Al-Ahram Hebdo, Monde | Sur les traces de Bin Laden

  Président
Labib Al-Sebai
 
Rédacteur en chef
Hicham Mourad

Nos Archives

 Semaine du 22 au 28 juin 2011, numéro 876

 

Contactez-nous Version imprimable

  Une

  Evénement

  Enquête

  Dossier

  Nulle part ailleurs

  Egypte

  Economie

  Monde Arabe

  Monde

  Opinion

  Société

  Arts

  Livres

  Littérature

  Visages

  Environnement

  Voyages

  Sports

  Vie mondaine

  Echangez, écrivez



  AGENDA


Publicité
Abonnement
 
Monde

Al-qaëda . Succédant à Ossama bin Laden, tué le 2 mai par les forces spéciales américaines, Ayman Al-Zawahri (59 ans), considéré comme le cerveau de l’organisation terroriste, vient d’être désigné à sa tête. Cela promet des jours difficiles pour les Etats-Unis, revenus à la case départ.

Sur les traces de Bin Laden

Désigné comme nouveau chef d’Al-Qaëda, Ayman Al-Zawahri sera désormais l’homme le plus recherché du monde. Cet Egyptien était en fait considéré comme le « favori » pour prendre la tête de l’organisation terroriste depuis la mort de Bin Laden le mois dernier. Dès le premier jour, le nouveau chef n’a pas caché sa stratégie : suivre la même voie que Bin Laden et déclarer le djihad (la guerre sainte) aux Etats-Unis et à Israël. Dans un premier message vidéo diffusé il y a quelques jours, Al-Zawahri a été clair. « Nous devons continuer sur la voie du djihad pour chasser les étrangers de la terre des musulmans et purger cette terre de l’injustice. Bin Laden continuera de hanter l’Amérique, Israël et leurs alliés croisés, leurs agents corrompus, qui ne trouveront pas le sommeil et la sécurité tant qu’ils occuperont des terres de l’islam », a menacé le nouveau leader après avoir fait l’éloge funèbre de son prédécesseur. On peut dire que ce message, à la fois défiant et menaçant, réduit à néant tous les efforts déployés par les Etats-Unis au cours de la dernière décennie pour liquider Bin Laden.

Washington pensait « faussement » que la légende d’Al-Qaëda serait détruite à jamais après la mort de Bin Laden. Or, la réalité prouve le contraire car après la mort de ce dernier, Washington n’a fait que changer d’ennemi. Selon les experts, les jours à venir seraient difficiles pour les Etats-Unis car l’idéologie de Bin Laden est gravée dans la mentalité de tous ses disciples, entre autres Ayman Al-Zawahri. Ce dernier pourrait être encore plus redoutable que son prédécesseur, car il n’a rien à perdre. En 2001, alors qu’il fuyait l’Afghanistan pour se réfugier dans les zones tribales pakistanaises, son épouse, ses deux filles et son fils, restés à Qandahar, le fief des talibans, ont été tués par des bombes américaines. Dès lors, Ayman Al-Zawahri n’a qu’une idée en tête : se venger. Selon les experts, le nouveau leader serait aussi plus dangereux que Bin Laden, car c’est lui qui a conçu la structure d’Al-Qaëda : il était le vrai « cerveau » de l’organisation. La majorité des opérations commises par Al-Qaëda à travers le monde portent sa marque, entre autres les attentats contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie, en août 1998, ceux de Madrid (2004) et de Londres (2005), sans oublier ceux du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

Passant de la parole à l’acte, Ayman Zawahri a exhorté cette semaine tous les moudjahidin en Afghanistan, au Pakistan, en Iraq, en Somalie, dans la péninsule arabique et au Maghreb islamique à « redoubler d’efforts dans le djihad contre les croisés et leurs agents ». Il a aussi encouragé les Pakistanais à se soulever contre leurs militaires mercenaires et leurs hommes politiques corrompus qui ont transformé le Pakistan en une colonie américaine. Saluant les soulèvements populaires en Tunisie, en Egypte, en Libye, en Syrie et au Yémen, il a assuré les jeunes protestataires dans ces pays du soutien d’Al-Qaëda. « Nous menons avec vous un même combat contre les Etats-Unis et leurs agents », a-t-il dit.

Washington joue l’indifférence

Minimisant l’importance de la désignation d’Al-Zawahri à la tête d’Al-Qaëda, les Etats-Unis ont émis des doutes quant à la capacité de ce dernier à gérer l’organisation terroriste, car il n’a pas le charisme de Bin Laden. « De plus, il est autoritaire et tout dialogue avec lui est difficile », affirme le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, qui a déclaré que ce nouveau chef est loin d’avoir l’envergure de son prédécesseur et il éprouvera des difficultés à imposer son autorité à l’organisation terroriste. « Il doit s’occuper d’abord de sa propre survie. Et puis, j’ai entendu dire qu’il suscitait la méfiance au sein d’Al-Qaëda parce qu’il est égyptien », a-t-il ajouté.

Quelles que soient les difficultés qui attendent Al-Zawahri, les Etats-Unis ont déjà juré que le nouveau chef aurait le même sort que son prédécesseur et serait très vite éliminé, a assuré samedi le chef d’état-major interarmes américain, l’amiral Mike Mullen, ajoutant que la désignation d’Al-Zawahri n’était pas une surprise pour Washington. « Lui et son organisation continuent à nous menacer. De même que nous avons cherché à arrêter et à tuer Bin Laden et sommes arrivés à le faire, nous ferons certainement la même chose avec Zawahri », a lancé M. Gates, ajoutant que la désignation d’Al-Zawahri « importe peu » et ne change en rien le fait que l’idéologie d’Al-Qaëda est « en faillite ».

