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Les Frères bénéficient d’un recours

Chaïmaa Abdel-Hamid, Mardi, 08 décembre 2015

La peine de mort prononcée en première instance contre le guide suprême des Frères musulmans et 36 autres cadres de la confrérie accusés d'avoir planifié des attaques terroristes a été annulée par la Cour de cassation.

Les Frères bénéficient d’un recours

La Cour de cassation, la plus haute juridiction pénale du pays, a annulé la semaine dernière un jugement de peine de mort contre le guide suprême des Frères musulmans, Mohamad Badie, ainsi que d’autres dirigeants de la confrérie bannie dans une affaire de violences qui a suivi la destitution de l’ancien président Mohamad Morsi.

La Cour de cassation a également ordonné la reprise du procès de Badie et ses compagnons devant une nouvelle juridiction de la Cour pénale. Celle-ci devra fixer ultérieurement la date de la reprise du procès qui date d’avril dernier.

Parmi les 37 concernés, 12 étaient condamnés à mort, dont Badie. Alors que parmi les condamnés à la prison à perpétuité, soit 25 années de détention, on compte notamment Géhad Haddad, un ancien porte-parole du parti des Frères musulmans. Ils avaient été accusés par le Parquet général d’avoir établi un « centre d’opérations » en vue de « préparer des attaques contre l’Etat », au moment où les partisans de l’ancien président déchu Mohamad Morsi observaient un immense sit-in au Caire sur la place Rabea Al-Adawiya. Ce rassemblement avait été dispersé en août 2013, entraînant la mort de 624 manifestants et 8 policiers.

Or, le guide suprême des Frères musulmans est sous la coupe d’autres verdicts. Il a été condamné à mort en juin aux côtés de Mohamad Morsi pour des violences durant la révolte de 2011 qui chassa Hosni Moubarak du pouvoir. Il a écopé des peines de prison à vie dans cinq autres affaires. Aucun de ces verdicts n’est définitif et sont tous passibles de cassation.

Sameh Eid, avocat, estime que ce verdict est porteur de message politique. « Ces peines de mort collectives dérangent l’Occident et sont évoquées lors des déplacements à l’étranger du président Abdel-Fattah Al-Sissi. Récemment à Londres, ce dernier a souligné que ces jugements ne sont pas définitifs. Et voilà qu’en écho, ce jugement est sorti, ce qui ne veut pas forcément dire qu’il s’agit d’un verdict politisé », explique Eid. L’avocat activiste tient aussi à souligner qu’en ce moment, il est tout aussi important pour l’Egypte de gagner le soutien et la confiance de certaines forces régionales comme les pays du Golfe, qui ne voient pas les Frères musulmans comme leur premier ennemi.

Le contexte politique interne serait aussi, selon Eid, un facteur important qui exige une trêve avec la confrérie. « Vu la situation économique et le danger terroriste dans le Sinaï et à la frontière avec la Libye, il serait dans l’intérêt de l’Egypte de calmer le jeu avec les Frères musulmans pour ne pas avoir à combattre sur plusieurs fronts. Aujourd’hui, beaucoup de partisans de la confrérie commencent à sortir des prisons, sans tapage médiatique », explique-t-il.

Mohamad Zarea, président de l’Organisation arabe pour la réforme pénale, n’exclut pas que la décision de la Cour de cassation soit le prélude d’une accalmie politique entre l’Etat et les Frères musulmans. « La possibilité d’un dialogue conditionné serait donc probable, mais il est peut-être encore trop tôt de parler d’un retour de la confrérie à la vie politique. La Cour pénale peut à tout moment discréditer ces prédictions en confirmant la peine de mort », prévient Zarea.

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