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Gamassa affiche complet

Dina Bakr , Lundi, 21 août 2023

Près de 4 millions d’Egyptiens passent leurs vacances d’été à Gamassa, une destination très prisée sur la Méditerranée, car accessible à toutes les bourses.

Gamassa affiche complet
A Gamassa, on peut sortir même quand on n’a pas beaucoup de moyens. (Photo : AI-Ahram)

Il faut se lever tôt pour pouvoir trouver une place à la plage près de son lieu de séjour. S’installer au premier rang face à la mer exige de sortir de chez soi à 8h du matin. L’accès aux plages est gratuit tout au long des 11 km du littoral. A Gamassa, sur la Méditerranée, les estivants ne portent pas forcément de maillots, chacun choisit la tenue qui lui convient pour profiter de la mer. On peut se baigner en pyjama, en short jeans, en vêtements de sport, ou même en robe longue.

Les estivants arrivent de différents gouvernorats pour passer leurs vacances d’été dans cette petite ville située sur la côte méditerranéenne au nord-est du Nil, au gouvernorat de Daqahliya. Nombreux sont ceux qui viennent de plusieurs villages aux alentours. « Ici, les familles se connaissent et environ 75 % des estivants sont de Daqahliya. On est plus tranquille lorsqu’on envoie l’un de nos enfants à l’épicerie ; il ne risque pas de se perdre en chemin ou de se faire enlever », explique Hassan Chadi, directeur d’une école dans la ville de Mansoura, au gouvernorat de Daqahliya. Etant natif de cette province, il connaît beaucoup de personnes qui habitent Gamassa. Il ajoute que partir en vacances n’est pas compliqué pour lui ; il lui suffit de faire une heure de route en voiture pour se retrouver au bord de la mer. Le soleil et le beau temps sont au rendez- vous dans cette ville où l’odeur des plantes venant des villages voisins du Delta se mêle à l’agréable senteur de l’air marin de la Méditerranée. « Le taux d’humidité n’est pas trop élevé. Même si la température atteint les 40°C, la chaleur est supportable à Gamassa. Alors, on n’a pas besoin de louer un appartement avec climatiseurs dont le prix peut atteindre les 800 L.E. par nuit », explique Mona Youssef, professeure de sciences à Ezbet Al-Nakhl.

Des prix abordables

Les coûts de la location sont variables à Gamassa, et le prix moyen par nuitée est entre 350 et 400 L.E. Actuellement, tous les appartements sont occupés. Cependant, les estivants continuent d’affluer, et ce, sans avoir contacté à l’avance les courtiers ; donc, ils ne trouvent pas où loger. « Dès notre arrivée, j’ai laissé mon numéro de portable avec plusieurs agents immobiliers pour pouvoir louer un appartement au quartier Amoun au centreville, afin d’être proche de tous les services », confie Helmi, chauffeur de taxi sur l’autoroute Damiette-Mansoura. Il est habitué à rencontrer ces courtiers à la station de bus qui se trouve juste après l’entrée de la ville, mais aujourd’hui, aucun d’eux n’est là. Comme il fait très chaud, beaucoup de personnes ont avancé leurs dates de vacances pour se rendre au bord de mer. Il dit avoir passé 2 nuits dans un jardin public à Gamassa avec sa femme et ses 2 fils avant de trouver un logement. Helmi n’est pas le seul estivant à avoir passé la nuit dans un jardin public de la ville, beaucoup ont dormi à la belle étoile, attendant que des logements soient libres. Les prix de location à Gamassa sont à la portée de toutes les bourses : des plus modestes aux plus nantis. Alors, ça vaut la peine d’attendre sur la rue et profiter de l’air marin. Hatem Sayed, avocat cairote, est venu avec sa femme pour passer une semaine de vacances. « Je suis membre de plusieurs groupes Facebook de Gamassa. J’étais déjà au courant des prix de location des parasols, des chaises, des repas dans les restaurants et cafétérias. Ici, les poissons servis dans les restaurants sont frais et coûtent moins cher que dans la capitale. Un kilo de tilapia coûte ici 70 L.E., tandis qu’au Caire, il est à 140. Le kilo de mulet est à 105 L.E., tandis que dans la capitale il frise les 200 L.E. », confie-t-il. Ce jeune homme dit qu’il profite pleinement de ses vacances tout en mangeant des produits frais à Gamassa, et ce, grâce à sa proximité des zones rurales. Et la pêche à Gamassa est quotidienne, sans l’intervention de médiateur ou de moyens de transport qui augmentent les prix des produits alimentaires.


