Iraq .
Le vice-président américain Joe Biden s’est rendu à Bagdad
cette semaine pour tenter de trouver une issue à la crise
politique, au moment où les Etats-Unis se préparent à
retirer une partie de leurs troupes.
Washington veut débloquer la situation
Afin
de tenter de débloquer la crise politique en Iraq, le vice-président
américain Joe Biden a appelé les dirigeants iraqiens à
mettre de côté leurs intérêts personnels, pour former un
gouvernement et sortir l’Iraq de l’impasse politique. Biden
a lancé cet appel après avoir rencontré séparément les deux
principaux prétendants au poste de premier ministre, le
sortant Nouri Al-Maliki, et l’ex-chef du gouvernement Iyad
Allawi. « L’avancée des négociations dépend de la volonté de
faire passer vos intérêts individuels après le bien commun.
Je plaide auprès de vous pour que vous terminiez ce que vous
avez commencé. A mon humble opinion, pour atteindre vos
objectifs, il faut que chacune de vos communautés soit
représentée de façon proportionnelle dans ce nouveau
gouvernement », a déclaré Biden, lors de sa visite de deux
jours en Iraq.
Quatre
mois après les législatives qui n’ont donné à aucun parti la
capacité de gouverner seul, les Iraqiens attendent toujours
de connaître le nom de leur prochain chef de gouvernement et
la composition de l’exécutif. Ce blocage inquiète les
Etats-Unis qui doivent avoir retiré dans les deux prochains
mois l’ensemble de leurs troupes de combat d’Iraq.
Washington préférerait que ce départ se déroule dans un
contexte politique apaisé alors que la situation reste
instable sur le front de la sécurité. Sept ans après
l’invasion, qui a entraîné la chute de l’ex-président Saddam
Hussein, les Etats-Unis disposent actuellement de 77 500
soldats en Iraq, un contingent qui doit être ramené à 50 000
au 1er septembre.
Après
des entretiens avec les deux partis, Biden a annoncé que le
Bloc iraqien, l’Alliance de l’Etat de droit (AED, ndlr),
l’Alliance nationale iraqienne (ANI) et l’Alliance kurde
vont tous devoir « jouer un rôle important dans ce nouveau
gouvernement pour qu’il fonctionne ». Le Bloc iraqien dirigé
par M. Allawi, un chiite soutenu par les sunnites, est sorti
en tête du scrutin (91 sièges sur 325) devant l’AED de M.
Maliki. Ce dernier est parvenu à forger, avec les chiites de
l’ANI, une coalition qui peut être majoritaire au Parlement
avec l’appui des Kurdes, mais son maintien au pouvoir ne
fait pas consensus au sein même de cette alliance. De son
côté, M. Allawi fait valoir que sa victoire en nombre de
sièges lui donne le droit de devenir premier ministre, et il
a mis en garde contre un risque de nouvelles violences
confessionnelles si la voix des sunnites n’était pas prise
en compte. A cet égard, ni M. Maliki ni M. Allawi ne
semblent disposés à renoncer au fauteuil de premier ministre.
De
l’autre côté, le porte-parole du gouvernement, Ali
Al-Dabbagh, a indiqué que M. Biden avait insisté auprès de
M. Maliki sur la nécessité pour les Iraqiens de former
eux-mêmes un gouvernement, sans pressions régionales. De
même, le premier ministre a espéré que les rivaux iraqiens
parviendraient à un accord avant le 14 juillet. Date-limite
à laquelle le Parlement iraqien, qui désigne notamment le
chef du gouvernement, doit à nouveau se réunir.
Contre
l’ingérence américaine
En
première réaction sur ces annonces, le chef radical chiite
Moqtada Sadr a exhorté dans un communiqué MM. Allawi et
Maliki à ne pas se laisser influencer par Washington, et
plusieurs centaines de ses partisans ont manifesté à Koufa
(centre) contre la présence de M. Biden. « Leurs entretiens
doivent permettre d’appliquer l’agenda iraqien et non
l’agenda américain », a estimé M. Sadr, dont la milice,
l’Armée du Mahdi, a plusieurs fois affronté les forces
américaines depuis l’invasion du pays. Défendant son pays,
Biden a affirmé que les Etats-Unis n’ont pas d’agenda caché.
« Tout ce que nous voulons, c’est que vous progressiez comme
une démocratie indépendante et prospère. J’appelle les
candidats au poste de premier ministre à privilégier
l’intérêt de l’Iraq sur leur propre intérêt et à faire des
concessions en faveur du meilleur candidat. Celui qui reste
longtemps à ce poste risque la dépravation », a dit Moqtada
Sadr.
Le
mouvement sadriste avait annoncé en mai qu’il n’était
finalement pas opposé au maintien au pouvoir de M. Maliki,
en poste depuis 2006, tout en émettant des « réserves » sur
son compte. Moqtada Sadr lui-même avait qualifié en avril M.
Maliki de « menteur ». Le mouvement sadriste voue une
rancune tenace au premier ministre, qui a lancé en 2008 une
campagne militaire contre l’Armée du Mahdi. « Le Parlement a
le devoir d’élire quelqu’un qui n’est pas un dictateur, pas
l’homme d’un parti, pas un Américain, pas un membre du Baas
et pas un ennemi du peuple », selon le texte.
Or, en
Iraq, le choix du premier ministre dépend aussi des
pressions étrangères, américaines d’un côté et iraniennes de
l’autre. Si Maliki est le candidat favori du camp des
chiites soutenu par l’Iran, Allawi est, lui, soutenu par les
Etats-Unis. Selon les analystes, le conflit entre les deux
hommes ne sera réglé qu’avec un certain compromis entre les
deux puissances qui les soutiennent. « Cette rivalité au
sommet reflète tout simplement le conflit entre les
Etats-Unis et l’Iran. Ces deux pays ont une influence
importante sur la politique intérieure de l’Iraq, ils
peuvent exercer de fortes pressions sur les partis en
conflit pour qu’ils se mettent d’accord sur la formation du
nouveau gouvernement », explique le Dr Mohamad Al-Kadr,
politologue au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques
(CEPS) d’Al-Ahram. Reste donc à trouver un compromis qui
satisfait les différentes parties palestiniennes ainsi que
les forces étrangères qui ont leur mot à dire.
Maha
Salem