Héritage .
Beaucoup de disciplines sportives reconnues comme étant
d’origine grecque remonteraient en réalité à l’Egypte
ancienne.
Le sport, une invention pharaonique
Athlétisme,
haltérophilie, boxe, gymnastique, aviron et autres
disciplines font partie de la longue série des Jeux
olympiques organisée tous les 4 ans. Les origines de ces
disciplines sportives sont plus lointaines que ce qu’on
pensait. Elles remontent à l’époque pharaonique, voire pour
certaines à l’époque préhistorique. Le tir et l’athlétisme
font partie de ces sports d’origine pharaonique. Ceci est
clair dans les scènes qui figurent sur les parois des
temples pharaoniques ou celles exprimées à travers les
graffitis dans les grottes préhistoriques. La pratique du
sport a été étroitement liée à l’existence de l’homme dans
les périodes préhistoriques. L’importance du sport a évolué
au fil du temps. Celui-ci était devenu indispensable dans
l’Egypte ancienne pour fortifier le corps et préserver
l’hygiène, sans oublier la vie militaire. Le sport était
aussi un divertissement et les compétitions sportives
étaient souvent incluses dans les festivités. Dans l’Egypte
pharaonique, il y avait en principe deux catégories de
sport. La première comprenait des sports simples et qui
visaient à fortifier le corps. « Ce sont les exercices de
gymnastique pratiqués par les enfants et les individus à
leur domicile », explique la professeur Laila Abdel-Qader,
experte en égyptologie et ayant abordé le thème du sport
dans sa thèse de magistère. Quant à la deuxième catégorie,
elle avait des règlements et elle exigeait un grand effort
et une forte habileté. Elle était pratiquée par les amateurs
et les professionnels. Parmi les sports de cette catégorie
on peut citer la lutte, l’haltérophilie, le saut, la
bataille à bâtons, la natation et la boxe.
En
effet, sur les parois des temples on trouve expliqués des
exercices simples pour tendre le buste, fortifier le dos
ainsi que les extrémités du corps. Ainsi on remarque deux
personnes assises par terre, leur dos collé l'un à l'autre,
essayant de se mettre debout sans appui sur les mains. Une
autre scène représente une personne toute droite se reposant
sur sa tête. D’ailleurs, une petite statue incarne un
sportif qui s’appuie sur ses extrémités en levant le corps
comme pour faire une roulade arrière. Outre les différents
sports individuels, l’Egypte ancienne a aussi connu les
équipes sportives. L’une d’elles se composait de 5 membres
portant un même uniforme ressemblant aux sportifs actuels.
C’est une sorte de voile ample serré à la ceinture et rayé.
Les poignets des joueurs sont entourés de rubans. La scène
représente les joueurs en train d’exécuter des mouvements de
gymnastique simples et collectifs. « Ces jeux reflètent
la flexibilité du mouvement de l’équipe et le désir de
montrer l’élégance du corps », commente Laila Abdel-Qader.
Selon elle, ces exercices sportifs faisaient partie des
festivals et des compétitions. « A côté de l’équipe, une
jeune fille tient en main un collier d’ornement pour être
offert au joueur le plus habile », reprend-elle.
Jeux royaux
Outre la gymnastique et les jeux simples, l’ancien Egyptien
a connu, voire inventé une série de sports, à l’instar du
tir et de l’athlétisme. Le tir est apparu pendant l’époque
préhistorique grâce à la chasse, une activité nécessaire
pour se nourrir. Raison pour laquelle l’homme a créé
certains outils de chasse comme la lance, l’arc, le disque
qui était en pierre et la flèche. Le chasseur de l’époque
était très habile, car la chasse était étroitement liée à sa
subsistance, voire son existence. « Sur les murs de la
grotte de Wadi Soura au
Guilf Al-Kabir,
dans le désert libyque, se trouvent des graffitis
représentatifs des chasseurs tenant une lance à la main
Dans d’autres scènes apparaissent l’arc et le disque. Les
sites préhistoriques comprennent
des milliers de pointes
de flèches »,
explique Khaled Saad, directeur général du département de la
préhistoire auprès du Conseil suprême des antiquités. Selon
lui, la chasse a donné naissance au tir reconnu aujourd’hui
comme un sport. Cette activité a évolué tout au long de
l’histoire pharaonique. A Saqqara,
sur les murs de la tombe de Ka Guemni
de la Ve dynastie et celle de Meri
Rouca de la VIe
dynastie de l’Ancien Empire, on trouve gravées des scènes de
chasse où les défunts tiennent la lance et l’arc. En fait,
la chasse était considérée comme un sport et un
divertissement. Les scènes de pêche se répètent dans les
tombes des nobles du Moyen et Nouvel Empire à Béni-Hassan.
