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Les cinq dossiers brûlants du Sommet arabe

Mardi, 26 mars 2019

Le 30e Sommet arabe ordinaire se tient du 26 au 31 mars en Tunisie avec, en toile de fond, des dossiers aussi épineux que la Syrie, la Libye ou le Yémen. Sans oublier la cause palestinienne et la lutte contre le terrorisme. Tour d’horizon.

Les cinq dossiers brûlants du Sommet arabe
(Photo : Reuters)

Par Mona Soliman*

Les travaux Ldu 30e Sommet arabe ont commencé le 26 mars et se prolongeront jusqu’au 31 mars 2019 sous la présidence du président tunisien, Béji Caïd Essebsi. C’est la première fois que le sommet se tient en Tunisie depuis 2011. 6000 personnes sont attendues à ce sommet pour lequel le gouvernement tunisien a déployé de grands efforts afin de favoriser la promotion du tourisme et de l’économie (voir page 3). De plus, la tenue du Sommet arabe en Tunisie permettra de jeter la lumière sur la scène politique des pays du Maghreb arabe (Tunisie, Algérie, Maroc, Mauritanie), notamment après la série de mutations politiques qu’ont connues ces pays.

La tenue de ce sommet survient à un moment crucial car de nombreux pays arabes sont dans une phase de transition. D’aucuns espèrent que le sommet aboutira à des résultats palpables afin de résoudre certains dossiers épineux comme les dossiers syrien, yéménite, palestinien et libyen, et de lutter contre les dangers permanents comme le terrorisme et l’immigration clandestine. De plus, la période actuelle témoigne d’ingérences répétitives dans les affaires arabes internes comme l’ingérence iranienne dans les affaires iraqiennes, syriennes, libanaises et yéménites, l’occupation turque du nord de la Syrie, ou les violations israéliennes continues à Jérusalem. Par ailleurs, certains prévoient un changement de la structure de l’ordre mondial et un recul du rôle américain dans certaines régions en contrepartie d’une montée des rôles russe et chinois. Sans oublier les divisions européennes actuelles et leur impact sur les dossiers du Moyen-Orient. Il est donc indispensable de parvenir à une position arabe commune pour faire face aux ingérences étrangères dans les affaires arabes et pour diversifier les relations entre le monde arabe et la communauté internationale afin de profiter des changements de l’ordre mondial.

Questions urgentes

Cinq dossiers urgents doivent être étudiés par le sommet. Le dossier syrien est sans contexte le plus important. Le sommet doit étudier la possibilité d’un retour de Damas à la Ligue arabe, alors que son siège est resté vacant pendant plus de 7 ans. Cependant, il n’existe pas encore d’accord arabe autour de cette question. En effet, certains pays arabes approuvent le retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe alors que d’autres lient ce retour à l’application, par Damas, des résolutions du Conseil de sécurité, notamment la résolution 2254. Le sommet évoquera également les possibilités d’un règlement politique en Syrie, notamment après la défaite de Daech, ainsi que le rôle arabe dans le règlement final de la crise syrienne et la participation arabe à la reconstruction de la Syrie. De plus, le sommet devrait condamner toute présence militaire étrangère sur le territoire syrien, en particulier l’occupation turque du nord de la Syrie et l’occupation israélienne des hauteurs du Golan, surtout après les dernières déclarations de Trump reconnaissant la souveraineté israélienne sur ces terres occupées depuis 1967. Ce qui représente une infraction claire à la loi internationale. Un fait qui a poussé des pays arabes, comme l’Egypte, et des pays européens, comme la France, à dénoncer ces déclarations.

Le deuxième dossier urgent est le dossier yéménite. L’application des accords de Stockholm sur un cessez-le-feu à Hodeïda trébuche toujours. Le dilemme yéménite est dû au soutien persistant de l’Iran aux rebelles houthis depuis le coup d’Etat contre le président yéménite légitime Abd-Rabbo Mansour Hadi en 2014. Il y a aussi la détérioration des conditions humanitaires dans tous les gouvernorats du Yémen. Un fait qui implique des décisions tranchantes de la part du Sommet arabe pour soutenir la voie onusienne et régler la crise yéménite.

Le dossier libyen n’est pas moins important. L’émissaire spécial de l’Onu en Libye, Ghassan Salamé, a annoncé le lancement du dialogue national libyen en avril 2019 avec l’objectif de parvenir à un règlement politique et d’unifier les institutions militaires du pays. Il incombe à la Ligue arabe de soutenir ce dialogue et d’approuver les résultats des réunions tenues par les pays voisins de la Libye (Egypte, Tunisie, Algérie) et qui sont organisées de manière périodique.

Enfin, le dossier palestinien connaît des évolutions permanentes. Il y a, d’une part, les violations israéliennes continues en Cisjordanie et dans les lieux saints musulmans à Jérusalem, et de l’autre, le discours ininterrompu de Washington sur « le deal du siècle » censé régler la cause palestinienne. Un deal encore enveloppé de mystère et que l’Autorité palestinienne a déjà refusé. Sans oublier les évolutions dans la bande de Gaza et les campagnes de perquisition et d’arrestation lancées par le Hamas contre les manifestants de la campagne « Nous voulons vivre », lancée en protestation contre les conditions de vie de plus en plus difficiles dans la bande de Gaza. Enfin, il y a le trébuchement des efforts de réconciliation interpalestinienne.

Par ailleurs, ce 30e Sommet arabe devrait évoquer le dossier de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme et adopter une position claire contre les pays arabes et les puissances régionales qui alimentent les idées extrémistes et qui soutiennent les éléments terroristes en proposant une approche arabe globale de la lutte contre le terrorisme aux niveaux politique, sécuritaire et intellectuel.

Le rôle égyptien

Le rôle égyptien sera effectif durant la période à venir à deux niveaux. Le premier est l’application des décisions du 30e Sommet arabe et des recommandations égyptiennes relatives à la préservation de l’Etat et de ses institutions.

Le second niveau est la consolidation de la coopération arabo-africano-européenne. En effet, Le Caire constitue un pont pour la coopération arabo-africaine et la coopération arabo-européenne. Ces dernières années ont connu un essor important dans les relations égypto-européennes et méditerranéennes. L’Egypte préside également l’Union africaine au cours de 2019, et le président égyptien Abdel-Fattah Al-Sissi a pris part à la Conférence de Munich sur les politiques sécuritaires 2019 et a été invité à participer aux réunions du Sommet du G8 en France en août 2019 et aux réunions du Sommet du G20 au Japon en automne prochain. De plus, l’Egypte a réussi à organiser le premier Sommet arabo-européen à Charm Al-Cheikh. L’Egypte portera donc le flambeau du rétablissement de la sécurité dans les pays arabes et du développement de l’action arabe conjointe, sans oublier la consolidation des relations entre le monde arabe et la communauté internationale.

Enfin, l’Egypte jouera un rôle important dans le développement de l’action arabe commune après qu’elle eut retrouvé son poids régional et s’est engagée dans les dossiers de la réconciliation palestinienne et de l’unification des institutions militaires libyennes et qu’elle eut rejoint « le small group » de règlement de la crise syrienne l

*Chercheuse dans les affaires régionales à la faculté des sciences politiques de l'Université du Caire

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