Conseil Consultatif.
Au-delà des débats autour de la nouvelle Constitution, c’est
le sort même de l’assemblée constituante qui se trouve
fragilisé.
La controverse reste actuelle
Dans un communiqué de presse publié récemment, les partis
issus de la « mouvance révolutionnaire », les
Egyptiens libres et l’Egyptien social-démocrate, ainsi que
le parti de gauche Al-Tagammoe
et celui de tendance nassérienne Al-Karama
annonçaient leur « rejet total » de l’assemblée
constituante actuelle formée selon eux sans consensus
national, « ce qui rend nul et non avenu tout projet de
Constitution qui en émanerait ». Les quatre partis ont
réitéré leur demande d’une Constitution rédigée par « une
assemblée représentative de tous les courants religieux et
intellectuels, sans distinction ni marginalisation ».
Les profonds désaccords autour de la composition de
l’assemblée constituante avaient déclenché une bataille
juridique. La justice avait été saisie pour dissoudre cette
assemblée de 100 membres, formée sur des bases
inconstitutionnelles selon ceux opposés à l’écrasante
majorité des islamistes en son sein. Ces derniers, de leur
côté, avaient demandé la récusation du tribunal chargé
d’examiner cette affaire, laquelle a été suspendue jusqu’au
24 septembre.
L’assemblée constituante pourrait utiliser cette trêve pour
accélérer son travail et trancher quelques débats cruciaux
comme ceux relatifs aux pouvoirs du président, à ceux du
Parlement ou au rôle de l’appareil militaire dans la
nouvelle loi fondamentale. L’hypothèse du « fait accompli »
est fort plausible aux yeux de Refaat
Al-Saïd, chef du parti Al-Tagammoe.
Celui-ci accuse les membres de l’assemblée constituante de
tenir un double discours, rappelant que son porte-parole,
Wahid Abdel-Méguid,
avait souligné le besoin d’un délai supplémentaire de trois
mois pour achever la Constitution.
« Les déclarations de Abdel-Méguid
ne correspondent pas à la réalité et contredisent celles de
Sobhi Saleh (cadre des Frères
musulmans) qui a assuré que la Constitution serait finalisée
d’ici la fin du mois du Ramadan, soit le 19 août », note
Al-Saïd. « Le but est d’accélérer la rédaction de la
Constitution pour la soumettre à un référendum au plus vite
en partant du principe que la volonté du peuple a force de
loi, voire est au-dessus de toute loi », ajoute-t-il. « Le
texte sera sûrement adopté à une majorité écrasante grâce au
discours des Frères où le oui rime avec paradis, et le non
appartient aux impies », regrette Al-Saïd.
« Un nouveau Vatican »
Pour Nabil Abdel-Fattah, du
Centre d’Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram,
les membres de la constituante auront largement le temps de
forger une Constitution adaptée aux intérêts et aux
objectifs des Frères musulmans et des courants
salafistes. « Des textes ont
été insérés pour restreindre les libertés religieuses et
d’autres accordent une suprématie à Al-Azhar en termes de
législation pour en faire un nouveau Vatican »,
déplore-t-il. « Ce ne sera pas une Constitution durable
dans la mesure où elle restera en deçà des ambitions
démocratiques des Egyptiens », s’attend le chercheur.
Marguerite Azer, ex-députée,
estime elle aussi que les membres de la constituante
« se livrent à une course contre la montre »
pour finaliser le projet de Constitution et le soumettre à
référendum avant que la justice ne se prononce sur les
recours déposés à leur encontre. Mais comme beaucoup de
figures libérales, Azer ne
compte pas l’attendre comme une fatalité. Elle a déposé une
plainte en justice pour engager le Conseil suprême des
forces armées à former une nouvelle constituante. En vertu
de l’article 60 de la Déclaration constitutionnelle, le
Conseil militaire a le droit de former une nouvelle
assemblée constituante en cas de dysfonctionnement de
l’actuelle assemblée. C’est sur cet article que reposent les
tentatives juridiques de ceux qui craignent une Constitution
islamisée.
Mohamed Abdel-Hady