Le tir était un sport exclusif aux nobles. Le roi
Amenhotep II était le plus connu
pour l’exercice du sport. Sur l’une des scènes décoratives
de sa tombe, il est représenté enfant, l’arc à sa gauche, la
flèche à sa droite et derrière lui le maire Mine qui lui
apprenait à tirer, révélant la présence des maîtres sportifs
qui entraînaient les jeunes princes et les guidaient. Laila
Abdel-Qader affirme qu’il y
avait des planches épaisses en cuivre trouées où le sportif
devait lancer sa flèche. Amenhotep
II faisait tomber ces planches grâce à la force de sa lance,
selon les inscriptions de la stèle du Musée de Louqsor. A 18
ans, Amenhotep II est devenu
cavalier. Il excellait au tir sur la charrette à deux
chevaux. Son habileté sportive était aussi marquée dans
l’aviron et l’athlétisme. En revanche, l’athlétisme était
répandu au sein du peuple, notamment les sauts en longueur.
Une gravure qui remonte au Moyen Empire montre un jeune
homme qui saute avec bravoure par-dessus un taureau. Quant
au taureau, il est tenu fortement par ses cornes et sa queue
afin de ne pas blesser le joueur en sautant.
Les premiers professionnels
Outre le tir et l’athlétisme, l’Egypte ancienne a inventé la
lutte dont les scènes sont gravées sur une petite stèle dans
la tombe du vizir Ptah-Hotep de
la Ve dynastie, à Saqqara.
Il s’agit de 6 positions de jeu avec de simples exercices
pratiqués par des enfants nus et âgés d’environ 6 ans. « Le
fils du vizir lui-même joue avec eux, ce qui reflète
l’importance de la lutte à cette époque pour la cour royale
et les nobles », retrace l’expert en égyptologie le
professeur Abdel-Aziz Saleh,
dans le livre intitulé La Civilisation de l’Egypte
ancienne. On remarque sur cette petite stèle que les
règles de jeu sont bien respectées, grâce à la répétition
des gestes. Au fil du temps, la lutte a évolué. Au Moyen
Empire, les peintres ont dessiné 219 positions de lutte. Il
y avait des lutteurs professionnels qui gagnaient leur pain
en organisant des duels devant le public. « Ces duels
étaient-ils présentés sur les marchés, pendant les fêtes ou
bien pendant les célébrations privées organisées par la
haute société ? Personne ne peut confirmer », lance le
professeur Saleh. Mais le plus important est que les
Egyptiens ont pratiqué ces sports. Les peintures reflètent
aussi le désir de chaque joueur de vaincre son adversaire
tout en le respectant. Avant de commencer, les deux joueurs
se saluaient. Le plus fort ralentissait son attaque jusqu’à
ce que son adversaire rattache sa ceinture pour relancer le
combat. Au Nouvel Empire, les militaires sportifs
participaient à des duels de lutte lors des cérémonies
célébrant les victoires militaires. Parmi les sports de
combat connus au temps des pharaons, il y a la lutte au
corps à corps qui est rarement représentée sur les murs des
tombes. Sans oublier les duels au bâton que les Egyptiens
pratiquent jusqu’à nos jours à la campagne. Ce sport est
représenté dans de multiples scènes murales à l’intérieur
des tombes. L’haltérophilie était aussi pratiquée. Les plus
anciennes scènes de ce sport remontent au Moyen Empire. Le
joueur devait lever d’une manière perpendiculaire une jarre
remplie de sable. Selon les égyptologues, ce sport est
l’ancêtre de l’actuelle haltérophilie, une discipline
olympique.
La société égyptienne a connu également la gymnastique
rythmique. Une scène de la cérémonie de la déesse Hathor
gravée à l’occasion de la moisson montre un jeune homme et
une jeune fille appuyés sur leur
bas lèvent les jambes pour atteindre leurs têtes. Ces
acrobaties reflètent des corps sportifs, flexibles et bien
entraînés.
Il reste les sports nautiques comme l’aviron et la natation.
Les anciens Egyptiens excellaient dans l’aviron et ils
organisaient des compétitions destinées aux militaires et
aux non-militaires. Le parcours atteignait parfois les 6 km.
Quant à la natation, « l’ancien Egyptien était habitué à
nager dans l’eau du Nil. Mais il avait peur de la mer à
cause des vagues », commente le professeur Christian
Leblanc, président de l’Association pour la sauvegarde du
Ramesseum et directeur de la mission archéologique française
de Thèbes-Ouest. Abdel-Halim
Noureddine, expert en
égyptologie, met en avant certaines scènes de natation dans
l’une des tombes de Saqqara
assurant que ce sport existait à l’époque des pharaons.
Presque tous les sports olympiques d’aujourd’hui existaient
du temps des anciens Egyptiens. L’Egypte n’est-elle pas
l’aube de la civilisation comme l’a affirmé l’historien
James Henry Breasted ? ,
Doaa
Elhami