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Le nucléaire reste au centre des tensions en Asie

Abir Taleb avec agences, Lundi, 03 décembre 2012

Pyongyang a annoncé son intention de mettre prochainement sur orbite un satellite d’observation terrestre. Une partie de la communauté internationale soupçonne une activité liée aux recherches nucléaires.

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Washington, Tokyo et Séoul ont vivement réagi à l'annonce nord-coréenne. (Photos: Reuters)

L’annonce par la Corée du Nord du lancement imminent d’un satellite d’observation terrestre ravive les tensions avec l’Occident et le voisin sud-coréen qui a immédiatement exprimé sa « profonde inquiétude ». Cette annonce intervient sept mois après un tir similaire qui avait échoué, mais qui fut considéré par la communauté internationale comme un test déguisé d’un missile à capacité nucléaire. Le Comité coréen de technologie spatiale (DPRK) a annoncé qu’il prévoyait de mettre sur orbite, entre le 10 et le 22 décembre, un satellite d’observation terrestre après l’analyse par des scientifiques « des erreurs commises pendant le lancement précédent d’avril ». Le DPRK affirme avoir travaillé à l’amélioration « de la fiabilité et de la précision du satellite et de la fusée porteuse », selon un communiqué rendu public par l’Agence de presse centrale de Corée (KCNA). Le communiqué de la KCNA a affirmé que la mission de décembre se déroulerait « en
parfaite adéquation » avec les conventions internationales sur le lancement des satellites.

Défi d’importance

Pour une partie de la communauté internationale, cette décision est perçue comme un défi d’importance susceptible de déstabiliser la péninsule coréenne. L’annonce du régime communiste, sous le coup de multiples sanctions internationales après deux essais nucléaires réalisés chacun en 2006 et 2009 dans la foulée d’un tir de fusée/missile, a provoqué une vive réaction de Washington, de Tokyo et de Séoul notamment. Les Etats-Unis ont dénoncé une « grande provocation qui menace la paix et la sécurité dans la région » et ont rappelé que « toute utilisation par la Corée du Nord de la technologie de missiles balistiques est une violation directe des résolutions du Conseil de sécurité de l’Onu ». « Nous appelons la Corée du Nord à se plier totalement à ses obligations découlant des résolutions du Conseil de sécurité », a déclaré dans un communiqué la porte-parole du département d’Etat, Victoria Nuland, prévenant que les « Etats-Unis consultaient leurs alliés

sur les mesures à prendre ». Les menaces diplomatiques vont plus loin, Washington considérant que le fait « d’allouer ses ressources au développement d’armes nucléaires et de missiles à longue portée ne fera qu’isoler et appauvrir un peu plus la Corée du Nord ». Quant à la Corée du Sud, elle s’est dit « profondément inquiète » par cet « acte provocateur » qui défie les résolutions des Nations-Unies et qui pourrait avoir des répercussions significatives sur une Corée du Nord déjà isolée. Pour sa part, le Japon — qui n’entretient pas de relations diplomatiques avec Pyongyang — a déclaré qu’il allait ajourner ses pourparlers avec la Corée du Nord, suite à cette annonce par Pyongyang, selon l’agence Kyodo. De hauts diplomates japonais et nord-coréens devaient se rencontrer à Pékin les 5 et 6 décembre après des discussions similaires menées en Mongolie à la mi-novembre. Le ministre japonais de la Défense, Satoshi Morimonto, a demandé aux forces japonaises de se tenir prêtes à détruire la fusée nord-coréenne au cas où elle serait lancée. Le Japon a, en outre, déclaré qu’il travaillerait étroitement avec les Etats-Unis, la Corée du Sud et la Chine pour dissuader la Corée du Nord de procéder au lancement annoncé, a indiqué de son côté l’agence Jiji, citant des responsables nippons.
Cercle vicieux
Le tir annoncé par Pyongyang coïncide par ailleurs avec le premier anniversaire de la mort de Kim Jong-Il, survenue le 17 décembre 2011. Un an après, son fils Kim Jong-Un qui lui a succédé semble vouloir asseoir son autorité. Selon le professeur Yang Moo-Jin de l’Université des études nord-coréennes à Séoul cité par l’AFP, le dirigeant nord-coréen joue un jeu à haut risque avec la communauté internationale.

Le tir, surtout s’il était réussi, justifierait probablement un nouveau train de sanctions, que ce soit unilatéralement par quelques pays hostiles ou en concertation avec un ensemble de nations, par exemple réunis à l’Onu. « Dans ce cas, la Corée du Nord réagirait fortement, sans doute en augmentant son activité nucléaire et peut-être en effectuant un troisième essai nucléaire », prévient le dirigeant Coréen. « C’est ainsi qu’on entre dans un cercle vicieux et l’escalade des tensions », a-t-il ajouté. L’annonce de samedi ravive des semaines de suspicion, fondée sur l’analyse d’images satellites, selon laquelle la Corée du Nord serait en pleine préparation d’un nouveau test de missile balistique depuis la station de lancement du satellite de Sohae.

Nouvelles images
Déjà, la semaine dernière, un opérateur satellite américain avait dévoilé une nouvelle image d’un site de lancement de missile nordcoréen montrant, selon lui, une activité accrue qui pourrait augurer d’un nouveau tir de missile balistique dans les semaines à venir. D’ailleurs, l’agence de presse japonaise Kyodo, s’appuyant sur une source diplomatique occidentale, a affirmé récemment que des conseillers iraniens étaient en Corée du Nord depuis la fin octobre pour vraisemblablement renforcer la coopération entre Téhéran et Pyongyang en matière de lancement de missiles et de nucléaire.
La mission iranienne serait constituée de quatre experts du ministère de la Défense ou de firmes qui lui sont proches. Les conseillers résideraient dans une base militaire située à 85 km de la frontière nord-coréenne avec la Chine, précise Kyodo. La Corée du Sud avait aussi, à plusieurs reprises, averti que la Corée Nord chercherait à déstabiliser la péninsule coréenne à l’approche
de l’élection présidentielle du 19 décembre. En effet, l’annonce de Pyongyang intervient à un moment de transition important pour les Etats-Unis, le Japon, la Chine et la Corée du Sud, quatre des six nations engagées dans des pourparlers sur le programme nucléaire nordcoréen. Ces discussions sont au point mort. Le Japon organise des élections générales le 16 décembre et la Corée du Sud tient son élection présidentielle le 19. La Chine, principal bailleur de fonds et soutien diplomatique de Pyongyang, vient de son côté de renouveler sa direction pour les dix années à venir, et le président américain Barack Obama s’apprête tout juste à entamer son second mandat.

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