Alors que Washington joue la carte de la froideur et de l’indifférence évoquant parfois le peu de charisme, parfois le peu d’expérience du nouveau leader, certains experts pronostiquent que les jours à venir seraient assez « durs » pour les Etats-Unis. Nul ne peut nier qu’Al-Zawahri est un homme très dangereux et largement soutenu par les talibans du Pakistan. En plus, il est plus dur, plus radical encore que son mentor. Sa nomination à la tête d’Al-Qaëda ne va pas mettre un point final aux violences mais elle va simplement déplacer le théâtre de la guerre d’Afghanistan vers le Pakistan, où Al-Zawahri est largement soutenu par les talibans pakistanais. La preuve de ce changement de théâtre est la multiplication des attentats, ces dernières semaines, sur le sol pakistanais pour venger Bin Laden. Les dirigeants d’Al-Qaëda et les talibans considèrent avoir été trahis par le gouvernement d’Islamabad, qu’ils accusent d’avoir aidé les forces américaines à liquider leur chef historique au Pakistan. Ce déplacement des violences vers Islamabad intervient à un moment très difficile pour Washington, dont les relations avec le Pakistan, son allié dans la guerre contre le terrorisme, sont au plus bas depuis le meurtre de Bin Laden sur le sol pakistanais.

A la lumière de ces nouvelles données, une réalité est sûre : le scénario des jours à venir serait plus que cauchemardesque pour l’administration Obama, qui s’apprête à retirer ses troupes d’Afghanistan le mois prochain, à un an de la présidentielle américaine ….

Maha Al-CherbinI


 

Qui est Ayman
Al-Zawahri ?

Le nouveau chef d’Al-Qaëda est un Egyptien né le 19 juin 1951 à Maadi dans une famille bourgeoise. Petit-fils d’un imam de la mosquée d’Al-Azhar et fils d’un professeur de pharmacologie, il faisait partie de ces jeunes bourgeois égyptiens des années 1960 qui rejetaient le traitement réservé aux islamistes en Egypte sous Nasser. En 1974, il est diplômé en chirurgie de l’Université du Caire. Mais ses convictions religieuses sont très précoces. Dès 15 ans, il rejoint le groupe des Frères musulmans. A leur contact, il se radicalise de plus en plus dans les années 1970. En 1981, impliqué dans l’assassinat du président Anouar Al-Sadate, il est emprisonné pendant trois ans.

A sa sortie de prison, il va en Arabie saoudite, puis au Pakistan au milieu des années 1980, où il travaille avec le Croissant-Rouge pour soigner les moudjahidin blessés en Afghanistan dans les combats contre les forces soviétiques. Il ne tarde pas à franchir la frontière avec l’Afghanistan pour rejoindre le « djihad » mené contre l’occupation soviétique. C’est pendant cette période qu’il rencontre Bin Laden qui préconisait la lutte contre l’Occident. Les deux hommes sont devenus rapidement très proches. Beaucoup d’observateurs affirment qu’Ayman Al-Zawahri était le « cerveau » d’Ossama bin Laden.

A la fin de la guerre en Afghanistan (1989), Ayman Al-Zawahri retourne en Egypte. En 1993, il prend la direction en Egypte du Djihad islamique qui veut renverser le régime du président Moubarak et instaurer un Etat islamique. Les attentats et les affrontements font plus de 1 200 morts durant cette période. En 1996, il est arrêté en Russie alors qu’il recrute des combattants pour se battre en Tchétchénie. Libéré rapidement, il retrouve Ossama bin Laden et rejoint Al-Qaëda, organisation terroriste fondée par ce dernier. Il soutient activement les attentats contres les ambassades des Etats-Unis au Kenya et en Tanzanie en août 1998. Il est alors placé sur la liste noire des terroristes les plus dangereux par le FBI. Il est également condamné à mort en Egypte, son pays, pour de nombreux attentats, en particulier celui qui a tué 62 personnes, dont 58 touristes étrangers, à Louqsor, en 1997. A la fin des années 1990, installé dans les zones tribales de la frontière afghano-pakistanaise, il se met totalement au service d’Al-Qaëda, dont il devient le numéro deux et le principal idéologue. Les deux hommes élaborent ensemble les attentats du 11 Septembre 2001 contre le World Trade Center à New York et le Pentagone à Washington. Au lendemain des attaques, sa tête est mise à prix à 25 millions de dollars et il est activement recherché par les forces spéciales américaines qui arrivent en Afghanistan en octobre. Dès lors, il devient insaisissable, se cachant dans les zones tribales entre l’Afghanistan et le Pakistan.

Selon certains experts, Zawahri est l’une des victimes du régime de Nasser, son opposition politique au régime a été renforcée par l’humiliation de la défaite de 1967 face à Israël, ce qui a fort nourri son extrémisme. D’autres pensent que c’est la Révolution iranienne de 1979 et le traité de paix signé par le président Sadate avec Israël la même année qui l’ont entraîné dans la voie de la violence. Quelle que soit la raison de son radicalisme, Ayman Al-Zawahri est aujourd’hui l’homme le plus recherché et considéré comme le plus dangereux au monde.

 

 




Equipe du journal électronique:
Equipe éditoriale: Névine Kamel- Howaïda Salah -Thérèse Joseph
Assistant technique: Karim Farouk
Webmaster: Samah Ziad

Droits de reproduction et de diffusion réservés. © AL-AHRAM Hebdo
Usage strictement personnel.
L'utilisateur du site reconnaît avoir pris connaissance de la Licence

de droits d'usage, en accepter et en respecter les dispositions.