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PERSPECTIVES 2023 : La stabilité énergétique passe par la région

Dr Mohamed Shady*, Mercredi, 21 décembre 2022

Alors que la crise énergétique bat son plein, notamment en Europe, deux régions, la Méditerranée orientale et le Moyen-Orient, offrent des alternatives et se présentent comme potentiels facteurs stabilisateurs dans l’année à venir. Explications.

La stabilité énergétique passe par la région

La nouvelle année arrive alors que de nombreuses crises pèsent lourd sur l’économie mondiale et provoquent des perturbations même dans des régions qui, pendant longtemps, étaient à l’abri de l’instabilité. Vraisemblablement, le moteur principal de ces crises est l’énergie, de l’est du continent européen jusqu’au sud-est de l’Asie, en passant par le Moyen-Orient et les deux Amériques.

C’est à partir du vieux continent, où la guerre russoukrainienne fait toujours rage, qu’est partie l’étincelle, pour enliser le monde dans des crises qui le rongent toujours. Depuis le déclenchement de la guerre, l’Occident a décidé de réduire sa dépendance au gaz russe. Par conséquent, on s’est trouvé en quête de nouvelles sources gazières pour compenser la pénurie dans l’offre. Cependant, cette quête n’a pas encore été couronnée de succès. Les Etats occidentaux se sont précipités pour acheter à n’importe quel prix les quantités dont ils ont besoin pour s’approvisionner avant l’hiver. Ce qui justifie l’envolée record des cours de l’énergie, notamment le gaz dont le prix a dépassé les 250 euros/MWh en juillet dernier contre 50 euros début 2021.

Ainsi, la crise de l’énergie s’est déplacée de l’Europe aux marchés mondiaux accompagnée d’une hausse des prix des produits de base qui dépendent essentiellement de l’énergie dans leur production et leur transfert. C’est pourquoi, par exemple, les prix des aliments qui utilisent le gaz naturel dans leur production et leur transfert des régions de production à celles destinées à la consommation ont énormément augmenté, une situation qui s’est aggravée à cause du blocage des ports ukrainiens par la Russie, ainsi que des problèmes dont souffre le transport international.

Gaz naturel : La Méditerranée orientale comme source sûre

Sous la pression de la hausse des prix, le monde a commencé à se tourner vers l’Opep afin d’augmenter la production pour suivre le rythme de la demande grandissante. Mais ce groupe de pays, qui a été durement frappé par la crise de coronavirus et la chute des prix du pétrole à des niveaux inférieurs à zéro, n’a pas réagi pour tenter de compenser ses pertes au cours des deux dernières années et de se prémunir contre une répétition de l’effondrement qui s’est produit en raison de l’offre excédentaire en 2020.

Dans la mêlée des événements, le monde a commencé à rechercher des solutions alternatives pour résoudre la crise énergétique à court et long termes, afin de réduire ses impacts ressentis à l’heure actuelle et éviter leur répétition dans l’avenir. Dans ce contexte émerge l’importance des deux régions de l’Est de la Méditerranée et du Moyen-Orient.

Le bassin de la Méditerranée orientale, c’est la région la plus proche de l’Europe, qui détient des réserves de gaz facile à extraire rapidement. Le vieux continent s’est alors tourné vers les producteurs régionaux qui sont l’Egypte, Israël et Chypre. L’objectif étant de lever le plafond de la production de gaz naturel et le liquéfier dans les installations égyptiennes à Edkou et à Damiette. Après cette phase, le gaz liquéfié est transporté de l’autre côté de la Méditerranée vers l’Europe. Les deux parties ont alors signé des contrats à long terme pour le transfert du gaz et ont commencé à injecter des investissements pour accélérer le rythme des prospections de gaz, afin d’augmenter l’offre à moyen terme.

