Energie . La hausse du prix du gaz et de l’électricité pour les industries lourdement consommatrices suscite le mécontentement des acteurs concernés, car elle pourrait freiner leur compétitivité.

Des réactions en chaîne

L’augmentation des prix de l’énergie pour les industries légèrement et lourdement consommatrices de gaz ou d’électricité fait grand écho chez les industriels. Le bras de fer n’est donc pas terminé, puisqu’ils accusent maintenant le gouvernement de vouloir imposer un lourd fardeau sur l’industrie nationale. Surtout pour les plus gourmandes en énergie. « Le gouvernement veut faire payer cher l’industrie égyptienne en temps de crise, ce qui, malheureusement, réduira leur compétitivité mondiale. Tous les pays du monde soutiennent actuellement leurs industries. Comment pourrons-nous faire face à cette concurrence et envahir d’autres marchés ? L’objectif de multiplier les exportations ne sera pas facile avec ces nouvelles orientations », dit Omar Mahanna, PDG du groupe Al-Suez pour le ciment. Il critique également les fardeaux successifs qu’impose le gouvernement sur l’industrie du ciment, puisqu’avec la hausse des prix de l’énergie viendra celle du prix de vente de sa production. Mahanna se demande donc si « les dernières taxes sur le prix de vente du ciment et du fer n’étaient pas suffisantes ».

Bien que le gouvernement ait gardé le même prix pour le gaz, (3 dollars par million d’unités britanniques), il a dû augmenter de 50 % celui de l’électricité. La gifle est forte. « Ces industries, telles que le ciment ou le fer, peuvent facilement supporter une telle hausse ; leurs profits sont élevés. Nous les avons soutenues pendant une bonne période, et elles ont pu créer de fortes entités industrielles. Maintenant, c’est à leur tour », a confié à l’Hebdo, Rachid Mohamad Rachid, ministre du Commerce et de l’Industrie. Et d’ajouter qu’en raison des répercussions de la crise financière qui n’ont pas totalement disparu, le ministre du Pétrole, celui de l’Electricité et lui-même ont longuement discuté avant de s’entendre sur une hausse du prix de l’énergie. « Cette hausse commencera légèrement à condition d’atteindre l’objectif prévu, qui est la suppression complète des subventions accordées aux industries qui ne sont pas lourdes exploratrices de l’énergie en 2011 », selon ses propos.

Des justifications qui ne convainquent pas les industriels. Samir Al-Noemani, responsable des ventes auprès du groupe Ezz, l’assure. « Il est vrai que le prix du gaz ne nous concerne pas, mais celui de l’électricité est un vrai fardeau qui pèsera sur nos coûts de production. Ça suffit les nouvelles décisions ! », s’exclame-t-il. Il est vrai que, comme le note Hani Guéneina, analyste économique auprès de la banque d’investissement Pharos, « les producteurs et commerçants abusent immédiatement de toute hausse, afin d’augmenter leurs propres prix ». Et « avec l’arrivée de l’été et du Ramadan, une hausse des prix est certainement prévue », ajoute-t-il, en prévoyant un taux d’inflation un peu plus élevé au cours du reste de l’année (entre 12 et 14 %). La banque d’investissement Beltone a, elle aussi, élevé ses prévisions concernant le taux d’inflation annuel, de 11 à 13 %, suite à ces dernières décisions.

 

Pas de fortes répercussions

Les industries légèrement consommatrices d’énergie, qui représentent 97 % des projets industriels et ne consomment que 30 % de l’énergie, sont, de leur côté, satisfaites de ces nouvelles décisions. Car la nouvelle hausse des prix est « limitée », comme le qualifie Ahmad Al-Sweedi, PDG du groupe Al-Sweedi pour les câbles électriques, ce qui n’aura pas de fortes répercussions sur les prix des produits finaux. « Même après cette hausse, la facture de l’énergie des coûts d’ensemble ne dépassera pas les 3 % du total, et c’est le groupe qui assumera une telle hausse », dit-il. Le comité suprême de l’énergie a mis en relief les intérêts de ce secteur nécessitant encore quelques soutiens. Il s’est contenté d’augmenter les prix de chaque million d’unités britanniques de 1,7 dollar à 2 dollars. Pour ce qui est de l’électricité, les prix resteront les mêmes, sauf si le prix du gaz augmente. « Nous ne pouvons pas augmenter deux sources d’énergie à la fois, surtout maintenant, avec la crise qui n’est pas totalement finie », explique Amr Assal, président de l’organisme. « Malheureusement, c’est le consommateur qui en assumera la facture », dit-il.

Quant aux industries de produits chimiques et du verre, elles achèteront leur gaz à 2,3 au lieu de 3 dollars le million d’unités britanniques, pour la simple raison « d’encourager les investissements dans ces deux domaines qui sont fortement créateurs d’emplois », explique Assal Ahmad Abdel-Ghani, analyste chez CI Capital, voit qu’une telle étape « est positive pour ces deux industries, car elles pourront concurrencer au niveau international avec l’atout du prix de gaz réduit ». A noter que le comité avait réduit le prix du gaz à ces industries de 3 à 1,7 dollar le million d’unités britanniques, pour une période de 18 mois, afin de faire face à la crise.

Le plan de suspension graduelle des subventions à l’énergie pour l’industrie est entré en vigueur en 2008. Le Conseil des ministres avait ainsi approuvé une hausse des prix du gaz naturel aux industries légèrement consommatrices de l’énergie, de 1,25 par millions d’unités britanniques à 2,65 dollars sur une période de 3 ans. La première phase du plan a été appliquée en 2008 et en 2009. Mais suite à la crise financière, le plan a été suspendu. C’est ainsi la deuxième phase qui est actuellement en vigueur .

Névine Kamel