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Orascom Construction Industries se replie aux Pays-Bas

Dahlia Réda, Mardi, 29 janvier 2013

La société de construction et d’engrais égyptienne a décidé de transférer tous ses actifs égyptiens à la Bourse d’Amsterdam. Si la transaction s’avère complexe, les conséquences sur la Bourse du Caire sont, elles, faciles à prévoir.

OCI

L’entreprise égyptienne Orascom Construction Industries (OCI) a commencé sa mue en société hollandaise. Samedi 25 janvier, elle a transféré 75 % des actifs financiers qu’elle détenait à la Bourse de Londres dans la capitale hollandaise, la Bourse NYSE EuroNext d’Amsterdam.

Pour effectuer ce transfert, Orascom Construction Industries a créé un holding hollandais (OCI N.V.) aux Pays-Bas sur lequel elle a basculé les 75 % des actifs détenus jusqu’alors à la Bourse de Londres. Ces 75 % sont détenus par l’homme d’affaires Nassef Sawirès (à 54 %), ainsi que par la compagnie émiratie d’investissement financier, Abraj Capital.

Les 25 % d’actifs restants sont détenus par des actionnaires à la Bourse du Caire. Face à l’instabilité du marché égyptien, OCI a tout simplement décidé de rapatrier ces 25 % en Hollande, comme elle vient de le faire pour ceux de Londres. Par ce biais, l’entreprise s’ouvre à de vastes opportunités de croissance à l’internationale, mais prend le risque de plomber la Bourse égyptienne, dont l’indice, déjà mal en point, souffrira certainement du départ de l’un des géants de l’industrie.

La nébuleuse Orascom

L’entreprise Orascom Construction Industries est spécialisée dans le secteur de la construction et des engrais. Elle est considérée comme l’un des plus grands investisseurs de son secteur à travers l’Europe, le Moyen-Orient, l’Afrique et le nord de l’Amérique. Elle possède 6 immenses usines d’engrais, 2 aux Etats-Unis, une en Algérie, une aux Pays-Bas et 2 en Egypte. Son chiffre d’affaires est renforcé par 4 sociétés entrepreneuriales, dont les plus connues sont Besix en Belgique et Contac aux Etats-Unis. Enfin, elle détient 5 compagnies de production de matériel de construction sur les marchés européen et américain.

En 2007, OCI décide de s’éloigner du marché égyptien. Elle vend ses usines de ciment à l’entreprise française Lafarge. Aujourd’hui, OCI va plus loin. Elle souhaite troquer sa nationalité égyptienne contre une nationalité européenne, plus précisément hollandaise. Ainsi, elle entend transférer les 25 % d’actifs enregistrés aujourd’hui en Egypte auprès de leurs grands frères à la Bourse d’Amsterdam.

Mais, contrairement aux actifs de Londres, ceux-ci sont détenus en majorité par de petits actionnaires. OCI leur laisse deux choix : le premier est de transformer leurs actions en GDR (Global Depository Receipts), qui seront dès lors cotés sur NYSE EuroNext. Le second choix consiste à vendre chaque action à 280 L.E.

Bill Gates s’invite dans le dossier

Dans le cas du second choix, les actions trouveront rapidement preneurs. En effet, les acheteurs se bousculent pour acheter les actions égyptiennes d’OCI. L’un des principaux intéressés n’est autre que Bill Gates. « La compagnie Kaskade détenue par l’homme d’affaires américain Bill Gates, la compagnie South Eastern pour la gestion des fonds et Diverse Select Advisors sont prêtes à acheter », explique Mona Al-Chazli, analyste financière auprès de la banque d’investissement Pharos.

Si les 25 % de parts égyptiennes sont vendues, « la valeur totale des transactions s’élèvera à 2 milliards de dollars, précise Mona Al-Chazli. Ainsi, s’ils réussissent à inciter les petits actionnaires à vendre, ces entreprises américaines deviendront actionnaires du groupe, désormais hollandais, OCI N.V. ».

Pour le PDG du groupe financier Naeem, la valeur de 280 L.E., proposée par le consortium de Gates, « est inférieure à celle proposée par les banques d’investissement EFG-Hermes », qui en propose de 280 à 320 L.E. Surtout, la valeur ne colle pas au prix de l’action actuellement échangée à la Bourse d’Amsterdam, qui atteint actuellement les 40 dollars. Ce prix sera rediscuté lors de l’assemblée générale d’OCI, prévue pour la mi-février. Il est possible que le prix augmente pour inciter les petits actionnaires tentés à vendre.

Pour le moment, une enquête réalisée par la banque d’investissement Prime Securities annonce que « 16 % des 25 % des actifs seront vendus par leurs actionnaires. Les 9 % restants ont déclaré leur refus de vendre, car ils craignent un fort impact sur l’indice de la Bourse égyptienne », révèle Ahmad Hindaoui, analyste d’OCI auprès de la banque d’investissement Prime Securities.

L’autorité de régulation tire la sonnette d’alarme

Nassef Sawirès, PDG d’OCI, a souligné que cette transaction assurerait de nombreux bénéfices à la société, puisqu’elle aboutit au partenariat avec l’un des hommes d’affaires les plus importants au monde. Toutefois, le bonheur des uns fait le malheur des autres. Si la grande majorité des petits actionnaires acceptent l’offre de Gates, OCI, qui représente à elle seule le tiers de l’indice EGX30, ne pourra plus être cotée en Bourse au Caire.

En effet, la loi stipule qu’une entreprise étrangère doit avoir une part minimum de 5 % détenue par des Egyptiens pour qu’elle soit autorisée à y être cotée. Or, à l’heure actuelle, « les chiffres montrent qu’une grande majorité d’investisseurs veulent échanger les actions égyptiennes en GDR, ces derniers présentant beaucoup de potentiels de gain », remarque Mona Al-Chazli, analyste financière de Pharos. La situation est donc extrêmement délicate. Si au moins 20 % des actifs sont vendus au consortium de Bill Gates ou échangés en GDR à la Bourse d’Amsterdam, l’entreprise OCI quittera une fois pour toute la Bourse égyptienne. Et dans ce scénario très probable où la société OCI arriverait à ses fins, c’est l’Egypte qui serait perdante.

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