Au Moyen-Orient, l’avenir aux énergies renouvelables

Pour une solution sur le long terme, les pays du monde ont commencé à se tourner vers l’énergie renouvelable qui pourrait mettre un terme aux problèmes de la perturbation des cours causée par la fluctuation de l’économie mondiale entre inflation et récession. C’est dans ce contexte que l’importance de la région du Moyen-Orient s’est révélée comme l’un des meilleurs emplacements pour la production d’électricité à partir de l’énergie solaire. Les rayons du soleil existent quasiment tous les moments de l’année et les superficies désertiques sont énormes. En d’autres termes, il n’y a pas d’obstacles qui empêchent le soleil d’atteindre les centrales électriques.

L’énergie renouvelable offre également des solutions pour résoudre le dilemme du changement climatique résultant des émissions de CO2 provenant des combustibles fossiles.

 Ces derniers engendrent nombre d’effets néfastes, parmi lesquels la hausse du niveau de la mer, une activation des virus et des bactéries, outre la réduction de la production des terres agricoles et l’augmentation des quantités d’eau évaporée. Des circonstances qui ont poussé les Etats-Unis à adopter la loi sur l’infrastructure la plus importante de son histoire, basée principalement sur le renforcement de dépendance sur les énergies renouvelables.

Le rôle-clé de l’Egypte

Ainsi, les yeux du monde se tournent vers l’Egypte, vu son emplacement idéal reliant entre le Moyen-Orient et le Nord de l’Afrique. Raison pour laquelle l’Egypte attire actuellement des investissements étrangers, que ce soit pour opérer plus pour l’extraction de gaz et de pétrole et augmenter la capacité de leur transfert, ou bien encore pour investir davantage dans l’énergie renouvelable solaire ou éolienne. Sans oublier les projets d’hydrogène vert qui ont le vent en poupe.

L’Egypte était prête à ce moment, et ce, en préparant le terrain aux mégaprojets qui qualifient son économie au service du monde entier. De prime abord, elle a commencé à récupérer ses capacités de liquéfaction qui s’étaient arrêtées depuis janvier 2011. Ensuite, elle a renouvelé son réseau national d’électricité et a exporté le surplus à travers ses voisins du Golfe à l’Europe. Elle a également haussé ses capacités de production énergétique pour atteindre 58 gigawatts, à l’heure où sa consommation maximale est de 33 gigawatts. En plus, elle a lancé des projets de connexion électrique avec le Soudan, l’Arabie saoudite et Chypre, pour renforcer le réseau d’électricité régional d’une capacité de 3 gigawatts. Il est aujourd’hui possible d’améliorer cette structure plus tard pour mettre un terme aux fluctuations des marchés et faire face aux changements climatiques.

Les efforts égyptiens avec les pressions géopolitiques travaillent actuellement dans le sens de la préparation de la scène internationale à l’accueil de changements structurels dans les économies de production et de consommation énergétiques.

En effet, nous attendons de voir que ces pressions géopolitiques obligent le monde à emprunter les nouveaux modèles de production et de consommation d’énergie renouvelable, que ce soit par le biais de la recherche, d’une production ou consommation plus efficiente.

A travers le développement des voitures électriques ou des batteries plus aptes au stockage par exemple. L’Egypte fait de son mieux pour relier le présent au futur. Elle possède des capacités d’approvisionner les marchés en l’énergie d’aujourd’hui la moins polluante, à savoir le gaz. Et en même temps, elle détient les clés de l’énergie à venir grâce à son potentiel solaire et éolien qui la qualifie à traiter les crises de changements climatiques qui ont frappé fort l’année dernière et qui persisteraient l’année prochaine éventuellement. C’est peut-être grâce à tous ces ingrédients que le monde lui a accordé le mérite d’accueillir la Conférence des Nations-Unies sur les changements climatiques (COP27).

Au final, il n’est pas prévisible que le monde surmonte sa dépression actuelle en 2023. Mais les efforts en cours sur la scène internationale, qui sont coordonnés au niveau régional à travers les pays du Moyen-Orient et du bassin méditerranéen à court terme et les pays africains à long terme, aideront l’économie mondiale à se redresser plus rapidement et l’empêcheront de glisser dans des crises similaires à l’avenir.

*Professeur d’économie politique à la National Training Academy (NTA)

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