Iraq. La loi sur la réhabilitation des anciens membres du Baas est entrée en vigueur. Un moyen d’endiguer la violence.

 

Les Baasistes sortent de l’ombre

 

Des milliers d’ex-membres du parti Baas de Saddam Hussein vont retrouver leurs postes et leurs emplois dans l’administration civile et militaire. Washington jugeait cette initiative essentielle pour la stabilité de l’Iraq. Le Conseil présidentiel iraqien a ratifié dimanche une loi sur la réhabilitation d’anciens membres du parti Baas de Saddam Hussein, levant tous les obstacles légaux à l’entrée en vigueur de ce texte controversé censé œuvrer en faveur de la réconciliation nationale. « Le Conseil présidentiel a examiné la loi au-delà de la période prévue des dix jours (...) », indique un communiqué de la présidence. Les membres du Conseil, le président Jalal Talabani et ses deux vice-présidents, « n’ont pas achevé leurs discussions dans cette période, qui est la période maximum prévue par la Constitution. La loi est donc considérée comme valide » et adoptée, explique ce communiqué.

Resté en souffrance pendant des mois au Parlement, le texte avait été ratifié par une faible majorité des députés le 12 janvier dernier.

Baptisée « Loi sur la justice et la transparence », cette nouvelle législation était réclamée avec insistance par l’Administration américaine qui y voit « un pas important vers la réconciliation ». Elle autorise, sous certaines conditions, la réintégration de membres du Baas au sein de la fonction publique, ainsi que le paiement de leur retraite. Elle permet en revanche aux « victimes » du Baas de saisir les tribunaux pour obtenir des compensations et la condamnation d’anciens membres du parti unique.

La loi, telle qu’approuvée par le Parlement, est relativement complexe et a suscité après le vote des députés, des commentaires contradictoires au sein de la classe politique iraqienne. Le vice-président sunnite Tareq Al-Hachémi avait exprimé ses réserves, exigeant des modifications avant de la parapher. Jeudi, Hachémi avait déclaré ne pas être favorable à cette loi selon lui animée par « l’esprit de revanche », qui forcerait, prédit-il, de nombreux fonctionnaires à quitter leur emploi pour le céder à d’anciens Baasistes. D’anciens membres sunnites du Baas avaient eux aussi critiqué cette loi, estimant qu’elle risquait de les désigner à la vindicte des chiites, qui dominent le gouvernement et les forces de sécurité iraqiennes. Les chiites radicaux, notamment les partisans du jeune chef Moqtada Al-Sadr, avaient dénoncé cette loi en arguant que jamais les victimes du régime de Saddam Hussein, dont nombre de chiites, n’ont été dédommagées et qu’il faudrait leur donner la priorité. La « débaassification », voulue par l’administrateur américain Paul Bremer peu après l’invasion américaine de mars 2003, et la dissolution de l’armée avaient mis à la rue des centaines de milliers d’Iraqiens et alimenté les rangs de l’insurrection sunnite.

Sous le régime de Saddam Hussein, l’affiliation au Baas était nécessaire à quiconque voulait occuper un poste à responsabilités.

Reste à savoir si cette loi contribuera à stabiliser la situation en Iraq. En effet, la violence continue toujours de frapper, malgré une baisse relative ces derniers mois. Plus d’un million d’Iraqiens ont été tués dans des violences en Iraq depuis l’invasion du pays par les troupes américaines et alliées en 2003. Ce nombre ne cesse d’augmenter notamment avec les attentats dont les derniers ont été perpétrés vendredi. Cherchant à défendre sa politique et à calmer les esprits, le premier ministre iraqien, Nouri Al-Maliki, a annoncé samedi l’imminence de la bataille finale contre Al-Qaëda, au lendemain d’une journée sanglante à Bagdad. « Le moment est venu de lancer la bataille décisive contre le terrorisme », a annoncé M. Maliki en présence des principaux responsables militaires américains et iraqiens réunis dans la ville de Mossoul. Située à 370 km au nord de Bagdad, cette ville est considérée par les militaires américains comme l’épicentre de la lutte contre les membres de l’organisation extrémiste. Il s’exprimait après la réunion d’une « cellule de crise » avec le plus haut gradé américain en Iraq, le général David Petraeus, et le conseiller iraqien pour la sécurité nationale Mouwaffak Al-Roubaie. « La bataille que nos forces armées vont entamer va défaire le terrorisme, les bandes criminelles et les hors-la-loi dans la province de Ninive », a affirmé M. Maliki, en référence à la région du nord de l’Iraq, devenue un sanctuaire pour Al-Qaëda. Le but des « terroristes est de stopper le retour à la vie dans Bagdad et de revenir à la situation » qui prévalait en février 2007, avant le lancement d’une vaste offensive américano-iraqienne pour sécuriser la capitale.

Rania Adel