Gamassa ne fait pas de distinction entre pauvres et riches. (Photo : AI-Ahram)

Au fil de la semaine de vacances, les estivants se font une santé et profitent de cette vie simple, facile et agréable au bord de mer. On trouve aussi des restaurants gérés par des Syriens à Gamassa, devenue leur lieu de gagne-pain l’été comme l’hiver. « Depuis leur inauguration à Gamassa il y a une dizaine d’années, et avec leurs spécialités culinaires, ces restaurants ont réussi à gagner de la clientèle », affirme Doaa, qui travaille dans une agence immobilière. Elle apprécie leur cuisine et surtout leur façon de gérer leurs projets tout en faisant plaisir aux clients qui, à leur tour, n’hésitent pas à retourner au même endroit. A côté de ces restaurants voués à la bonne bouffe, d’autres endroits ont ouvert leurs portes pour la plus grande joie aussi bien des enfants que des adultes, comme Gardenia, un complexe de cafétérias, restaurants, une piscine et un parc aquatique. « Le billet d’accès à la piscine coûte 70 L.E. la personne, et parfois, il y a des offres. Si le groupe dépasse les 5 personnes, on peut avoir un billet gratuit », dit Fatma, qui préfère ramener ses enfants à la piscine car la baignade est surveillée et l’eau n’est pas profonde. A Gardenia, les estivants ont la possibilité de ramener leur déjeuner avec eux. On ne les oblige pas à commander dans les restaurants qui se trouvent à l’intérieur du complexe.

Une plage familiale

Tout est possible à Gamassa, et il n’y a pas de règles à suivre pour passer ses vacances d’été. Les anciens restaurants de la ville ne se limitent pas aux plats du petit-déjeuner et du déjeuner, c’est-à-dire que si le client au moment du déjeuner demande un plat de foul, il sera servi, alors que le client voisin peut commander un canard farci. Le menu du jour n’indique pas d’heure où le foul n’est plus servi, comme c’est le cas dans d’autres restaurants ou dans les hôtels cinq étoiles. Nombreuses sont les personnes qui gardent de bons souvenirs de vacances d’été passées à Gamassa. Le penchant pour le lieu et le sentiment de sécurité ressenti sont les deux éléments qui incitent les estivants à retourner à Gamassa et pas dans d’autres endroits. Islam, 40 ans, s’y rend chaque été avec sa famille, et ce, depuis qu’il s’est marié. Il trouve que des destinations comme Al-Sahel Al-Chamali (Côte-Nord) ou Charm Al-Cheikh sont adaptées aux célibataires. Il ajoute qu’un père de famille qui emmène sa femme et ses enfants dans de tels endroits est un homme irréfléchi. « Les estivants à Charm ou à la Côte-Nord font partie d’une autre catégorie de société. Difficile de s’accommoder aux ambiances festives animées par des stars de la chanson et à ce mode de vie très ouvert qui ne ressemble pas au nôtre », explique-t-il. Il ajoute qu’une fois en vacances à Gamassa, il évite de séjourner près de cafétérias où la musique résonne jusqu’à tard dans la nuit. Il veut passer un séjour agréable en toute quiétude tout en respectant ses traditions culturelles, et c’est le cas de nombreuses familles qui viennent passer leurs vacances à Gamassa. Il y a également ceux qui aiment se baigner, profiter des plaisirs de la mer, et en même temps, augmenter leurs revenus durant les mois d’été. Mohamad, 35 ans, professeur d’anglais freelance, utilise sa voiture privée comme moyen de transport à l’intérieur de Gamassa ou pour emmener des estivants dans les villes aux alentours. « A l’intérieur de la ville, je prends 30 L.E., mais si le trajet est loin de la ville, le tarif varie entre 75 et 150 L.E. au maximum », dit-il. Lui et quelques chauffeurs communiquent leurs numéros de téléphone aux passagers. Ils ne possèdent pas d’application sur le portable car le rabais accordé aux clients est important. Alors, ils ont décidé de travailler directement avec les estivants en les emmenant d’un endroit à l’autre. Mais d’où vient le nom de Gamassa ? L’histoire raconte que cette petite ville avait plu à Napoléon Bonaparte lors de son Expédition d’Egypte (1798-1801). Ce serait grâce à lui que la ville a porté son nom. Le site Egypt Forward raconte qu’après avoir passé quelques jours au bord de la mer dans cet endroit, Napoléon s’est exclamé : « J’aima ça ». L’arabisation de l’expression a transformé le j en g et le nom est devenu Gamassa !

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