Bourse .
Une semaine après la reprise des échanges, la situation
reste floue et instable. Si une intervention du gouvernement
semble se préciser, il n’est pas certain qu’elle parviendra
à éviter une chute à long terme.
Hausse des indices, mais ...
«
Le marché est si volatile que nous ne pouvons pas prévoir
son évolution. La hausse des indices Case 30, EGX 100 et
Nilex ne signifie encore pas de tendance véritable à la
hausse, il est encore trop tôt pour analyser ces tendances
», souligne Walaa Hazem, directeur de l’investissement
auprès de la banque d’investissement HC.
Plusieurs analystes partagent cette opinion. Hani Tewfiq,
PDG de la banque d’investissement Naeem, prévoit que
l’indice fluctuera beaucoup cette semaine. Une fluctuation
accompagnée par une tendance à la hausse à court terme, «
mais suivie par une incertitude sur le long terme »,
assure-t-il. Il pense qu’il sera difficile de prédire la
performance du marché pour les deux prochaines semaines en
raison du recours des investisseurs à des cycles multiples
d’investissement, « c’est-à-dire vendre et acheter à
plusieurs reprises les mêmes actions, afin de pouvoir
maximiser les profits ».
L’indice Case 30 a connu une hausse de 5,3 % dimanche 27
mars, se stabilisant à 5 212 points ; lundi, il poursuivait
cette tendance à la hausse en gagnant 0,75 %, se
stabilisant ainsi à 5 201 points. L’indice EGX 100 a de même
connu une légère hausse de 1,4 % lundi contre une hausse de
2,1 % dimanche.
Les 23 et 24 mars derniers avaient enregistré des baisses
attendues par la plupart des opérateurs. L’indice Case 30 a
notamment connu un fort fléchissement au cours de ces deux
premiers jours d’échange chutant respectivement de 8,9 et de
3,7 %. Une tendance qui semble évidente dans des situations
d’instabilité politique. Alors comment cette tendance à la
baisse s’est-elle transformée en hausse ? « Cette hausse ne
durera que quelques jours. Puis l’indice connaîtra de
nouvelles chutes dues à la revente des titres », affirme
Ahmad Helmi, directeur de recherches auprès de la société
Global Capital Misr. Il explique que la tendance à la hausse
a surpris tous les acteurs du marché : « Tout le monde
s’attendait, après la chute des deux premiers jours
d’échange, à un fléchissement plus grave le 27 mars. Mais
aucune baisse globale n’a été enregistrée », souligne-t-il.
Helmi assure qu’une intervention gouvernementale a eu lieu,
afin de soutenir le marché. Les institutions
gouvernementales auraient acheté des titres, afin d’éviter
une baisse nuisible à l’Egypte. Elles se placent ainsi à
contre-pied de la spéculation et des analyses des
professionnels du marché. La spéculation joue aussi son
rôle, en pariant à l’inverse des tendances. Elle reste
cependant artificielle et limitée sur le long terme.
Aucune source gouvernementale n’a pourtant déclaré avoir
injecté des capitaux en provenance du fonds du ministère des
Finances pour soutenir la Bourse. « Il semble que ces
capitaux investis en Bourse proviennent d’une grande
institution », assume Moustapha Badra, directeur général de
la société de courtage Themar. S’il semble probable que
cette institution agisse à la demande du gouvernement,
personne n’est en mesure de la nommer. Il est clair que ce
positionnement contraire aux tendances du marché n’est
cependant pas celui d’un acteur privé. Qui aurait intérêt à
investir de grosses sommes sans certitude sur l’avenir du
pays, et notamment sur l’état du secteur du tourisme ? Les
raisons de la hausse de l’indice le 27 mars déficient, en
effet, toute logique. Badra révèle que la plupart « des
institutions étrangères ont cherché à vendre leurs titres
dès la réouverture de la Bourse. Qui achète alors ? »,
s’interroge-t-il.
Convaincu qu’une intervention publique a eu lieu, Badra
s’appuie sur le fait que 80 % des échanges de dimanche
dernier ne sont pas issus du secteur privé. Impossible
pourtant d’identifier les acheteurs avec précision.
Inquiétude des investisseurs étrangers
La tendance à la vente des institutions étrangères a été
confirmée par beaucoup de fonds d’investissement étrangers.
Oliver Bell, gestionnaire principal des investissements
auprès de Pictet en Grande-Bretagne, souligne que « les
fonds d’investissement qui n’ont pas de liens forts avec le
marché égyptien doivent à tout prix se retirer du marché
avant la fin du premier trimestre 2011 ». Une analyse qui ne
présage rien de bon pour les mois à venir. Shehzad Janab,
chef de gestion auprès de la société Daman Dubaï, indique
que la situation politique en Egypte demeure instable et que
« cela pèse fortement sur les actions cotées. Notre société
a revu à la baisse les évaluations de plus de 11 actions, y
compris les cotations de Palm Hills et de Talaat Mostapha en
raison de leur implication dans des affaires de corruption
liées à l’ancien régime ».
Cette vision pessimiste ne fait cependant pas l’unanimité.
Adel Al-Wali, directeur exécutif auprès de la banque
d’investissement HC, remarque que les fluctuations prévues
des cours des actions durant la prochaine période « ouvrent
la porte à la réalisation de profits pour les spéculateurs.
Les profits réalisés durant cette période seront
probablement plus élevés que ceux réalisés durant une
période de stabilité », assure-t-il. Réfaat Hassan,
investisseur, explique son intérêt à investir dans les
actions immobilières, où les actionnaires étaient des
symboles de l’ancien régime. « Ayant connu d’énormes
baisses, ces actions sont actuellement les plus attrayantes.
N’importe quelle évolution positive relative à ces affaires
sera profitable à ces actions », espère-t-il.
Hazem considère, quant à lui, que l’achat d’actions dans des
sociétés impliquées dans des affaires de corruption
représente un grand risque. « Ces actions seront toujours
liées aux évolutions des jugements de ces affaires qui
affecteront le cours des titres », commente-t-il.
Hazem conseille aux investisseurs d’acheter des titres du
secteur agro-alimentaire ou pétrolier. Il pondère cependant
ses propos : « Il est plus raisonnable d’acheter avec de
petites sommes jusqu’à ce que les fortes fluctuations
s’apaisent ». Si la tendance semble à la baisse, les
évolutions rapides promettent des gains élevés pour les
spéculateurs. Quant au gouvernement, il joue la carte de la
discrétion tout en intervenant sur le marché, pour éviter
une dégringolade des indices égyptiens. Une situation
d’instabilité en tout point parallèle à l’évolution
politique du pays ...
Dahlia Réda