Vendredi, 29 mars 2024
Al-Ahram Hebdo > Tourisme >

Ramsès II à l’honneur à Paris

Nasma Réda , Mercredi, 12 avril 2023

Entamant une tournée européenne, l’exposition « Ramsès et l’or des pharaons » est arrivée à Paris, où 181 pièces antiques venues d’Egypte sont exposées jusqu’au 6 septembre 2023.

Ramsès II à l’honneur à Paris

Avec 165 000 billets vendus lors des deux premiers jours, l’exposition « Ramsès et l’or des pharaons », inaugurée le 6 avril à Paris dans la Grande Halle de La Villette, devrait connaître un succès phénoménal. Les files d’attente s’allongent devant les portes d’entrée de La Villette. « 10 000 personnes par jour sont estimées tout le long de l’exposition, dépassant le nombre de l’exposition de Toutankhamon qui a accueilli 1,42 million de visiteurs en 2019, formant un record historique d’expositions en France », souligne Moustapha Waziri, secrétaire général du Conseil Suprême des Antiquités (CSA). Organisée en partenariat avec le CSA et produite conjointement par Cityneon et World Heritage Exhibitions, la tournée internationale de l’exposition dans 10 villes a débuté le 20 novembre 2021 par une première mondiale au Musée des sciences naturelles à Houston, puis à San Francisco, aux Etats-Unis. « Nous sommes enchantés de présenter au monde ce merveilleux ensemble », déclare Ron Tan, président exécutif et PDG du groupe Cityneon Holdings, dont l’équipe d’experts a conçu l’exposition. « Nos partenaires de World Heritage Exhibitions ont parfaitement compris notre vision, cherchant à mettre en lumière le formidable impact de Ramsès sur le développement historique de l’Egypte. Les visiteurs déambuleront parmi d’inestimables reliques du grand pharaon et pourront également se plonger dans l’atmosphère de l’époque grâce à une expérience de réalité virtuelle », ajoute-t-il. « En fait, ce n’est pas la première fois que le sarcophage de Ramsès II se présente en France. Lors de son arrivée sur le sol français au Bourget en 1976 afin d’être soignée, la momie de Ramsès II a été accueillie avec les honneurs dévolus à un chef d’Etat en exercice. Aucun autre souverain antique n’a été reçu avec un tel faste », souligne Dominique Farout, égyptologue et commissaire de l’exposition, ajoutant qu’à cette occasion, l’égyptologue Christiane Desroches-Noblecourt avait organisé au Grand Palais la magnifique exposition « Ramsès le Grand » et voilà que Ramsès revient après 47 ans d’absence par le truchement de cette nouvelle exposition prestigieuse.

Avec 181 pièces exposées dans une muséographie aussi esthétique que soignée, réalisée par World Heritage Exhibitions, cette exposition durera 5 mois. « Des décors somptueux entourent les artefacts sur fond d’une partition musicale personnalisée. Ils sont accompagnés de présentations multimédias uniques de la bataille de Qadech et d’une momification virtuelle », précise John Norman, directeur général de l’exposition.

Dans la file d’attente, avant d’entrer dans le sas, plusieurs tableaux chronologiques du règne permettent de se situer dans le temps. Il s’agit du Nouvel Empire, où Ramsès II vécut au XIIIe siècle avant notre ère. Après sa mort, son souvenir traversa les siècles et il devint une référence pour les successeurs qui montèrent sur le trône d’Egypte à la IIIe Période intermédiaire (1069-664 av. J.-C.) et à la Basse Epoque (664-332 av. J.-C.). Dans le sas d’entrée, un film évoque Ramsès II et sa postérité. Il permet ainsi d’introduire le plus grand de tous les souverains égyptiens et l’impact de son règne sur l’histoire de la civilisation pharaonique.


Les animations montrent l’Egypte Ancienne.

Le règne de Ramsès II

La première partie de l’exposition est entièrement dévolue au règne du célèbre pharaon. La nature de ce dernier est évoquée par le biais d’oeuvres conçues par les artistes qui réalisèrent divers objets en pierre. Une tête de statue colossale en granodiorite le montre au début de son règne, coiffé d’une perruque à petites boucles et portant un diadème sur lequel se dresse l’uraeus, le cobra qui protège le roi sur son front. Un obélisque en granit rose porte les cartouches de Ramsès et s’élevait sans doute dans sa capitale Piramsès avant d’être déplacée à Tanis. Des sphinx montrent aussi Ramsès et d’autres rois sous la forme de lions à tête humaine, coiffés du némès, parfois tenant entre leurs mains un vase dont la partie supérieure a la forme d’une divinité. Quelques contemporains notables de Ramsès, tel son vizir Paser, sont aussi présents. La statue cube de Paser est un bel exemple de sculpture conçue pour pétrifier la prière du dévot dans un temple. La richesse du règne est ainsi perçue au travers des productions statuaires parfois colossales, ainsi que la relation privilégiée qui existe entre le roi et les dieux.


La tête de Ramsès entourée des cartouches portant son nom et ses titres.

Le règne de Ramsès est aussi connu pour les guerres qui impliquèrent l’empire égyptien et ses voisins, en particulier l’empire hittite en Anatolie (l’actuelle Turquie). Une animation virtuelle raconte la bataille de Qadech, la plus importante de son règne, qui eut lieu en l’an 5, où le roi a sauvé in extremis sa vie et son empire. La paix retrouvée, Ramsès II put mener à bien sa politique de construction. L’exemple le plus éclatant est sans doute le temple d’Abou- Simbel en Nubie, une construction creusée dans la montagne et dont la façade est ornée de 4 colosses de près de 20 m de hauteur. Une fondation royale en particulier atteignit son apogée sous son règne : le village de Deir Al- Médinah, où vivaient les meilleurs artistes du royaume. Ces derniers avaient la charge de faire et de décorer les tombes des rois et des reines du Nouvel Empire. Ils se fabriquèrent également des tombes et un mobilier funéraire de premier choix. C’est le cas notamment de l’artiste nommé Sennedjem dont le magnifique sarcophage a conservé toutes ses couleurs et tous ses dessins. Son caveau, l’un des plus célèbres conservés in situ, est aussi évoqué dans l’exposition.

