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Algérie : Aqmi, l’ennemi commun à abattre

Abir Taleb avec agences, Mardi, 22 janvier 2013

La prise d’otages sur le site gazier d’In Amenas ouvre la voie à une nouvelle ère dans la lutte contre le terrorisme dans la région. Soutenu par les Occidentaux, Alger devrait être davantage impliqué.

Algerie
La sanglante prise d'otages a suscité l'inquiétude du retour du terrorisme en Algérie. (Photo:AP)

La spectaculaire prise d’otages sur le site gazier d’In Amenas, ainsi que l’assaut des forces spéciales algériennes qui a suivi ont mis l’Algérie face à une situation délicate tant sur le plan intérieur qu’extérieur.

Selon le dernier bilan officiel annoncé lors d’une conférence de presse du premier ministre algérien Abdelmalek Sellal, « trente-sept étrangers de huit nationalités différentes » ont été tués lors de cet épisode sanglant qui a duré quatre jours. En outre, un Algérien a été tué, portant le total à 38 victimes.

Sur le plan intérieur, le spectre d’un retour du terrorisme, qui a frappé de plein fouet le pays lors de la décennie noire (200 000 morts), plane une nouvelle fois. Certes, la presse algérienne a salué la « fermeté et le courage » des militaires algériens face à l’attaque islamiste contre un important complexe gazier du Sahara algérien, rejetant toute critique de l’étranger sur le déroulement de l’opération. Mais dans le même temps, elle a critiqué les autorités pour leur communication limitée, sinon contradictoire.

Qui plus est, pour nombre d’Algériens, les récents événements et les risques que cela comporte pour l’avenir sont le résultat de l’alignement d’Alger sur Paris. De nombreuses voix s’élèvent aujourd’hui en Algérie pour critiquer le président Abdelaziz Bouteflika qui aurait donné son aval à l’opération française au Mali lors de la visite de François Hollande à Alger en novembre dernier.

Sur le plan extérieur, le dénouement sanglant de l’assaut des forces algériennes embarrasse Alger face aux capitales occidentales et aux pays dont des ressortissants ont été tués dans cette opération. Même si Alger a affirmé, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, avoir évité « une véritable catastrophe ».

A ce sujet, les Occidentaux eux-mêmes ne savent plus sur quel pied danser. Washington, qui avait pourtant appelé vendredi Alger à « prendre toutes les précautions » pour préserver la vie des otages, a jugé crucial dimanche de « continuer à travailler avec les Algériens » contre les djihadistes d’Aqmi (Al-Qaëda au Maghreb islamique) jugés « seuls responsables » de la mort des otages.

Londres a fait de même, alors que le gouvernement britannique s’était, dans un premier temps, plaint de ne pas avoir été prévenu du premier assaut des forces algériennes. Mais c’est la France qui s’est montrée la plus compréhensive. Sans doute espère-t-elle en retour le soutien d’Alger à son opération au Mali, via par exemple son influence auprès des communautés touaregs.

« Réponses adaptées »

Le président français, François Hollande, a estimé samedi que l’Algérie avait eu les réponses « les plus adaptées », tandis que son entourage soulignait que «Algériens sont souverains chez eux ». Des spécialistes de la question mettaient en avant une « résolution à la russe » (on donne l’assaut systématiquement quel que soit le risque pour les otages) de la crise par les forces algériennes. Les schémas classiques en Occident face à une telle situation privilégiant souvent la négociation avant de donner l’assaut.

Mais d’autres facteurs ont conduit les Occidentaux à nuancer leurs positions, se rapprochant ainsi de l’attitude compréhensive adoptée par la France. Les autorités algériennes ont fini par fournir des explications sur les conditions de l’intervention des forces spéciales, révélant une situation particulièrement complexe, corroborée par les premiers récits des survivants témoignant de la détermination et de la cruauté de leurs geôliers. La prise de conscience que la lutte contre le terrorisme islamiste exige désormais une coopération renforcée a également calmé les pays les plus critiques.

Détermination renforcée

Quoi qu’il en soit, avec cette prise d’otages, Alger dispose désormais d’un prétexte pour justifier son alignement sur Paris. Suite à l’assaut, il peut faire oublier l’humiliation d’avoir été attaqué alors qu’il espérait avoir gardé une certaine bienveillance d’Ansar Dine (mouvement touareg, proche d’Aqmi), à son égard.

Les Occidentaux, et plus particulièrement les Etats-Unis, sont aussi renforcés dans leur détermination à éradiquer le terrorisme. Samedi dernier à Londres, lors d’une conférence de presse consacrée à la prise d’otages et tenue conjointement avec le ministre britannique de la Défense, Philipp Hammond, le secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta, a déclaré : «Algériens sont dans la région, ils comprennent la menace terroriste sûrement mieux que beaucoup d’autres pays. Je pense qu’il est important de continuer à travailler avec eux pour développer une approche régionale ».

« Nous sommes déterminés à vaincre le terrorisme et à être aux côtés du gouvernement algérien. Pour combattre cet ennemi, nous devons faire en sorte d’être le plus efficace possible et cela implique de travailler avec les pays de la région. Chaque pays a sa propre appréciation pour faire face au terrorisme. Ce qui m’importe, c’est qu’il fasse tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher qu’Aqmi n’établisse une base d’opérations dans cette zone », ajoute-t-il. Le résultat de la prise d’otage a eu l’effet inverse qu’attendu par Aqmi : l’Algérie et les Occidentaux sont désormais unis pour combattre avec détermination toute menace terroriste .

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