Cameroun .
Face à une opposition discréditée par ses divisions, le
parti au pouvoir est le favori des élections législatives et
municipales de dimanche dernier, malgré la mauvaise
situation socioéconomique du pays.
Nouvelle majorité
En
Afrique, les élections se suivent et se ressemblent.
Dimanche dernier, ce sont les Camerounais qui ont voté pour
des élections législatives et municipales. Un scrutin qui
devrait confirmer la mainmise du parti au pouvoir sur un
pays miné par le malaise socioéconomique et la méfiance
vis-à-vis d’élites réputées corrompues. Selon les autorités,
le scrutin s’est déroulé dans de bonnes conditions. Un
acquis en soi, même si certaines sources ont fait part de
lacunes dans la préparation des élections, notamment en ce
qui concerne l’inscription sur les listes électorales et
l’informatisation du fichier électoral.
Quelques difficultés d’organisation qui ne risquent pas
d’empêcher le Rassemblement Démocratique du Peuple
Camerounais (RDPC), parti du président Paul Biya, au pouvoir
depuis 25 ans, et qui dispose de 149 députés dans
l’Assemblée sortante, d’asseoir son pouvoir.
Cependant, l’opposition, notamment ses deux principaux
partis, le Social Democratic Front (SDF) et l’Union
Démocratique Camerounaise (UDC), ont dénoncé des
irrégularités dans un pays où tous les scrutins, depuis le
retour du multipartisme en 1990, ont été suivis de
contestations. Les dénonciations ont commencé avant la tenue
même du scrutin. « Les élections ne seront ni transparentes
ni justes, et Biya est l’architecte de tout cela », a lancé
le leader du SDF, John Fru Ndi, vétéran de l’opposition. Des
accusations rejetées par François-Xavier Mbouyom, président
de l’Observatoire national des élections (Onel), chargé de
superviser le scrutin.
Bien que ne doutant pas de l’issu du scrutin, ces deux
formations de l’opposition ont choisi de participer aux
élections. Elles font partie de 45 partis en lice pour ces
législatives et des 33 présentant des candidats aux
municipales. « Si on ne participe pas, on ne pourra pas voir
et dénoncer les irrégularités », a ainsi expliqué le chef de
l’UDC, Adamou Ndam Njoya.
Faiblesse de l’opposition
La faiblesse de l’opposition réside aussi dans le fait que
les Camerounais n’ont pas confiance en elle. En effet, ils
se rappellent toujours la tentative d’union de ces deux
partis, en 2004. Cette tentative a tourné court : tous deux
ont fini par présenter leur candidature à la présidentielle,
ouvrant la voie à une énième réélection de Paul Biya. «
C’est vrai que l’opposition a une mauvaise image car elle
n’arrive pas à s’entendre », a tout simplement reconnu
Adamou Ndam Njoya.
Face au peu de poids de l’opposition, le principal enjeu
pour le RDPC est de savoir s’il conservera la majorité des
deux tiers qui lui permettrait de réviser la Constitution
afin d’autoriser le président à briguer un nouveau mandat en
2011. Les « grandes ambitions » affichées en 2004 par Paul
Biya, pour ce pays aux fortes disparités entre un nord
musulman et sahélien et un sud chrétien et forestier,
peinent pour l’heure à se concrétiser pour une jeunesse
souvent sans emploi.
Concrètement parlant, la principale question qui préoccupe
les Camerounais est la corruption, ce fléau généralisé qui
entrave plus que jamais l’essor économique du pays. A ce
sujet, les autorités veulent se montrer actives. « Le
système est en train de sévir, on traduit les gens en
justice, on condamne même ceux qui ont détourné l’argent
public », dit le ministre des Relations avec les assemblées,
Grégoire Owona. Le pouvoir, qui a lancé fin 2004 l’opération
anti-corruption « Epervier », a enregistré quelques
avancées. Pour préparer le terrain à ces élections, les
autorités ont accéléré le pas. En 2006, les enquêtes ont
abouti à l’inculpation, voire à l’incarcération, de
plusieurs ex-patrons d’entreprises publiques, d’un ministre
et de deux députés du RDPC.
Une
goutte d’eau dans un océan .
Maha
Salem