Lacs du Nord .
Attendus de longue date, les résultats du programme
d’observation environnementale viennent d’être publiés par
le ministère de l’Environnement. Leurs conclusions sont
cependant critiquées.
Un pas dans la bonne direction
Mieux
vaut tard que jamais. Après les appels répétés des
écologistes, des ONG et des scientifiques pour aller au
secours des lacs naturels en Egypte en général, et ceux du
Nord en particulier, le ministère d’Etat à l’Environnement
se lance dans un programme portant sur l’observation
environnementale de ces ressources naturelles. Le ministère,
représenté par l’Agence Egyptienne pour les Affaires de
l’Environnement (AEAE), en coopération avec l’Institut
national de l’océanographie et des pêcheries à Alexandrie,
vient de publier le rapport annuel de la première phase de
ce programme qui porte essentiellement sur les lacs du nord
(Borollos,
Manzala, Edko,
Bardawil et Mariout). Objectif :
évaluer la situation écologique de ces lacs, afin de créer
une base de données nécessaire pour leur gestion complète et
leur développement durable. Inutile de préciser qu’un
programme pareil ne pourrait pas aider à évaluer le degré de
pollution de chaque lac, afin de guider les responsables et
les services gouvernementaux qui devraient mettre un terme à
la dégradation sur le plan écologique d’une source naturelle
importante pour la production de poissons en Egypte. « Les
résultats de ce programme ont montré une variété du taux de
salinité de l’eau de ces lacs. Les niveaux d’oxygène dissous
dans l’eau est dans les limites reconnues sur le plan
mondial (5 milligrammes/litre). Les matières organiques et
solides sont minimes dans ces lacs, ce qui est considéré
comme une preuve d’absence de pollution industrielle et
domestique. En général, ces matières ne constituent pas de
danger. Actuellement, des mesures sont prises visant à
conformer la qualité des eaux usées versées dans chaque lac
avec les critères environnementaux. Aussi les résultats
ont-ils montré l’existence de petites quantités de
pesticides. Ce qui n’influence aucunement la qualité de
l’eau dans ces lacs », comme l’ont mentionné les initiateurs
de ce rapport. D’ailleurs, ces derniers ont laissé entendre
que les lacs aujourd’hui ne souffrent que de peu de
problèmes écologiques. Ils ont affirmé : « Si ce rapport a
porté sur les résultats de plusieurs visites durant
différentes périodes de l’année 2009-2010, il y a d’autres
visites qui auront lieu dans les prochaines phases du
programme, afin de parvenir à une base de données complète à
la disposition de tous les chercheurs ».
Bien que la conclusion de ce rapport annuel soit en fin de
compte optimiste par rapport aux problèmes écologiques dont
souffrent les lacs du nord de l’Egypte, des chercheurs ont
mis en cause ces résultats et même les facteurs
scientifiques sur lesquels ils se sont basés.
Base de données mise en doute
Les lacs naturels en Egypte sont considérés comme une ligne
de protection, parce que 80 % des polluants y sont jetés,
selon les instances de recherche pertinentes. Vu la
pollution des eaux du drainage sanitaire, industriel et
agricole, beaucoup de lacs ont atteint un niveau dangereux.
Et vu qu’il existe plusieurs départements gouvernementaux
responsables de plusieurs domaines et activités dans chaque
lac, une coordination au niveau de la coopération
scientifique est primordiale dans l’avenir, afin de sauver
ces ressources naturelles. « On doit admettre que les
responsables ont agi tardivement pour régler la situation
écologique des lacs du nord. Mais même s’il y a des
programmes en cours, pour diminuer au maximum la pollution
dans les lacs, il doit y avoir des taux plus précis, afin de
parvenir à construire une vraie base de données. Cela exige
des laboratoires pour l’observation régulière de l’eau des
lacs et une coordination de haut niveau entre tous les
centres de recherches et les instances concernées, afin de
diminuer le pourcentage d’erreurs. Je peux citer à cet égard
l’Institut national de l’océanographie et des pêcheries, le
Centre national des recherches, le Centre national pour les
recherches hydrauliques relevant du ministère des Ressources
hydrauliques et de l’Irrigation, le laboratoire central
relevant du ministère de l’Agriculture et de la Bonification
des terres », explique Mohamed Borhan,
spécialiste international de l’environnement et directeur du
projet de l’adaptation du Delta du Nil aux changements
climatiques relevant du Programme des Nations-Unies pour le
développement. Et de préciser : « Les facteurs sur lesquels
le rapport s’est basé sont variables. Il est donc difficile
de mesurer le degré de pollution. Il fallait plutôt
travailler sur les êtres vivants qui se trouvent dans l’eau
et les sédiments des lacs. Les responsables de ce programme
devraient prendre des échantillons des différents secteurs
des lacs et non seulement des zones dans lesquelles sont
jetées les eaux usées ».
Le fait que le rapport ait mis les cinq lacs dans un seul
panier a été également critiqué. « Le lac
Bardawil possède un état
écologique meilleur que les autres lacs du nord : il n’y a
ni de drainage qui s’y jette ni de grande population.
Edko,
Borollos et Manzala ont
des accès sur la Méditerranée et donc l’eau est renouvelée
malgré le taux élevé de pollution. Le lac Mariout est
complètement fermé et il souffre d’un vrai problème
écologique. Je ne veux pas être pessimiste, mais je pense
qu’avec une telle situation, les solutions pour diminuer la
dégradation de l’environnement et réaliser un développement
durable dans la majorité des lacs du nord ne sont pas
réalisables », indique Wahid
Moufaddal, chercheur à
l’Institut national de l’océanographie et des pêcheries à
Alexandrie.
Des critiques qui devraient être prises en considération si
les responsables veulent bien sauver les lacs naturels au
Nord de l’Egypte face à tous les défis dont ils souffrent,
et pour préserver ce qui reste de ces sources naturelles.
Racha
Hanafi