Une
bombe peut en
cacher une
autre …
Richard Labévière
Quelque
36 chefs d’Etat et de
gouvernement,
ainsi que
dix autres
délégations
étrangères se sont
pressés, les 12 et 13
avril
derniers, autour d’un
Barack
Obama rayonnant,
à
l’ouverture des travaux
de « son » sommet
sur la
sécurité nucléaire. Le
président
américain a transformé
Washington en capitale
du monde pour
une
rencontre
internationale — sans
précédent — destinée
à « conjurer le
spectre
d’attentats nucléaires
terroristes ».
Précédent la
conférence de
réexamen du
Traité de non-prolifération
nucléaire de la mi-mai,
cet
activisme
nucléaire est, sans
conteste,
destiné à
compenser les
revers de
politique étrangère
enregistrés par la nouvelle
administration américaine
depuis son entrée en
fonction
officielle le 20 janvier
2009.
Accumulés
au Proche-Orient, en
Afrique, en
Asie et en Amérique
latine, ces
revers,
ajoutés à un
désintérêt
marqué pour l’Europe,
réclamaient la
mise en
chantier d’une nouvelle
initiative globale.
Comme son
prédécesseur George Bush,
l’actuel président
américain
nous a refait le coup
du
terrorisme global/menace
planétaire. Envers et
contre
toutes les expertises les
plus sérieuses
tendant à
minimiser la menace
du
terrorisme nucléaire,
il n’a
pas ménagé
ses efforts pour dramatiser
le dossier et chercher
à
convaincre les participants que
la perspective de « bombes sales »
tombant aux mains
d’organisations comme Al-Qaëda
« est
aujourd’hui le plus grand danger
menaçant la sécurité
du monde ».
Il en a aussi
profité pour presser la Chine et
la Turquie,
membres du
Conseil de
sécurité des Nations-Unies,
de rejoindre le
principe de
nouvelles sanctions contre
l’Iran. Et
comme le « business » n’est
jamais
complètement absent des orientations
diplomatiques de la
Maison Blanche, les experts
ont bien
travaillé à
produire de
la norme
internationale destinée
à favoriser
les exportations du
nucléaire civil
américain.
Enfin,
le président
américain a
appelé toutes les nations
— incluant
Israël — à signer le
Traité de Non-Prolifération
(TNP).
Selon un
haut fonctionnaire de
l’Agence
Internationale de l’Energie
Atomique (AIEA),
deux
résolutions seront
présentées
à la prochaine
conférence
générale d’examen
du TNP,
entre les 3 et 28 mai
prochain. La première
réclamera la
création
d’une zone libre
d’armes
nucléaires au Proche-Orient,
la seconde
pointera la capacité
nucléaire
israélienne, Etat non
signataire
du TNP. D’ores
et déjà
boycottant ces
travaux, Tel-Aviv a
aussitôt
opposé une fin de non-recevoir.
Le 15 avril, le
ministre
israélien de la Défense,
Ehud Barak,
a affirmé
: « Israël
maintient
une politique
d’ambiguïté
nucléaire, à savoir de
refuser de confirmer
ou de nier
sa capacité.
Des spécialistes
étrangers
estiment que le pays a
produit du
plutonium suffisant pour
propulser
jusqu’à 200 ogives.
Israël
déclare qu’il
considérera un
accord pour
démanteler les armes de
destruction massive au Moyen-Orient
une fois
que la
région sera parvenue
à la paix
complète ».
Plusieurs
sources israéliennes
estiment
aujourd’hui que le
nombre de
têtes nucléaires
israéliennes
oscille
entre 300 et 400. Tel-Aviv
dispose aussi de
vecteurs de
lancement très
performants
dont une
cinquantaine de
chasseurs-bombardiers américains
de dernière
génération, ajoutée
à une
vieille
flotte d’une
centaine de F-15/I et F-16/I.
L’arsenal
israélien compte
également
une centaine de missiles
Jéricho 2 et
quatre
sous-marins lanceurs
d’engins
capables d’atteindre les
capitales de
toute la
région, y compris les
grandes
villes iraniennes.
Tel-Aviv a négocié avec New
Delhi une
autorisation permanente
d’escale pour
ses
sous-marins dans le port
militaire de Bombay,
confortant
l’idée qu’Israël
est bien
décidé à
conduire des
opérations
à l’encontre de
l’Iran.
Dernièrement,
l’état-major
israélien a
engagé un important
programme de
modernisation de
ses
capacités nucléaires.
A l’instar
du
Pentagone, il
s’est lancé
dans
l’expérimentation de mini-bombes
atomiques destinées
à des
attaques très
ciblées,
afin de détruire, par
exemple, des
centres de
pouvoir ennemis
ou des infrastructures
militaires
inattaquables autrement.
Sans renoncer
à
sa
stratégie classique de
dissuasion — stratégie de non-emploi
— Tel-Aviv envisage désormais de
nouvelles postures
opérationnelles,
dont le
recours offensif
à l’arme
atomique. On
comprend
bien, dans
ces conditions,
pourquoi
Israël n’envisage pas de
signer le TNP. On comprend
mieux
pourquoi il
continue à
violer allègrement la
législation
internationale. Au moment même
où le
Conseil de sécurité
prépare de
nouvelles sanctions contre
l’Iran,
Israël peut
poursuivre — en
toute
impunité —
ses incursions
meurtrières dans les
territoires
palestiniens, son « Mur
de la honte »,
ses
déplacements de populations et la construction de
ses
nouvelles colonies. Avec la
complicité de la communauté
internationale,
Israël peut
parachever
l’extermination de tout un
peuple …
Au
sein des Nations-Unies,
tous les
Etat-membres sont
égaux, mais
— comme pour les
animaux de la
ferme de George Orwell —, «
certains
sont plus égaux
que
d’autres … ».