Internet. La rupture
d’un câble sous-marin en Méditerranée a privé l’Egypte de connexion pendant
plusieurs jours en fin de semaine dernière. Non sans porter un sérieux
préjudice à l’activité économique du pays et à celle de plusieurs autres de la
région.
Pas si virtuel que ça ...
«
J’étais incapable d’accomplir les échanges électroniques via Internet qui ont
chuté au quart de notre activité habituelle mercredi dernier. Nos clients n’ont
pas pu se connecter au net pour y suivre les cours financiers. Ils nous
appelaient par téléphone pour donner les ordres d’achat et de vente », explique
Mamdouh Al-Baz, directeur général du courtage en ligne chez EFG-Hermes. Il
ajoute que le taux d’échange a augmenté de plus de 75 % après que EFG-Hermes
eut permis à ses clients d’entrer directement sur son site sans passer par le
portail externe. Comme Al-Baz, plus de 500 000 abonnés à l’Internet haut débit
(ADSL) ont subi une rupture d’accès à l’Internet pendant plusieurs jours dès le
30 janvier, panne qui a duré près d’une semaine.
Du
côté des grandes entreprises égyptiennes, la semaine a été noire. « Sans
Internet, la vie économique est presque morte. J’ai été incapable de
communiquer via le web avec d’autres sociétés internationales », se plaint
Tareq Nofal, propriétaire d’une entreprise informatique, avant d’ajouter qu’il
n’a eu d’autre choix que d’avoir recours au fax pour travailler. Quant à
MobiNil, premier opérateur de téléphonie mobile en Egypte, il a dû aussi
annoncer par fax, jeudi 31 janvier, ses résultats annuels à la Bourse, aux
actionnaires et aux médias.
La
situation a été encore plus difficile pour les sociétés fournissant un service
ADSL. Les pertes n’ont pas été calculées, mais Oqeil Béchir, PDG de Telecom
Egypt, les estime à environ 100 000 L.E. pour un mois d’activité de son
entreprise. Ahmad Magdi, propriétaire d’un cybercafé affirme, lui, que cette
panne lui a causé « des pertes quotidiennes de 500 L.E. par jour. Mes clients
viennent en général pour appeler leurs proches à l’étranger », dit-il. Et
d’ajouter que les vacances scolaires de mi-année sont considérées comme la
haute saison des cybercafés avec un taux d’occupation quotidien de 100 %. Ce
taux a chuté à 15 % durant la panne. Adel Danech, directeur d’un centre
d’appel, souligne que la plupart des centres ont suspendu leurs activités dès
le 30 janvier. « Pour maintenir le même niveau de service, j’ai assumé les
coûts du transfert des appels en provenance d’Europe. Et ce pour pouvoir garder
mes clients ».
Pour
compenser les désagréments dus à cette crise, l’Organisme régulateur des
télécommunications prévoit que les internautes connectés par modem 56 k se
verront offrir leur facture de janvier et que les abonnés à ADSL bénéficieront
d’un mois gratuit. « Cela limitera les dégâts à long terme pour une faute qui
n’est pas la nôtre », déclare un fournisseur de services Internet. Un petit
cadeau qui fera sans doute plaisir aux clients désabusés. Mais avec 7 millions
d’internautes en Egypte, et un taux de pénétration de 9,3 %, la facture promet
d’être salée.
Robot sous-marin pour réparer
Le
gouvernement, de son côté, a cherché à faire preuve de transparence face à
cette crise qui a paralysé le pays pendant une semaine : au lendemain de la
rupture des services Internet, le ministre des Télécommunications, Tareq Kamel,
a annoncé lors d’une conférence de presse : « Il semble qu’une panne survenue
sur deux câbles sous-marins situés en mer Méditerranée soit la cause de ces
perturbations. Ces deux câbles auraient été sectionnés aux environs
d’Alexandrie pour des raisons liées aux conditions climatiques et à la
navigation maritime ». Il a précisé que la société britannique Flag,
responsable de la maintenance des deux câbles en question, enverrait un robot
sous-marin pour les réparer. « En attendant, l’Egypte aura recours à un
troisième câble alternatif passant par l’Est de la ville de Suez avec une
capacité de débit équivalant à 30 % de la capacité normale, qui s’élèvera
graduellement à 55 % », a-t-il ajouté. Et en effet, l’amélioration s’est
rapidement faite sentir, le ministère ayant accru le débit de 10 Gégas
disponible aux fournisseurs d’accès en vue d’augmenter de 80 % la capacité de
redistribution. « Nous allons continuer à louer ces débits supplémentaires,
même après la réparation des deux câbles. Et ce en vue de prévenir des
problèmes similaires », a annoncé le ministre.
Au
niveau régional, la panne a également frappé plusieurs pays arabes du Golfe,
notamment les Emirats arabes unis, le Koweït, l’Arabie saoudite, le Qatar et
Oman. En Arabie saoudite, la compagnie publique Saudi Telecom (STC) a perdu «
plus de 50 % de ses liaisons internationales », selon le quotidien Arab News. Pour
garder ses clients, la société a mis en place des alternatives. « Nous
possédons deux câbles alternatifs à travers lesquels la societé a transféré les
services d’Internet », explique Saad Bin Zafer, vice-président de Saudi
Telecom, en ajoutant que le débit est déjà revenu à la normale. Dans le riche
émirat gazier du Qatar, la panne a affecté « moins de 40 % » des services
Internet. La compagnie nationale de télécommunications QTel a eu recours à «
plusieurs solutions alternatives » pour assurer les services Internet et aider
des opérateurs dans des pays voisins, a indiqué l’un de ses directeurs, Adel
Moutawan. A Manama, la compagnie nationale publique de téléphone et unique
fournisseur d’accès Internet, Batelco, a appelé à minimiser l’utilisation de la
toile en se limitant au courrier électronique et à la navigation.
Gilane Magdi