Al-Ahram Hebdo, Voyages | Un arrêt et des questions

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 Semaine du 18 au 24 mai 2011, numéro 871

 

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Patrimoine . Les travaux de fouilles sur le site Al-Lahoun, au Fayoum, ont été arrêtés par le ministre d’Etat pour son état déplorable. Les deux responsables de ce site se défendent. Enquête.

Un arrêt et des questions

Des momies abîmées, des tombeaux détruits et d’anciennes tombes ouvertes. Ces graves infractions ont poussé Zahi Hawas, ministre d’Etat pour les Affaires des antiquités, d’arrêter définitivement les travaux de fouilles dans le site archéologique d’Al-Lahoun, dans le gouvernorat du Fayoum. L’état du site, comme il a été mentionné dans le rapport préparé par le Comité permanent des antiquités égyptiennes dirigé par Atef Aboul-Dahab, chef du département central des antiquités du Caire et de Guiza, est dans un état plus que déplorable. Le comité, lors de sa tournée dans le site des tombes découvertes dans le but de mettre le point sur les dégâts causés, a découvert un tas d’infractions. En effet, les tombes en question se trouvent sur une colline dont les traces de fouilles sont claires. Le visiteur peut voir des fossés partout montrant ces traces. Des sarcophages en bois dont la plupart sont abîmés se trouvent sur la colline ; voire, il y a des momies entourées de cartonnages coloriés. Sur le site, on peut voir des cadavres de chiens ! Les ouvertures des tombes ont plusieurs dimensions à tel point que quelques-unes permettent l’accès d’un ou de plusieurs individus. Dans le rapport présenté, 90 % des tombes ne sont pas fermées et ne sont pas sécurisées. Et comme les tombes sont connectées entre elles, il est alors facile d’avoir accès à la plupart d’entre elles par n’importe quelle ouverture du site. « On peut accéder à plusieurs tombes à travers une seule entrée », assure Atef Aboul-Dahab, chef du comité. Ceci est l’exemple de la tombe qui porte le numéro 51 où le comité a trouvé des momies presque pourries et des sarcophages dont la plupart sont abîmés. Même scénario dans les tombes 10 et 44. Pire, le comité a découvert lors de sa surveillance du site une momie d’un homme dans un sarcophage féminin. « On a trouvé deux sarcophages appartenant à des femmes. Mais lors de leur ouverture, on y a découvert une momie d’un homme », commente Aboul-Dahab qui suppose que certaines momies ont été probablement transférées dans d’autres tombes. Ou bien la mission les avait extraites pour les photographier et elles ont été remises dans d’autres tombes. « Tous ces sarcophages ont été laissés en plein air sans la moindre restauration ou enregistrement. Ils ont ainsi perdu leurs belles inscriptions colorées », explique Aboul-Dahab.

Al-Aïdy se défend

En fait, les fouilles opérées sur ce site étaient dirigées par Abdel-Rahman Al-Aïdy qui y opère depuis 2008 et qui y avait découvert 76 tombes. Pour sa part, Al-Aïdy met en cause la situation dangereuse dans laquelle a vécu le pays pendant la révolution. « Nous étions en plein travail sur le site jusqu’au 28 janvier 2011. A cette date, nous avons été obligés de le quitter, à cause des conditions de la révolution et l’absence totale de la sécurité et à cause du chaos qui avait régné dans tout le pays », se rappelle ce chef de la mission opérant à Al-Lahoun. Pour lui, la mission comprend une équipe de restaurateurs très habiles et de toutes les spécialités. Tout objet dégagé était enregistré et était soumis à la restauration. De même, les membres de la mission ouvraient les tombes progressivement. « Dès qu’on terminait les travaux dans une tombe, on commençait à traiter celle qui la suivait », se défend-il. D’après lui, la plupart des tombes ont été dérobées et plusieurs squelettes et momies dégagés ont été abîmés après la révolution par des pillards qui ont profité de l’absence de la sécurité dans la région. D’ailleurs, toutes les tombes du site sont plutôt des puits funéraires ou des tombes-puits. Elles n’ont pas de portes et elles devaient être sécurisées par les gardiens et la police. Malgré ces conditions difficiles, « nous avons découvert une très belle momie qui a été transportée à l’académie de Rome pour y être exposée l’an dernier. Si mes fouilles sont mauvaises, comme prétend le rapport, les responsables des antiquités allaient-ils sélectionner l’une de mes trouvailles à l’Académie de Rome ? », se demande-t-il avec ironie. Al-Aïdy admet qu’une expertise doit être effectuée par un autre comité neutre formé plutôt de professeurs de différentes universités. Par contre, il assure que les tombes ont été architecturalement relevées et enregistrées.

