Palestine.
Tel-Aviv a réussi à rallier Washington à sa cause pour que
l’Autorité reprenne les négociations sans l’arrêt de la
colonisation. Une option irrecevable pour les Palestiniens.
Obama
cède à la pression israélienne
En
se déclarant prêt à reprendre les pourparlers de paix « sans
conditions », Israël n’a en fait entrepris qu’une
machination aux objectifs bien vils : tenir la vedette en
passant pour la partie qui appelle au retour à la table des
négociations et mettre les Palestiniens sous le feu des
critiques, puisque ce sont eux qui le refusent. Une tactique
bien connue. En effet, les Israéliens feignent d’appeler à
une reprise des négociations, en réalité, ils ne font que
maintenir leur intransigeance sans céder d’un pouce. Or, ce
qui est nouveau cette fois-ci, c’est que Tel-Aviv a rallié
Washington à son point de vue. Une position nouvelle de la
part de l’administration de Barack Obama, qui, depuis son
arrivée au pouvoir en janvier dernier, s’était montré plus
modéré que son prédécesseur et avait appelé, dans un premier
temps, à l’arrêt des activités de colonisation. « Je veux
voir les deux parties commencer les négociations dès que
possible » et sans conditions, a dit la secrétaire d’Etat
américaine, Hillary Clinton, qui a effectué une visite en
Israël en début de semaine et pour qui les propositions du
premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, sur une «
limitation » de la colonisation sont « sans précédent ».
Elle faisait référence à la proposition israélienne de ne
pas construire de nouvelles colonies en Cisjordanie.
Voilà
donc un véritable retour en arrière puisque l’administration
américaine exigeait jusqu’ici qu’Israël gèle totalement la
colonisation avant le redémarrage des pourparlers de paix.
Ce volte-face américain est évidemment un triomphe pour les
Israéliens, triomphe que ces derniers n’ont pas manqué de
savourer. « La preuve est faite que les Etats-Unis sont nos
meilleurs amis et que l’attitude ferme d’Israël sur ses
positions est payante », a déclaré dimanche le vice-ministre
israélien des Affaires étrangères, Danny Ayalon, sur les
ondes de la radio publique israélienne.
Le fossé
s’élargit
Cependant, côté palestinien, la réponse est tout simplement
« non ». « Faire pression sur les Palestiniens pour qu’ils
fassent davantage de concessions afin d’accommoder
l’intransigeance d’Israël n’est pas la réponse », a souligné
le négociateur en chef palestinien, Saëb Erakat, dans un
communiqué au ton tranchant. Et de lancer : « Les
Palestiniens ne peuvent accepter la poursuite de la
construction des colonies ou la colonisation de la terre
palestinienne en violation des lois internationales »,
précisant que depuis 2003 le nombre de colons israéliens en
Cisjordanie a augmenté de 17 %. M. Erakat a également estimé
que le processus de paix est « à un tournant critique » en
raison du refus d’Israël de « répondre à ses obligations »
de gel total de la colonisation en Cisjordanie occupée. La
veille, le président palestinien, Mahmoud Abbass, avait déjà
rejeté la demande de la secrétaire d’Etat américaine et son
porte-parole, Nabil Abou-Roudeina, avait estimé que
l’Autorité est prête « pour les négociations sur une base
claire qui est l’arrêt total et complet de la colonisation
».
Les
Palestiniens sont appuyés par les Arabes dans cette
position. « S’il n’y a pas de gel des colonisations (...),
quel est le but de (nouvelles) négociations ? Ce n’est pas
sérieux », a affirmé le secrétaire général de la Ligue arabe,
Amr Moussa, au cours d’une conférence de presse en marge
d’une conférence sur la gouvernance mondiale organisée à
Marrakech (Maroc) par l’Institut Français des Relations
Internationales (IFRI) et à laquelle assiste également Mme
Clinton. « S’ils (les Israéliens) veulent continuer à agir
de la sorte, en contradiction avec les lois internationales,
alors il ne peut y avoir de normalisation » des relations
entre Israël et les Palestiniens, a souligné Amr Moussa, qui
s’est aussi demandé : « Pourquoi (les Israéliens)
changent-ils la composition démographique, le caractère
géographique (des territoires occupés), pourquoi
expulsent-ils des gens de chez eux ? (...) Vous trouvez que
ça constitue un prélude à la paix ou un environnement qui
pourrait nous conduire à une paix juste ? ».
Avec ces
nouveaux développements, on ne peut que constater que le
fossé entre les deux parties s’élargit de plus en plus.
Depuis l’arrêt des négociations israélo-palestiniennes en
janvier dernier suite à l’offensive israélienne contre la
bande de Gaza, la question de la colonisation constitue la
principale pierre d’achoppement. Les Palestiniens avaient
espéré dans un premier temps que les pressions américaines
sur Israël permettraient un gel de la colonisation et un
retour aux pourparlers. Or, la vérité s’est avérée tout
autre : les pressions sont allées dans l’autre sens et c’est
Washington qui a fini par céder. De quoi susciter la
satisfaction, sinon la jubilation, des Israéliens et la
désolation mêlée d’impuissance des Palestiniens.
Abir
Taleb