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Métro du Caire : Rouge, orange et vert!

Hanaa Al-Mekkawi , Mercredi, 26 octobre 2022

Quatre stations ont été récemment inaugurées pour achever la dernière étape de la troisième ligne du métro du Caire. Un mode de vie qui change pour les Cairotes.

Métro du Caire : Rouge, orange et vert!
L’idée de construire un métro au Caire a été évoquée pour la première fois en 1930 par l’ingénieur égyptien Sayed Abdel-Wahab.

Depuis que Doaa a décidé de prendre le métro pour se rendre au travail, elle porte toujours un jean et une paire de baskets. Il lui faut marcher entre 7 à 10 minutes de son lieu de travail, au centre-ville, avant d’arriver à la bouche de métro. Puis, elle descend à la station Al-Estad, à la rue Salah Salem, et prend un taxi pour se rendre chez elle à Madinet Nasr. Le coût du transport est de 42 livres pour un aller simple: 7 livres égyptiennes pour le ticket de métro et 35 pour le taxi, soit 84 aller-retour. Avant, elle payait presque le double car elle prenait uniquement des taxis et dépensait quelque 140 livres par jour. «  C’est un gain de temps et d’argent considérable et je ne me sens plus stressée. En plus, cela me permet de faire une petite marche à pied tous les jours », dit Doaa, 48 ans, banquière. Cette dernière a décidé récemment de prendre le métro, après l’inauguration de la troisième ligne qui dessert de nouveaux endroits, car les bouches de métro sont très proches.

Hoda, 50 ans, vient de vendre sa voiture et pense qu’elle n’a plus besoin d’en acheter une autre, car elle n’aimait pas conduire et, par chance, sa maison est située à proximité d’une bouche de métro. « A présent, je ne vais plus rater les sorties et les visites programmées à Héliopolis par exemple, car pour moi, ce quartier se trouve à l’autre bout du monde. Les problèmes de stationnement et d’embouteillages me rendaient folle et me dissuadaient de m’éloigner de chez moi », dit Hoda. Au départ, cette dernière, comme beaucoup d’habitants de Zamalek, n’était pas d’accord pour la présence du métro dans le quartier, craignant qu’il présente un danger pour les immeubles tout en formulant des préoccupations d’un tout autre ordre. Actuellement, il paraît que les habitants du vieux quartier voient les choses autrement.


Chaque station est distinguée par une décoration qui représente sa singularité.

48 km qui relient l’est à l’ouest du Caire

Partout, on entend des conversations tournant autour du métro depuis qu’on a inauguré 4 nouvelles stations, la dernière phase de la troisième ligne. 48 km reliant l’ouest à l’est du Caire (d’Imbaba à l’aéroport du Caire), passant sous terre pour desservir l’aéroport. Maspero, Nasser, Safaa Hégazi et Kit Kat desservent les nouvelles régions et les relient au reste du Caire, surtout que Nasser est une station importante qui joue un rôle essentiel avec la première ligne. Selon les déclarations du ministère du Transport, cette phase va réduire la circulation de 600 à 900 voitures et éviter les 36 kilos de gaz d’échappement des moteurs à essence qui se volatilisent dans l’air chaque jour, au total 13000 tonnes par an.

L’idée de construire un métro a été évoquée pour la première fois au Caire en 1930 par l’ingénieur égyptien Sayed Abdel-Wahab, mais elle avorte rapidement. Dans les années 1950, des experts français proposent la construction d’un métro avec seulement deux lignes. Plus tard, en 1969, le gouvernement approuve une étude, et ce, par manque d’alternatives en transports en commun au Caire. Finalement, une entreprise française remporte l’appel d’offres en 1970 et la construction de la première ligne de métro commence en 1981. Actuellement, il existe un réseau de trois lignes: ligne 1, la rouge, Hélouan- Al-Marg, 44 km; la ligne 2, l’orange, Choubra Al-Kheima- Al-Mounib, 22 km, et ligne 3, la verte, aéroport du Caire passant par Rod Al-Farag et l’Université du Caire, 48 km.

