Trop tard
Salama A. Salama
Les
pays arabes ne pouvaient qu’accueillir favorablement
l’initiative du président américain. Celui-ci a invité à la
tenue d’une conférence internationale à l’automne prochain,
pour relancer ce qu’il a appelé le processus de paix au
Moyen-Orient. Des parties arabes, avec en tête l’Egypte et
l’Arabie saoudite, ont exprimé leur soutien à cette
conférence, selon le principe du noyé qui cherche une bouée
de sauvetage ou peut-être, selon le principe de celui qui ne
peut dire ni oui ni non. En effet, la situation est devenue
déplorable dans les territoires palestiniens.
Un fait
qui a totalement paralysé les parties arabes. Désormais, les
heurts ne se limitent plus au Fatah en Cisjordanie et au
Hamas à Gaza, ils concernent aussi la sécurité égyptienne et
les milliers de Palestiniens bloqués à Rafah.
Ce qui a
poussé les pays arabes à s’attacher à une initiative aux
traits indéterminés, c’est le discours habituel de Bush sur
la nécessité de mettre un terme à l’occupation israélienne
dans les territoires palestiniens, de démanteler les
implantations et d’instaurer un Etat palestinien. Les
parties arabes, qui ont favorablement accueilli l’initiative
américaine, estiment que c’est l’occasion pour relancer
l’engagement américain sur un règlement pacifique juste,
même s’il s’annonce à la fin du mandat de Bush, sous la
pression de la situation détériorée en Iraq et en
Afghanistan et de l’insistance des Démocrates à retirer les
troupes américaines de l’Iraq, à l’approche de la campagne
présidentielle.
Cependant, il faut noter que l’engagement exprimé à maintes
reprises par le président Bush a rapidement perdu de sa
crédibilité. En effet, il n’a rien réussi à exécuter ni n’a
pu convaincre Israël d’exécuter ses engagements. Bien plus,
la politique américaine a insisté à adopter des politiques
aidant au déchirement du rang palestinien et a semé la
zizanie entre le Fatah et le Hamas. C’est d’ailleurs la même
politique adoptée par Israël. Ce qui porte atteinte à la
légitimité des efforts que les Etats-Unis prétendent être
disposés à mettre en œuvre à travers l’organisation d’une
conférence. Une conférence dont ils n’ont déterminé ni la
date, ni les parties, ni l’objectif, ni même le lien avec la
résolution des autres aspects du conflit arabo-israélien,
comme le problème du Golan.
Les pays
arabes, qui ont favorablement accueilli le discours de Bush,
doivent réaliser qu’il est conforme à ce à quoi appelle
Israël dans sa réponse à l’initiative arabe de paix. En
effet, Israël exige la nécessité de normaliser ses relations
avec les pays qui n’ont pas encore pris de pas dans cette
direction, avec en tête l’Arabie saoudite et les pays du
Golfe, avant toute mesure vers les négociations pratiques
autour du processus de paix et avant de dévoiler quoi que ce
soit sur l’instauration de l’Etat palestinien selon les
frontières de 1967.
Cependant, Bush ne se contente pas de cela. Il adopte une
position antinomique contre l’union du peuple palestinien.
De plus, il incite Abou-Mazen à rompre ses relations avec le
Hamas et à le punir. Abou-Mazen s’est d’ailleurs empressé de
le déclarer en prenant une série de mesures visant à écarter
le Hamas du régime politique palestinien et à organiser si
possible des élections législatives et présidentielles sans
la participation du secteur de Gaza et du Hamas. C’est la
même orientation dévoilée par les rapports de Washington sur
les discussions effectuées par Omar Soliman.
L’Administration américaine s’est effectivement opposée à
toute ouverture égyptienne envers le Hamas ou à toute
discussion avec lui, à l’instar de celles effectuées par le
gouvernement égyptien avec les Frères musulmans.
Rice
viendra dans la région dans quelques jours pour se réunir
avec les ministres arabes des Affaires étrangères. Cependant,
les pays arabes n’ont pas adopté de position claire quant
aux dernières évolutions palestiniennes. Ce qui donne
l’impression que le discours de Bush n’était qu’un simple
discours d’adieu qui n’aura aucune répercussion réelle.