Législatives .Quelques
semaines avant la tenue des élections, prévues le 28
novembre, la scène politique est dominée par un désordre qui
profite à certaines forces politiques.
Le processus électoral rongé par les divisions
Avec l’approche des législatives, on parle déjà de plus
d’une centaine de partis politiques en lice. Cela n’empêche
pas tous les regards de se tourner vers les trois principaux
partis politiques qui existaient déjà bien avant la
révolution.
Peut-on parler d’un réel changement au sein de ces partis ?
Apparemment non. La division des principaux partis comme le
néo-Wafd et Al-Tagammoe et la
dislocation de certaines nouvelles coalitions ont eu pour
résultat l’affaiblissement de l’échiquier politique. Si l’on
se réfère en particulier à ces partis d’opposition qui
existaient avant la révolution, comme le néo-Wafd, Al-Tagammoe
et le Parti nassérien, on constate qu’ils étaient tous sous
la coupe du Parti National Démocrate (PND) de l’ancien
régime. Contrôlés, ces partis pouvaient difficilement
établir des contacts réels avec le peuple.
Aujourd’hui, dix mois se sont écoulés depuis la révolution
et les partis et forces politiques n’ont toujours pas entamé
de réels changements. Les problèmes dont ils souffraient
avant la révolutions sont restés
les mêmes, voire se sont aggravés par des différends entre
leurs membres. Résultat : l’Egypte a vu naître plusieurs
partis politiques sans aucune base populaire. C’est ce
qu’affirme Abdel-Ghaffar
Chokr, vice-président du Centre
de recherches arabes et africaines, lui-même ancien membre
du parti Al-Tagammoe qu’il a
quitté pour fonder un nouveau parti socialiste. Il explique
: « Depuis 1976, les partis politiques vivaient dans un
multipartisme restreint. L’effritement des anciens partis
comme Al-Tagammoe n’est pas un
phénomène nouveau. Les partis d’Al-Karama
et d’Al-Wefaq al-watani
sont des sous-branches du Parti nassérien », ajoutant que «
les conflits au sein des partis existent depuis plus de dix
ans ». Face aux restrictions imposées par l’ancien régime,
chaque parti avait sa façon de faire. « Si certains ont
accepté la répression, d’autres l’ont défiée », résume
Chokr.
Pour Hassan Nafea, professeur à
la faculté des sciences politiques et économiques à
l’Université du Caire : « Le Wafd, qui devrait faire partie
des forces libérales dans ces législatives, est devenu
faible. Il n’a plus de poids dans la rue. Al-Tagammoe
a perdu lui aussi sa capacité à mobiliser les forces de
gauche ».
Le cas est différent pour les Frères musulmans qui sont
parvenus à former après la révolution un nouveau parti,
Liberté et justice. « Ce parti est devenu le symbole de
l’opposition. D’autres partis islamistes viennent le
renforcer tel que le parti des
salafistes, des soufis et de la
Gamaa islamya », poursuit
Nafea.
Les nouveaux-nés peinent à
avancer
De nouvelles coalitions se sont récemment formées. Les
exemples d’alliances électorales entre les partis
d’idéologies et de programmes différents sont nombreux.
Citons la Coalition démocratique pour l’Egypte, créée par le
parti Liberté et justice, et celui du néo-Wafd. Cette
coalition avait réussi à attirer plus de quarante partis
mais a, à son tour, fini par s’effondrer. « Les coalitions
ne seront pas stables. Ces partis n’ont pas de base
populaire », estime Chokr.
Selon nombre d’analystes, cette situation ne profiterait
qu’aux anciens du PND, considérés par certains comme la
seconde force du pays, après les Frères musulmans. Si
plusieurs scénarios sont envisageables, la prochaine
Assemblée sera fortement teintée par les islamistes tout en
étant largement divisée. « Il s’agira d’un Parlement effrité
qui ne réussira pas à se mettre d’accord sur les 10 noms qui
formeront la commission constituante. C’est ce qui permettra
l’intervention du Conseil militaire afin de se protéger et
de former un statut indépendant pour l’armée au sein de la
nouvelle Constitution », déclare Amr
Hashim Rabie, spécialiste
politique au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques
(CEPS) d’Al-Ahram.
L’inquiétude est donc de mise. « La situation politique
souffre d’un vide que tous ces partis, anciens ou nouveaux,
ne sont pas capables de remplir. Cependant, il ne faut
surtout pas que l’état actuel des choses mène à abandonner
le combat électoral », conclut
Chokr
.
Rasha
Hanafy