Un métro pour tous

Dans les quartiers où passe le métro, le changement de mode de vie est devenu un comportement général. Pratique, rapide, sûr, il attire de plus en plus de citoyens de tous bords. En passant par les nouvelles stations, on peut observer le changement au niveau des services et des équipements à comparer avec les lignes plus anciennes. A la station de Safaa Hégazi, on remarque que la majorité des usagers sont les étudiants de la faculté des beaux-arts et de l’Institut de musique, situés à Zamalek.

« Je ne comprends pas pourquoi on ne donne pas les noms des quartiers ou des rues à ces stations? Pourquoi donner le nom de Safaa Hégazi pour se rendre à Zamalek, ou Nasser pour la station du centre-ville », se demande Camélia, étudiante en deuxième année à la faculté des beaux-arts. Cette station se distingue notamment par les oeuvres d’art qui couvrent les murs et sont ornés d’éléments qui représentent la musique et l’art plastique.

En fait, chaque autre station, par sa décoration, est différente des autres, comme l’explique l’artiste Mohamad Mekkawi, ex-doyen de la faculté des beaux-arts, qui a été chargé du design des stations de la troisième ligne. « Pour compléter ce travail, j’ai fait beaucoup de recherches et étudié pour trouver les symboles qui expriment chaque station. Par ailleurs, j’ai effectué plusieurs visites dans les quartiers pour trouver la meilleure manière de les représenter. La station de métro est un lieu où se pressent des milliers de personnes, tous âges et classes confondus, elle doit donc représenter une idée générale qui s’expose de manière simplifiée », explique-t-il.


Plus de lignes qui couvrent différents quartiers du Caire poussent les Cairotes à opter davantage pour le métro.

Un design propre à chaque station

Lors du design des stations, il a tenu à différencier chaque station en présentant une idée avec des couleurs spécifiques pour que l’usager puisse la distinguer en la regardant et sans même lire le nom de la station. Par exemple, le design de la station Maspero est représenté par des symboles de base tels que le bâtiment Maspero, mais son héros c’est le Nil, la célébration du soleil et la parade des dames égyptiennes jouant au tambourin pour rappeler la civilisation de l’Egypte Ancienne. Quant à la station Kit Kat, il a choisi de la décorer avec des maisons flottantes et des barques à voile navigant sur le Nil pour redonner l’image de l’Egypte au XXe siècle. A noter que les prix des tickets sur cette ligne varient entre 5 et 10 livres suivant le nombre des stations. Quant aux étudiants, ils jouissent d’un abonnement à prix réduit.

Ce qui est commode pour les passagers, c’est qu’avec l’inauguration de cette dernière phase, ils peuvent réserver leurs tickets, connaître les stations et suivre le trajet à travers plusieurs applications qui ont été activées. « Etant fidèle passagère du métro depuis plus de 20 ans, puisque j’utilise la première ligne de Maadi, je suis impressionnée par le développement que témoigne la nouvelle ligne. Cependant, je ne peux cacher ma crainte de voir un jour des marchands ambulants monter dans les wagons pour écouler leurs marchandises. C’est le cauchemar des deux autres lignes », s’exprime Dina, professeure. Des craintes qui peuvent ne pas avoir lieu car la direction générale de la sécurité interne du métro a mis en place un plan de travail qui interdit l’accès aux marchands ambulants tout en veillant à l’état de sécurité en général afin de garantir aux usagers le maximum de confort. Une ligne téléphonique, le 16048, est consacrée en cas de fraude. « Excellent, mais vu mon expérience, il faudra attendre quelque temps pour savoir qui aura le dernier mot », déclare Dina.


Plus de lignes qui couvrent différents quartiers du Caire poussent les Cairotes à opter davantage pour le métro.

L’inauguration des nouvelles stations qui relient les quatre coins du Caire incite les gens à utiliser les moyens de transport publics. « Puisque j’ai un moyen de transport qui arrive à l’heure et dans lequel je peux trouver une place confortable, pourquoi ne pas l’essayer ? », c’est ce que pense Doaa qui a réussi à convaincre beaucoup de ses collègues de prendre le métro comme elle.

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