiennes. Le MPC a ensuite procédé à l’analyse de ces informations en les confrontant aux résultats de ses propres analyses financières pour déterminer si les fonds faisant l’objet d’un blocage en Suisse provenaient de l’une des infractions poursuivies en Egypte », a ajouté le responsable suisse. Le montant des fonds bloqués s’élève à 590 millions de francs suisses. Les lois suisses exigent, pour débloquer des fonds, l’existence d’un lien de causalité ou de connexité directe avec une infraction judiciaire.
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