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NEPAD : Les grandes priorités de l’Egypte

Aliaa Al-Korachi , Jeudi, 02 mars 2023

L’Egypte a pris cette semaine la tête de l’Agence de développement de l’Union africaine (NEPAD). Le Caire souhaite accélérer l’intégration et le développement socioéconomique du continent. Décryptage.

NEPAD : Les grandes priorités de l’Egypte

Accélérer l’intégration continentale. Telle est la mission-clé de l’Egypte, choisie cette semaine à l’unanimité pour présider le Comité d’orientation des chefs d’Etat et de gouvernement du NEPAD (HSGOC) au cours de la période 2023-2025. « Il ne fait aucun doute que la crise économique mondiale sape les efforts de développement de notre continent africain. Nous devons réfléchir à de nouvelles ressources de financement non traditionnelles et multiplier les efforts avec les partenaires du continent, pour résoudre la crise de la dette et remettre sur les rails la reprise économique en Afrique ». C’est avec ces mots que le président Abdel-Fattah Al- Sissi a commencé son discours lors de la réunion virtuelle du 40e Sommet du Comité HSGOC, avant de passer en revue les priorités de la présidence égyptienne du NEPAD. Adopté officiellement en 2001, le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) est le bras de développement de l’Union Africaine (UA). Il a été élaboré par cinq pays : l’Egypte, l’Algérie, le Nigeria, l’Afrique du Sud et le Sénégal. Il s’agit d’une vision africaine globale du développement économique et social du continent à travers deux types de partenariat entre les secteurs public et privé d’une part, et entre l’économie africaine et les économies du reste du monde d’autre part. Quant au Comité d’orientation des chefs d’Etat et de gouvernement du NEPAD (HSGOC), qui comprend 33 pays, il constitue l’instance politique chargée de suivre la mise en oeuvre des objectifs du NEPAD dans divers domaines (voir page 5). En fait, la présidence égyptienne du NEPAD s’inscrit dans la continuité des efforts déployés par l’Egypte pour le développement durable du continent. Quelles sont donc les priorités de la présidence égyptienne ? Au cours de son discours, le président Sissi a fixé un certain nombre de priorités à mettre en place au cours des deux prochaines années.

Développer les infrastructures

Priorité numéro 1 : « Intensifier les efforts pour mobiliser des ressources financières dans les domaines prioritaires pour le continent, notamment le développement des infrastructures », a souligné le président, avant de préciser l’importance de « mobiliser des financements pour exécuter la liste des grands projets du NEPAD dans le domaine des infrastructures, qui comprend 69 projets, durant la période 2021-2030 ». En fait, le déficit en matière d’infrastructures en Afrique est énorme, ce qui empêche le continent, malgré ses richesses, de récolter les bénéfices des investissements.

Aujourd’hui, 600 millions d’Africains n’ont pas encore accès à l’électricité. 40 % des Africains sont connectés à des réseaux électriques, contre une moyenne mondiale de 62,5 %. Selon le dernier rapport publié par le Consortium pour les infrastructures en Afrique (ICA), « les engagements en faveur du financement des infrastructures en Afrique ont totalisé 81 milliards de dollars en 2020, soit 4 milliards de dollars de moins que les 85 milliards de dollars enregistrés en 2019. Cela est dû, en grande partie, à limpact de la pandémie de Covid-19 et à un recul des financements chinois », souligne le rapport. C’est dans ce contexte que l’Egypte tient à participer aux nombreuses initiatives africaines préparées par le NEPAD et visant à développer les infrastructures dans des domaines comme le transport, l’énergie, la technologie de l’information et les télécommunications (TIC). Parmi les projets initiés par l’Egypte et exécutés en coopération avec le NEPAD figure la ligne de navigation reliant le lac Victoria à la Méditerranée et l’autoroute Le Caire-Cape Town. Cette dernière est l’une des principales voies de transport à travers l’Afrique visant à renforcer l’intégration des pays du continent et réduire la durée de transport.

L’Egypte a rejoint également l’initiative du NEPAD « Energie durable pour tous (SE4ALL) », qui vise à atteindre « les objectifs de transition énergétique dici 2030, y compris laccès universel à une énergie propre et à un coût abordable ». C’est dans ce domaine des infrastructures que l’Egypte tente également de partager son expertise. « Le barrage Julius Nyerere en Tanzanie, mis en oeuvre par des mains égyptiennes et tanzaniennes, est un modèle de coopération à suivre entre les pays africains dans le domaine du développement des infrastructures », a déclaré le président, avant d’ajouter : « Nous sommes tout à fait prêts à partager les expériences des entreprises égyptiennes avec dautres pays africains frères ».

L’industrialisation de l’Afrique, changer le statu quo

Repenser les modèles d’industrialisation en Afrique est une autre priorité de la présidence égyptienne du NEPAD pour soutenir la croissance de l’économie africaine qui reste peu industrialisée malgré ses nombreux atouts : ressources naturelles abondantes, main-d’oeuvre jeune et marchés intérieurs en pleine croissance. Selon la Banque Africaine de Développement (BAD), « la part de lAfrique dans la production manufacturière mondiale a baissé au cours des dernières décennies, tombant en deçà de 2 %. En plus, les économies africaines sont très vulnérables aux fluctuations de la demande mondiale dépendant des fournisseurs et des acheteurs externes ». « Renforcer le développement des chaînes de valeur industrielles régionales est devenu une nécessité absolue pour faire face aux répercussions de la crise en Ukraine », a souligné le président dans son discours, avant de souligner la nécessité de s’appuyer sur les résultats obtenus lors du sommet africain extraordinaire sur l’industrialisation, qui s’est tenu à Niamey en novembre 2022. « Formuler un nouveau cadre de politique continentale sur lindustrialisation basé sur lexploitation des ressources naturelles riches et variées de lAfrique » figurait parmi les recommandations de ce sommet.

ZLECAf, mettre fin à la fragmentation économique du continent

Une industrialisation plus active devrait passer notamment par une opérationnalisation effective de la zone de libre-échange continentale (ZLECAf). Entré en vigueur en 2019, l’accord sur la ZLECAf suscite beaucoup d’espoir pour réaliser le rêve d’une « Afrique sans frontières ». Toutefois, il est en retard à cause des négociations difficiles sur les règles d’origine qui permettent de déterminer le pays d’origine d’un produit. En effet, la part du continent africain dans le commerce mondial ne dépasse pas les 4 %. Le commerce intra-africain ne représente que 17 % de l’ensemble des activités commerciales du continent. « Il est important aujourdhui daccélérer la réalisation des objectifs de laccord de libre-échange continental et dachever les négociations sur les protocoles additionnels de la ZLECAf, afin de maximiser les avantages que laccord peut apporter en termes dopportunités dintégration dans l’économie mondiale et de création demplois, en particulier pour les jeunes et les femmes », a souligné le président. L’Egypte a lancé, ces dernières années, plusieurs initiatives pour propulser le commerce intra-africain, comme Gosoor (ponts) qui vise à faire connaître aux investisseurs égyptiens les opportunités d’exportation vers les marchés africains. En janvier 2022, l’Egypte a lancé un plan stratégique en trois phases qui vise à augmenter le volume des exportations égyptiennes vers les pays africains de 10 milliards de dollars d’ici 2025.

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