Le retrait de l’Iran du TNP
Abdallah Al-Achaal
Le
conseil de sécurité a décidé un certain nombre de sanctions
contre l’Iran, dont les dernières en date ont été stipulées
par la résolution 1 929 au début de juin dernier. Les plus
importantes sont un blocus maritime ainsi que l’inspection
des navires pour s’assurer qu’ils ne transportent pas de
matières interdites par la résolution comme les matières
entrant dans la fabrication nucléaire. L’inspection portera
aussi, bien que ce ne soit pas cité dans la résolution, sur
tout ce qui peut constituer un soutien militaire ou
alimentaire à la résistance au Liban, en Palestine ou en
Syrie. Le fait qui imposera un isolement supplémentaire à
l’Iran en plus de celui que Washington avait essayé de lui
imposer après la Révolution islamique en 1979. Nous savons
tous que le conflit politique entre l’Iran d’une part et les
Etats-Unis et Israël d’autre part est à l’origine de ces
sanctions et que l’Iran du shah était le principal allié de
Washington dans la région du Golfe et du sud de l’Union
soviétique. De plus, l’Iran, grand pays islamique, était en
parfait accord avec Israël auprès de la Turquie qui a
entretenu des relations diplomatiques avec Israël depuis sa
création. C’est la raison pour laquelle l’Egypte nassérienne
estimait égal le danger que représentaient l’Iran, Israël et
l’occupation occidentale. En effet, l’Iran représentait une
base développée et possédait des ambitions dans le golfe
arabique que Nasser considérait comme la ligne de
démarcation entre le mouvement de libération arabe et la
colonisation et l’impérialisme, même après le retrait de la
Grande-Bretagne du Golfe. Puis les choses ont changé et
l’Iran de la Révolution islamique est devenu contre les
Arabes et Israël. L’Iran n’est pas en accord avec les Arabes,
car l’hégémonie américaine sur le monde arabe pour l’intérêt
d’Israël a permis à Washington et à Tel-Aviv de dresser une
barrière entre les deux.
C’est
dans ce contexte qu’a été promulguée la résolution du
Conseil de sécurité à la suite d’une série de résolutions
prises depuis 2003. Ces décisions visent à isoler l’Iran non
parce qu’il a violé un texte ou un engagement juridique dans
le Traité de Non-Prolifération (TNP) des armes nucléaires,
mais parce qu’il ne s’est pas plié à un ordre du Conseil de
sécurité au motif purement politique. Cet ordre était de
mettre un terme à l’enrichissement de l’uranium pour que
l’Iran ne puisse pas devenir un pays nucléaire. Selon le
Conseil de sécurité, le défi de l’Iran viole la politique
générale qu’il veille à appliquer et qui est la non-prolifération
nucléaire bien qu’Israël soit exclu, car il est au-dessus de
la loi internationale qui n’est appliquée qu’aux faibles.
Il est
clair que l’Iran est puni car il joue sur le même terrain
monopolisé par les Etats-Unis et Israël, dans le monde arabe
qui s’est entièrement soumis aux joueurs israélien et
américain. Il s’agit donc d’un conflit sur les rôles et les
régions de pouvoir en l’absence des Arabes en tant que
joueurs sur ce terrain. L’Iran n’a pas violé de texte
juridique de la Charte des Nations-Unies ou dans le TNP. Au
contraire, ce sont les Etats-Unis en tant que pays nucléaire
qui ont violé leurs engagements au traité, en se donnant le
rôle de gardien pour régir les comportements politiques du
pays qui ne respectent pas leur volonté, utilisant le
couvert juridique et les autorités du Conseil de sécurité.
Les Etats-Unis ont également violé de manière franche leurs
engagements au TNP, en menaçant un pays signataire non-nucléaire
d’utiliser la force nucléaire contre lui. En outre, les
Etats-Unis n’ont pas respecté un autre engagement, celui du
droit des pays non-nucléaires de demander l’aide des pays
nucléaires pour profiter des utilisations pacifiques de
l’énergie nucléaire, alors que c’est là le principal
avantage de l’adhésion au traité. D’autre part, Washington
n’a pas respecté ses engagements à la charte des Nations-Unies,
en utilisant le Conseil de sécurité comme un instrument dans
son conflit politique avec l’Iran, alors qu’il a été
incapable de faire face à Israël, à ses crimes et à son
arsenal nucléaire.
La
résolution 1 929 met un terme au rôle du Conseil de sécurité
en tant que régulateur des relations. Elle ôte aux petits
pays la confiance en son rôle comme gardien de la paix et de
la sécurité internationale après s’être transformée en
spectre de menace. En effet, l’inspection des navires
iraniens en soutien d’Israël et contre la résistance sous
prétexte de chercher des produits interdits par la
résolution, alors qu’ils ne sont pas interdits par la loi
internationale, fait que le conseil a accrédité une
résolution contraire à la loi internationale. Ainsi, si
l’Iran s’oppose aux navires de ces pays dans le Golfe pour
venger l’inspection de ses navires sans aucune référence à
la loi internationale, ceci mènera au chaos, menacera la
valeur de la loi internationale, renforcera le principe de
la force aveugle comme fondement pour défendre les intérêts
nationaux et enfin mènera à l’effondrement de l’ordre
mondial qui résiste encore depuis la seconde guerre mondiale.
Etant
donné que le TNP représente désormais un préjudice pour
l’Iran, que ses avantages sont devenus une menace pour lui,
que les sanctions du Conseil de sécurité sont basées sur une
décision politique du Conseil de sécurité, selon laquelle
l’Iran aurait violé ses engagements au traité, cette
situation soulève donc des problématiques juridiques
délicates. La première est le droit de l’Iran de se retirer
complètement du TNP et la seconde est relative à l’avenir
des résolutions du Conseil de sécurité et de ses sanctions
contre l’Iran et aux alternatives juridiques disponibles à
l’Iran pour consolider sa position juridique.
Premièrement, l’Iran a pleinement le droit de se retirer du
traité, selon l’article 10 qui donne le droit aux pays
signataires de s’y retirer pour des questions relatives à
leurs intérêts nationaux sans être obligés de les mentionner.
Ce texte, cité dans la formule originale du traité de 1970,
est conforme aux principes de la convention des Nations-Unies
pour la loi des traités.
En ce
qui concerne l’avenir des résolutions et des sanctions des
Nations-Unies, leur effet s’estompe dès que leur fondement
ou le cadre juridique dans lequel elles ont été adoptées
disparaissent. Par conséquent, le retrait de l’Iran du
traité ôtera le principe juridique de la campagne du conseil
contre l’Iran. Cependant, il ne mettra pas un terme à cette
campagne du côté politique. Mais cette fois-ci, ce sera sans
fondement juridique, voire artificiel. Ceci ouvrira donc la
porte à l’Iran pour lancer une guerre juridique contre le
Conseil de sécurité face à la Cour internationale de justice
à travers un avis consultatif demandé par l’Assemblée
générale. Je pense que l’Iran est prêt à demander
directement à la Cour internationale son avis sur l’ampleur
de l’aspect juridique de l’explicitation du Conseil de
sécurité du TNP.