14 personnes, dont 9 assaillants, ont péri à cause du dernier attentat visant le palais présidentiel à Mogadiscio.
(Photo:Reuters)
De nouveau, les combattants extrémistes Shebab sont apparus en force sur la scène pour menacer la Somalie. Vendredi dernier, 14 personnes, dont 9 parmi les assaillants, ont péri dans un spectaculaire attentat visant le palais présidentiel de Mogadiscio. Le président somalien, Hassan Cheikh Mohamoud, qui avait déjà été la cible d’un attentat moins de 48 heures après son élection, en septembre 2012, n’a pas été blessé dans cette attaque revendiquée par les rebelles. Il est sorti indemne tandis qu’un membre du cabinet du premier ministre et un ancien chef adjoint des services de renseignements figuraient parmi les victimes. L’Union des journalistes somaliens a précisé qu’un journaliste, Ahmed Said Ahmed, travaillant pour Radio Kulmiey, avait été gravement blessé dans l’attaque et se trouvait dans un état critique. « Nos commandos ont attaqué le prétendu palais présidentiel pour tuer ou arrêter ceux qui sont à l’intérieur », a déclaré à l’AFP Aziz Abu Musab, porte-parole des Shebab, qui ont juré la perte des autorités somaliennes. Selon Abu Musab, cet assaut montrait qu’aucun endroit n’est sûr pour le gouvernement « apostat ». « L’aéroport, le soi-disant palais présidentiel, comme tout autre endroit en Somalie peuvent être attaqués suivant nos plans », jure le porte-parole.
L’attaque de vendredi survient une semaine à peine après un autre impressionnant attentat dans la capitale somalienne, également revendiqué par les Shebab : le 13 février, 6 personnes au moins avaient péri dans l’explosion d’une voiture piégée visant un convoi de l’Onu à l’entrée du complexe ultra-sécurisé de l’aéroport de Mogadiscio. Celui-ci abrite notamment le quartier général de l’Amisom, des bureaux de l’Onu et des antennes diplomatiques occidentales.
Les Shebab, affiliés à Al-Qaëda, ont été chassés de la capitale somalienne en août 2011 par la fragile armée somalienne et la force de l’Union africaine. Depuis, ils ont perdu leurs bastions dans le sud et le centre du pays. Mais ils continuent de contrôler de vastes zones rurales et, à Mogadiscio, de lancer des attaques de type guérilla de plus en plus sophistiquées, qui se sont multipliées ces derniers temps. Le 1er janvier, un double attentat à la voiture piégée devant un hôtel de la capitale, fréquenté par des responsables somaliens et étrangers en visite dans la capitale somalienne, avait encore fait au moins 11 morts.
Si l’Amisom et ses 17 000 soldats, ainsi que l’armée somalienne, sont parvenus à chasser les Shebab de la capitale et de la ville côtière de Kismayo, ils peinent à assurer la sécurité de tout le pays. Très mobiles, les combattants islamistes imposent aux forces chargées du maintien de la paix une guerre asymétrique. Harcèlement des axes de transport logistique, embuscades ou encore pose de mines. Les Shebab, malgré leur infériorité numérique (environ 4 000 hommes), arrivent à équilibrer le rapport de force à travers de nombreux points du territoire. L’Amisom, en difficulté face à ces méthodes de combat, doit aussi faire face à un manque cruel de moyens militaires. La force ne dispose pas d’hélicoptères ou de navires de guerre afin de surveiller l’ensemble du territoire somalien qui s’étend sur près de 640 000 km2. Alors que des regains de tensions surviennent entre plusieurs Etats sécessionnistes et unionistes, l’Amisom et l’armée somalienne se retrouvent face à de nouveaux défis. Reste désormais à savoir quelle stratégie sera adoptée pour venir à bout des Shebab et restaurer l’intégrité de la totalité du territoire.
La Somalie est plongée dans le chaos et la guerre civile depuis la chute du président, Siad Barre, en 1991. Face à cette situation, le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, a « fermement condamné » l’attaque et « réitéré le soutien indéfectible des Nations-Unies » aux Somaliens « dans leur lutte contre l’extrémisme ».
Qui sont les Shebab ?
Shebab est un groupe islamiste somalien issu de la fraction la plus dure de l’Union des tribunaux islamiques, qui milite pour l’instauration de la charia. Il a été créé en 2006 lors de l’invasion éthiopienne et s’est déclaré en 2009 en guerre contre le gouvernement de Sharif Ahmed, issu de la tendance plus modérée des Tribunaux islamiques. C’est l’une des deux grandes organisations islamistes somaliennes, avec le Hezb Al-Islamiya du cheikh Hassan Dahir Aweys. Ils sont dirigés par Moktar Ali Zubeyr, successeur du cheikh Mukhtar Robow. Le fondateur du groupe, Aden Hashi Farah « Ayro », a été tué le 1er mai 2008 dans une frappe aérienne américaine qui fit plusieurs victimes civiles. Après leur succès initial, ils contrôlaient une partie du pays en 2008 avant d’être obligés de se replier en 2011 face aux offensives de l’armée somalienne appuyée par l’Union africaine.
En septembre 2013, leurs rangs compteraient environ 5 000 combattants. Ils sont cependant divisés en plusieurs factions rivales. Outre les ambitions personnelles, les partisans d’une révolution islamique mondiale divergent de ceux centrés sur l’objectif nationaliste consistant à prendre le pouvoir en Somalie. Dans ce cadre, le 29 juin 2013, le groupe annonce avoir tué 2 de ses chefs historiques, Ibrahim Haji Jama Mead dit « Al-Afghani » (l’Afghan) et Abul Hamid Hashi Olhayi.
L’organisation est placée sur la liste officielle des organisations terroristes des Etats-Unis en février 2008.
Elle est soupçonnée d’entretenir des liens forts avec la direction centrale d’Al-Qaëda au Pakistan et d’abriter des djihadistes étrangers, dont certains en provenance d’Europe et des Etats-Unis. L’intensification des actions militaires américano-pakistanaises dans les zones tribales au sud du Waziristan menace la survie des hauts responsables de la mouvance, de nombreux chefs d’Al-Qaëda sont soupçonnés de se préparer à quitter leur sanctuaire afghano-pakistanais pour gagner la Somalie .
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