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HRW : L’Egypte dénonce une organisation « politisée »

Ola Hamdi, Lundi, 15 juin 2015

Un rapport de Human Rights Watch sur la situation des droits de l’homme en Egypte, suscite la colère du Caire. Les analystes, eux, divergent dans leurs appréciations.

« Des mensonges fabriqués de toutes pièces », juge le ministère des Affaires étrangères en commentant un rapport de l’Organisation Human Rights Watch (HRW), sur les conditions des droits de l’homme en Egypte, durant la première année au pouvoir du président Abdel-Fattah Al-Sissi. Ce rapport est « orienté politiquement » et ne respecte pas « les règles les plus élémentaires d’exactitude et d’objectivité », accuse la diplomatie égyptienne. « HRW a l’habitude de répandre des mensonges et des informations erronées et sans fondements », toujours selon le communiqué du ministère. Et d’ajouter : « Cette organisation, qui prétend à tort que la défense et le respect des droits de l’homme sont les objectifs principaux de son action, soutient les opérations et actes terroristes et soutient également ceux qui commettent des actes de violences ».

Publié la semaine dernière, le rapport de HRW dénonce des « violations flagrantes » des droits de l’homme, commises au cours de l’année dernière : intimidation des opposants, arrestations arbitraires, torture, mauvaises conditions aux prisons et délogement forcé des milliers de familles dans le Sinaï, sont les abus recensés par le rapport. Le rapport critique également « l’impunité quasi totale » accordée aux forces de sécurité ainsi qu’une « série de lois sévèrement restrictives pour les droits civiles et politiques ». Fustigeant un abus du pouvoir législatif, le rapport a indiqué qu’au cours de l’année dernière le président Al-Sissi avait « profité de l’absence du parlement pour promulguer une série de lois liberticides ».

Naguib Guébrail, président de l’Union égyptienne des droits de l’homme, trouve bizarre qu’une ONG publie un rapport évaluant le mandat d’un président de la république. « Où sont les rapports sur les présidents d’autres pays du monde ? », se demande-t-il. « Il s’agit d’une organisation malintentionnée dont les rapports, politisés, servent la cause des Frères musulmans », ajoute-t-il, reprenant à son compte les accusations formulées par le ministère des Affaires étrangères.

« Les informations citées par le rapport de HRW sont erronées, elles ne sont pas documentées et ne se basent pas sur des faits concrets », renchérit Dalia Zeyada, directrice du Centre égyptien pour les études de la démocratie. « C’est ridicule de prendre les terroristes condamnés par la justice pour des victimes persécutées. Et ceci au lieu de souligner qu’ils sont impliqués dans plus de 3 000 crimes et actes de violence », lance Zeyada. « Nous, en tant que membres d’une organisation de droits de l’homme, nous visitons régulièrement les prisons pour vérifier la régularité des procédures et les conditions de détention. Le nombre des détenus ne dépasse pas les 7 000 et ils ont été tous arrêtés en vertu d’actes d’accusation du Parquet », affirme-t-elle.

Mais pour Bahaï Eddine Hassan, le tollé autour du rapport de HRW est simplement injustifiable. « Je trouve le rapport équilibré dans la mesure où il n’a pas omis les actes terroristes. Au lieu de le dénoncer, l’Etat ferait mieux de reconnaître que le terrorisme ne justifie par la répression et que la lutte contre le terrorisme doit se faire dans le cadre de la loi », dit-il. Il se demande aussi pourquoi l’Etat s’intéresse uniquement aux rapports internationaux, alors que les faits et les chiffres cités dans le rapport de HRW réfèrent souvent à des rapports d’ONG locales. « Il semble que le régime s’intéresse plus à son image qu’aux droits et libertés », lance-t-il.

Entre les deux positions, Mohamad Zaree, chef de l’Organisation arabe pour la réforme pénale, ne nie pas la véracité de certains abus recensés par le rapport. « On ne peut pas nier que la conjoncture et la tension politique depuis le 30 juin ont donné lieu à des mesures répressives et des atteintes aux droits et aux libertés », reconnaît Zaree. Tout en donnant raison au gouvernement de se défendre, il l’appelle à oeuvrer pour stopper les abus et à faire respecter la loi et les principes de la démocratie.

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