Mort et prospérité

La seconde partie de l’exposition est consacrée à la mort de Ramsès II et à son extraordinaire postérité. Il mourut nonagénaire et fut enterré dans la tombe qui fut creusée pour lui dans la Vallée des rois. Si cette sépulture fut pillée et abîmée par des inondations, une partie de son trésor fut sauvée comme l’atteste la présence d’objets portant son nom et qui furent réutilisés par ses successeurs, notamment à Tanis à partir de la XXIe dynastie. Défilent alors sous les yeux des visiteurs une variété incroyable d’objets précieux. Afin de comprendre l’importance du funéraire dans le monde ég yptien, un chapitre de l’exposition aborde le thème de la momification animale. De nombreux reliquaires et plusieurs momies d’animaux jamais présentées auparavant à l’étranger sont ainsi exposés et rappellent le soin apporté aux dépouilles après la mort afin de sauvegarder l’intégrité des êtres, humains comme animaux. Ces derniers, dûment préparés, étaient enterrés dans d’immenses nécropoles — on parle ainsi de millions de momies animales de toute sorte — afin de marquer la piété des gens envers leur dieu. Viennent ensuite les enveloppes corporelles royales, par le biais des sarcophages, masques funéraires, colliers, doigtiers et cercueils à canopes en matériaux précieux des XXIe et XXIIe dynasties. Bien qu’en déclin, l’empire égyptien continue de rayonner. Le sarcophage en argent à tête de faucon de Chéchonq II, roi de la XXIIe dynastie, est un chef-d’oeuvre du genre : il indique que, depuis les plus hautes époques, tout roi est un Horus sur terre. Son cartonnage rehaussé de feuilles d’or, très fragile, est aussi présenté pour la première fois en France. Il n’a pas son équivalent au monde. De même, le couvercle de sarcophage en granit rose de Mérenptah, successeur de Ramsès II, fut réutilisé par Psousennès Ier de la XXIe dynastie. Ce dernier a donc réutilisé un sarcophage de premier plan et de grand prestige.


Le sarcophage de Ramsès II, un prêt exceptionnel.

Afin de mieux appréhender ce qu’était une tombe royale pour un Egyptien du Nouvel Empire, une reconstitution photographique grandeur nature d’une salle du tombeau de Séthi Ier, père de Ramsès II, éblouira sans doute les visiteurs. Cette tombe est l’une des plus belles de la Vallée des rois.

Enfin, la fin du parcours marque l’apothéose de Ramsès II, le roi devenu légende, nommé par tous et toujours vivant, à travers la magnifique statue colossale en calcaire provenant du Musée de Charm Al-Cheikh, jamais présentée en France. Cette dernière image ne manquera pas de permettre à Ramsès de poursuivre sa route sur les chemins de l’éternité, présent à jamais dans la mémoire collective.

10 vérités sur Ramsès II

  • Son règne est le plus long de l’histoire de l’Egypte. Il a gouverné pendant 67 ans, de 1280 à 1213 av. J.-C.
  • Il est un grand bâtisseur, laissant à sa mort un nombre inégalé de temples et de statues. On lui doit la construction du pylône du temple de Louqsor, la Grande Salle des temples de Karnak, le temple de Séthi Ier à Abydos et les temples d’Abou-Simbel en l’honneur de sa femme, la reine Néfertari, et pour sa propre gloire divine.
  • Ramsès II était un grand guerrier. Il a combattu face aux Hittites en Syrie lors de la célèbre bataille de Qadech. Quinze ans après, il rechercha la paix et signa avec les Hittites le premier traité de paix connu dans le monde, qui fut gravé sur les parois des temples de Karnak.
  • Il eut plusieurs épouses dont deux royales : Néfertari et Isetnofret.
  • On lui compte près de 50 fils et 60 filles dont certains eurent une importance cruciale lors de son règne.
  • Il est mort nonagénaire. C’est son 13e fils, Mérenptah, qui monta sur le trône après lui alors qu’il était âgé d’au moins 50 ans.
  • Son long règne lui permit de se faire représenter un nombre incalculable de fois sur tout type de support. Il n’hésita pas à usurper certaines images de rois antérieurs, comme celles d’Aménophis III.
  • Sa tombe, pillée dans l’antiquité, fut vidée par les prêtres d’Amon au début du Ier millénaire av. J.-C. et sa momie fut déposée dans une cachette de la montagne thébaine, auprès d’autres rois.
  • Ramsès a été étroitement associé à Amon-Rê, le dieu soleil, et vénéré comme une divinité par ses sujets.
  • Il est le seul monarque décédé à avoir été reçu avec les honneurs d’un roi vivant. Lors de l’arrivée de sa momie en France en 1976 afin d’être soignée d’un champignon, Ramsès II a été accueilli avec les honneurs dévolus à un chef d’Etat en exercice. La légende raconte même que sa momie aurait été gratifiée d’un passeport diplomatique. Quoi qu’il en soit, aucun autre souverain antique n’a été reçu avec un tel faste.
Mots clés:
Lien court:

 

En Kiosque
Abonnez-vous
Journal papier / édition numérique