Une surveillance plus méticuleuse

Suite à cette polémique, le ministère d’Etat pour les Affaires des antiquités a décidé, pour mieux contrôler les travaux des missions égyptiennes et étrangères, de former des comités de supervision qui feront le tour de toutes les missions afin de suivre de près les différentes étapes de travail sur les différents sites, commençant par les fouilles, les restaurations des pièces dégagées, les consolidations des éléments architecturaux, et ce sans oublier les enregistrements et la documentation de la zone archéologique. Ces comités feront en fait des visites successives à ces missions afin de présenter des rapports d’évaluation au ministère.

En fait, avant, il s’agissait de contrôler uniquement les missions étrangères. Le Conseil Suprême des Antiquités (CSA) comptait sur ses inspecteurs qui accompagnaient les missions sur le site. Ils avaient la tâche de présenter des rapports d’évaluation de la mission, leurs opinions personnelles et le système du travail de toute l’équipe archéologique du point de vue archéologique et scientifique. Selon les propres termes de Hawas, lors de l’une des célébrations, l’inspecteur qui accompagnait la mission étrangère était l’œil du CSA sur le site pendant les fouilles. Cette condition ne portait pas sur les missions égyptiennes, parce qu’elles représentent une minorité. Les plus fameuses sont celles qui sont dirigées par le Dr Hawas lui-même, qui opèrent à Saqara et à Thèbes. Reste alors la mission de l’Université du Caire, dirigée par la Dr Ola Al-Aguizy et celle d’Al-Lahoun, présidée par le Dr Abdel-Rahman Al-Aïdy, qui a été arrêtée depuis quelques semaines. En dépit de tout cela, Al-Lahoun reste l’une des plus importantes régions archéologiques qui n’a pas encore livré tous ses secrets. Les récents projets vont-ils diriger l’affaire vers la bonne direction ?

Doaa Elhami

 

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Al-Lahoun en quelques lignes

« Lahoun » est une nomination dérivée d’une expression de l’ancienne Egypte signifiant « l’embouchure du lac ». La région est riveraine de l’actuel Bahr Youssef qui débouche dans le lac Qaroun. Le plus important indice d’Al-Lahoun est la pyramide de Sénousert II (1880-1874 av. J.-C.). La pyramide est bâtie sur un monticule en briques crues. Elle représente la méthode de construction centrale, mise au point sous le Moyen Empire. En effet, son édification se basait sur l’utilisation de murs de soutènement rayonnant à partir du centre et renfermant un remplissage de briques crues. Ensuite, le corps a été revêtu de l’extérieur de pierres, aujourd’hui disparues. Cette couche de pierres taillées donnait un effet comparable à celui des pyramides entièrement bâties en pierres de taille. Son altitude est de 48 mètres de hauteur tandis que sa base atteint les 106 mètres. Quant à son entrée, elle est inhabituelle : alors que l’entrée de toutes les pyramides se trouve normalement sur la face septentrionale, l’accès de la pyramide de Sénousert II est fait par deux puits proches de la face méridionale. C’est une nouvelle méthode utilisée afin de dissimuler la salle funéraire du roi. Le sarcophage de granit rose y a été découvert ainsi qu’une table d’offrandes en marbre. Parmi les trouvailles les plus surprenantes de cette salle, est la présence de la statue dorée de Cobra qui pourrait être une partie de la couronne royale.

Dans les alentours de la pyramide, ont été dégagés des mastabas et des caveaux de presque toutes les époques. Parmi ceux-ci, le puits funéraire de la princesse Sat-Hathor-Iounet qui contenait de très beaux bijoux du Moyen Empire, exposés actuellement au Musée égyptien. A l’est de la pyramide se dresse modestement le temple funéraire. L’ancienne ville renferme au moins trois quartiers, qui étaient traités par Flinders Petrie. Séparés par des murs, ils sont l’acropole ou citadelle destinée peut-être au pharaon lui-même, le quartier oriental, avec de grandes demeures d’environ 60 x 40 m entourant une cour et comprenant jusqu’à 70 ou 80 pièces, et enfin le quartier occidental, avec des résidences uniformes et plus petites d’environ 10 x 10 m, comportant de 4 à 12 pièces. Cette agglomération était habitée par des prêtres et des fonctionnaires desservant la pyramide.

La ville est enfin fameuse par les centaines de papyrus hiératiques connus par leur nom de « papyrus Kahoun ». Ils portent des textes littéraires, mathématiques, médicaux, d’art vétérinaire, sans compter les documents officiels et ceux concernant le temple.

Doaa Elhami

 

 

 




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