A la croisée des chemins
Labib Al-Sebai
Où
va l’egypte ? Une question que nous devons tous prendre en
considération. La situation est que toutes les forces
anti-révolution, après avoir échoué dans les tentatives
d’avorter la révolution, se sont fixé un seul objectif :
pousser les choses jusqu’à un point crucial de collision
entre l’armée et le peuple. Et ce, à travers des pratiques
qui tentent de nuire au grand rôle national assumé par les
forces armées depuis le 25 janvier. Il va de soi que sans ce
rôle positif, la révolution n’aurait pas pu réaliser les
acquis qui ont secoué le monde entier. Ces derniers jours,
il y a eu des événements importants alors que les grands
éléments de la corruption ont été renversés, en plus de la
décision du procureur général de placer l’ex-président en
détention provisoire, tout comme ses fils et les ex-hommes
du pouvoir. Ces pas importants réconfortent les forces de la
révolution qui craignaient que Moubarak et sa famille ne
conservent une immunité.
Il est donc temps que toutes les forces nationales se
mettent d’accord sur le fait qu’il ne faut douter ni de la
crédibilité des forces armées ni de leur protection de la
révolution. Il n’est plus acceptable de refuser les
procédures des forces armées à tel point de les accuser de
lenteur. Surtout que l’objectif des forces anti-révolution
est clair : semer la zizanie entre le peuple et l’armée.
Ce n’est peut-être pas le moment de dévoiler les secrets et
les détails des événements des dernières semaines, mais il
faut au moins observer le minimum que nous savons. Chose
apte à nous aider à choisir la voie qui mène à la réussite
de la révolution, une réussite garantie par 2 réalisations.
La première a déjà été effectuée avec le renversement du
régime et de ses symboles, puis de leur poursuite en
justice. Quant à la seconde réalisation, qui constitue le
défi réel de toute la nation, c’est de construire la
nouvelle Egypte après avoir renversé le pouvoir corrompu. A
ce propos, nous n’avons pas encore bougé d’un pas. Au
contraire, au lieu d’avancer, nous perdons du temps à rester
préoccupés par le passé et ses hommes. Nous devons diriger
toute notre énergie vers l’avenir et la construction du
pays.
La pierre angulaire de la construction de la nouvelle Egypte
est la sauvegarde de l’armée, l’unique protecteur de la
sécurité de l’Etat, des citoyens et du territoire et qui a
toujours prouvé qu’elle était une partie intégrante du
peuple.
Une question : les forces armées allaient-elles accepter le
projet d’héritage du pouvoir ? Tout prouve que les forces
armées, malgré leur conviction de ne pas intervenir dans la
vie politique, n’allaient pas accepter ce projet. La
direction des forces armées avait lancé des signaux
insinuant ce refus et qui avaient été compris par
l’ex-président. C’est une crise que Moubarak avait tenté de
régler sans parvenir au point de collision.
Les documents du service de la Sûreté d’Etat qui ont été
dévoilés après que les citoyens avaient pénétré les locaux
dévoilent que l’obstacle essentiel face au projet d’héritage
du pouvoir était la position des forces armées. De plus, les
documents de l’ambassade américaine au Caire, et qui ont été
dévoilés par WikiLeaks, signalent que la réussite du projet
d’héritage est difficile en raison du refus des forces
armées.
Pour faire passer le projet, la présidence pariait sur la
police. Ce qui explique ses équipements sophistiqués
dont une police normale n’a pas besoin pour accomplir sa
mission sécuritaire. La police égyptienne était donc
soutenue par le pouvoir de l’argent. L’effondrement des
forces de sécurité et la disparition de la police pendant la
révolution le prouvent clairement. C’est pour cela qu’après
la révolution, la police est revenue avec une nouvelle
philosophie basée sur le principe de servir la nation et le
citoyen.
Nous en revenons à la seconde réalisation qui est la
construction de la nouvelle Egypte et qui nécessite de faire
face à plusieurs défis. Le premier est que la révolution
égyptienne constitue un exemple nouveau dans l’histoire des
révolutions du monde entier, puisque c’est une révolution
populaire sans aucun leader ni entité chargés de réaliser
ses objectifs. C’est alors les forces armées qui ont assumé
cette responsabilité.
Le deuxième défi est que les réclamations sont sans fin, que
ce soit avec de la bonne ou mauvaise intention. Ces
réclamations ne prennent pas en considération les conditions
sociales et économiques, mais seulement politiques.
Le troisième défi est la catastrophe claire qui menace
l’économie nationale, surtout le secteur du tourisme avec
des pertes dépassant le milliard de dollars par mois. En
plus de la baisse des taux d’investissements étrangers, la
baisse de la production qui a atteint 20 % dans certains
secteurs et des dizaines de milliers d’ouvriers rapatriés de
Libye. Dans cette conjoncture économique, 6 milliards de
dollars ont été retirés en 60 jours, et cela sur un total de
36 milliards dans les réserves de la Banque Centrale
d’Egypte.
Le quatrième défi concerne la sécurité. En effet, la police
a besoin d’une certaine période pour accomplir toutes ses
missions et il ne faut pas que les forces armées continuent
à assumer le rôle de la police alors que leur mission est de
protéger les frontières à l’est, à l’ouest et au sud. Il
faut prendre en considération tous ces points alors que nous
sommes à un moment crucial de l’Histoire, où nous devons
choisir la bonne voie pour garantir à l’Egypte la position
qu’elle mérite. Le premier pas sur cette voie est de
sauvegarder la cohérence et l’union de l’armée et du peuple.