Blocus
Dr Hicham Mourad
Comme
à son habitude, Israël cherche une échappatoire à l’impasse
dans laquelle il se trouve depuis son agression sanglante
contre la flottille de la Liberté. Soumis aux pressions de
la communauté internationale, l’Etat juif envisagerait, sans
céder sur le principe même de l’embargo, d’alléger le blocus
imposé à la bande de Gaza depuis 2006.
Même s’ils ont fait en
sorte que le Conseil de sécurité de l’Onu s’abstienne de
stigmatiser Israël dans sa déclaration condamnant les pertes
en vies humaines occasionnées par l’attaque commando, les
Etats-Unis, le principal allié de Tel-Aviv, ont dénoncé les
conséquences humaines du blocus pour le million et demi de
Palestiniens entassés dans l’étroite bande côtière.
L’incident tragique a
incité la plupart des alliés d’Israël à revoir leur
position. Ils estiment désormais que le blocus de Gaza cause
un préjudice injustifié aux Palestiniens et aurait in fine
plus bénéficié que nui au mouvement islamiste du Hamas, qui
y tient les rênes du pouvoir depuis 2007. Ces alliés
iront-ils cependant plus loin que les simples condamnations
verbales de circonstance ?
Aurait-il fallu que
survienne cet épisode tragique de l’attaque israélienne
meurtrière contre des humanitaires pour que les alliés de
l’Etat hébreu se rendent enfin compte des conditions
inhumaines dans lesquelles vit la population de Gaza depuis
quatre ans ? Ces alliés auraient-ils ignoré que près de 80 %
des Gazaouis dépendent de l’aide étrangère et qu’en raison
des nombreuses limitations imposées par Israël à l’entrée
des marchandises, en particulier les matériaux de
construction, les habitants de Gaza n’ont d’autres moyens
que de faire passer l’essentiel des marchandises, qui
s’échangent à des prix supérieurs à la période pré-blocus,
par les tunnels de contrebande creusés par des ouvriers au
péril de leur vie sous la frontière avec l’Egypte ? Les
chiffres du drame sont implacables : selon un récent rapport
de l’Onu, seuls 25 % des dégâts causés par l’agression
d’Israël contre la bande de Gaza, en décembre 2008-janvier
2009, ont été réparés. Très peu d’habitations parmi les 6
000 gravement endommagées ou détruites ont été réparées,
faute de matériaux. Les services essentiels sont
inappropriés, l’économie est en lambeaux et les principales
infrastructures se détériorent. Israël, avec la
compréhension complice des ses alliés, ne cesse d’évoquer sa
sécurité pour justifier toute sorte d’agression contre les
Palestiniens et ceux qui les soutiennent. Qui, parmi les
alliés de Tel-Aviv, se souvient aujourd’hui des 1 400 civils
palestiniens sacrifiés sur l’autel de la sécurité d’Israël,
lors de l’offensive « Plomb durci » ? Et qui, parmi eux, se
préoccupe réellement du sort d’un million et demi de
Palestiniens, mis sous les verrous par Israël dans la bande
de Gaza ?
L’an dernier, le Conseil
des droits de l’Homme de l’Onu avait mandaté le juge Richard
Goldstone pour enquêter sur l’offensive israélienne à Gaza.
Tel-Aviv a refusé de coopérer avec cette commission
d’enquête qui, dans ses conclusions, a accusé Israël d’avoir
commis des crimes de guerre et recommandé la saisine de la
Cour pénale internationale si l’Etat hébreu refusait
d’ouvrir une enquête « crédible ». Israël cherche
aujourd’hui, comme il l’avait fait hier, à se dérober par
des moyens dilatoires à ses obligations. Mais pour combien
de temps ?