Al-Ahram Hebdo, Opinion |  Emad Awwad, La deuxième République face au défi de la citoyenneté

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 Semaine du 4 au 10 juillet 2012, numéro 929

 

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Opinion

La deuxième République face au défi de la citoyenneté

 Emad Awwad

Politologue

 

 

A l’aube de sa deuxième République, l’Egypte se trouve confrontée à de multiples défis. Tant au niveau interne qu’externe. Celui ayant trait à la citoyenneté est aujourd’hui d’une importance majeure. Bien que cette notion ait fait son apparition dans la Constitution pour la première fois en 2007 afin de remplacer celle de « coalition des forces ouvrières », elle restait, depuis, lettre morte.

Au moment où l’Egypte se trouve face à sa deuxième République, cette fois-ci civile et non pas militaire, le défi de la citoyenneté est toujours omniprésent. Si cette notion se présente comme la porte de sortie d’une situation interne chaotique, elle a cependant ses exigences. La lecture des données actuelles nous incite à formuler un nombre d’observations préliminaires.

Bien que les propos tenus par le président élu lors de sa première allocution précisant qu’il sera « le président de tous les Egyptiens » soient rassurants, force est de constater qu’une telle déclaration intervient dans un climat marqué par des craintes parmi une bonne partie des citoyens. Car après tout, M. Morsi n’était pas un candidat indépendant. Il est issu des Frères musulmans. Le fait qu’il a quitté la direction du parti après sa victoire électorale ne signifie pas pour autant, aux yeux d’une grande partie de la population, qu’il ait renoncé à ses orientations et ses convictions personnelles. Ce constat suffit à lui seul à mettre sur le qui-vive plusieurs tranches de la société : chrétiens, intellectuels, artistes, modérés, etc. Désormais celles-ci se posent la question suivante : allons-nous être des citoyens à part entière ou allons-nous subir des discriminations non officielles mais de facto ? Le second tour du scrutin s’est déroulé sur fond de divisions entre deux camps : les courants islamistes tous confondus d’un côté et un front hétérogène réuni autour d’un candidat indépendant de l’autre. M. Chafiq se présentait alors en tant que garant de la liberté, de la sécurité et de la non-exclusion. Aux yeux de ses défenseurs, il représentait le meilleur rempart à l’établissement d’un Etat islamique dans le pays. Dans un contexte de polarisation politique, il faut réaliser que traduire la citoyenneté dans la réalité ne peut se réaliser uniquement à travers des mesures superficielles. La citoyenneté doit s’appuyer sur des actes concrets et pertinents. A cet effet, le président élu a exprimé son intention de nommer deux vice-présidents : une femme et un chrétien, ce qui semble être un pas dans le bon sens.

Toutefois, il faudra attendre de connaître les capacités, les qualifications ainsi que les pouvoirs des personnes désignées pour en juger. Rassurer les femmes sur l’égalité de leurs droits avec les hommes nécessite la nomination d’une figure modérée et adepte du mouvement féministe à ce poste. De même pour les chrétiens. Ils seraient davantage rassurés sur leurs droits en voyant la nomination d’un vice-président ayant derrière lui une carrière dans la défense de leurs intérêts. Si ces nominations se font avec pertinence, on pourra effectivement avancer sur la voie de l’unité nationale désignée par le président élu comme « le seul moyen de sortir de ces temps difficiles ».

Par ailleurs, le combat de la Constitution demeure déterminant dans ce domaine. En effet, la rédaction et l’adoption de ce document-clé marqueront le début réel de la deuxième République. Non seulement il devrait s’appuyer sur la citoyenneté comme base du régime, mais il devrait également l’entourer de garanties contre des abus éventuels : que ce soit de la part d’une majorité parlementaire (si l’on adopte un régime parlementaire) ou par l’appartenance idéologique des chefs d’Etat (au cas où l’on préserverait le régime présidentiel). Si la compétition entre les forces politiques forme l’essence de la démocratie, elle devra être uniquement basée sur des programmes, et non pas aux dépens de notions fondamentales telles que la citoyenneté.  En outre, une part des responsabilités revient à la population, toutes tendances confondues, dans la mise sur pied d’une citoyenneté solide. Depuis la révolution des signes marquant une régression dans le domaine de la citoyenneté ont été enregistrés, tels que la multiplication des réclamations d’ordre sectoriel, le manque du respect des lois ainsi que la tendance à imposer une sorte de tutelle sur la population au nom d’une démocratie naissante.

Si la citoyenneté signifie l’égalité et la non-discrimination, elle implique pour autant une dimension invisible ou un lien moral qui mettrait l’intérêt de la patrie au-dessus de tous les autres. Le fait que les élections soient remportées par tel ou tel parti ne signifie guère que tout le monde doit suivre un mode de vie préfabriqué, comme ce fut le cas à l’époque du communisme dans certains pays. De même, les élections ne signifient pas s’approprier le pays. La citoyenneté implique l’égalité dans la diversité. Il importe aussi que tout citoyen respecte les droits des autres.

Enfin, la mise sur pied d’une véritable citoyenneté nécessite la présence d’une nouvelle formule gérant les relations entre les citoyens et les forces d’ordre. Il ne sera jamais question de citoyenneté si ces relations restent basées sur la peur, la haine ou le mépris. Pour ce faire, un effort sincère doit être fait pour former les forces de sécurité au respect des droits de l’homme. Parallèlement, les citoyens doivent apprendre à respecter les forces de l’ordre et à coopérer avec elles pour s’acquitter convenablement de ses devoirs. 

 

 

Mais les forces civiles doivent d’abord surmonter plusieurs obstacles. Elles souffrent surtout d’une très grande division entre une multitude de partis, de mouvements et de coalitions. Ensuite, leur discours passe mal parmi une population conservatrice et très sensible au discours religieux. Leur présence parmi l’électorat est également faible par rapport aux forces islamistes qui font souvent usage des mosquées et qui détiennent un large réseau d’œuvres caritatives et de chaînes satellites qui diffusent leurs pensées à longueur de journée .

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