Palestine.
Alors que l’affaire Goldstone met à mal l’Autorité
palestinienne, le Hamas, lui, marque un point avec la
libération des prisonnières palestiniennes.
Le
Hamas, grand gagnant
En
concluant ce marché — une vidéo prouvant que le soldat
israélien Gilad Shalit est en vie contre la libération de 19
Palestiniennes —, le Hamas a marqué un point précieux face à
Israël et à ses rivaux de l’Autorité palestinienne. Depuis
la capture du soldat à la lisière de la bande de Gaza, en
juin 2006, c’est un des rares succès dont peut se prévaloir
le mouvement islamiste qui a évincé l’Autorité palestinienne
de ce territoire en juin 2007. Certes, le Hamas n’a réussi
ni à desserrer le blocus israélien imposé après ce coup de
force, ni à opposer une résistance sérieuse aux offensives
militaires israéliennes, ni à acquérir une légitimité
internationale, restant considéré comme « organisation
terroriste » par les Etats-Unis et l’Union européenne. Mais
il peut se targuer d’avoir permis à des Palestiniennes de
recouvrer la liberté sans la moindre contrepartie politique
et ce grâce à la lutte armée. « C’est évidemment un gain
important pour le Hamas. En fin de compte, il a pu obtenir
ces libérations contre rien. Ce n’est qu’une preuve que
Shalit est vivant que le Hamas a donnée. Ce n’est pas une
concession pour le mouvement, au contraire, c’est un point
positif. La preuve de vie du soldat israélien va servir son
ultime objectif, à savoir l’échange d’un nombre important de
prisonniers palestiniens contre la libération de Shalit. Ce
qui était l’objectif originel de la capture de ce dernier »,
estime le docteur Hicham Ahmad, professeur de sciences
politiques à l’Université du Caire.
En effet,
depuis sa capture en 2006, de nombreux doutes planaient sur
la mort de Shalit. Aujourd’hui, avec cette nouvelle preuve,
les négociations sur l’échange de prisonniers vont être
ranimées. Et le Hamas pourra obtenir de nouvelles
libérations et de nouveaux gains.
Sur le
plan des luttes internes également, le Hamas marque un
point. Avec ce marché, il gagne en popularité auprès de
l’opinion publique palestinienne. C’est le Hamas qui est
parvenu à obtenir cette libération, considérée comme une
concession israélienne et non l’Autorité palestinienne, qui,
de son côté, multiplie les concessions sans rien obtenir en
retour. Voilà ce que pensent aujourd’hui les Palestiniens.
Il est
vrai que dans le passé, Israël a relâché des prisonniers en
gage de bonne volonté envers l’Autorité palestinienne de
Mahmoud Abbass, son partenaire dans les négociations de paix.
Mais cette fois-ci, les négociations se sont faites avec le
Hamas. C’est là le gain le plus important. Le mouvement
islamiste s’impose de facto ainsi comme un interlocuteur
incontournable, alors qu’Israël a jusque-là refusé toute
négociation avec lui.
Aussi, «
le Hamas veut se présenter avec une image de modéré, en
acceptant également le projet de réconciliation avec le
Fatah proposé par les Egyptiens. Il veut prouver qu’il ne
fait pas obstruction aux tentatives de réconciliation
nationale, alors que le Fatah, Israël et les Etats-Unis ont
toujours voulu véhiculer cette image », analyse le Dr Hicham
Ahmad.
Toute
une stratégie qui va bien au-delà de l’affaire des
prisonniers politiques. On se retrouve désormais en pleine
campagne préélectorale, en prévision des élections générales
de 2010. Le Hamas opte pour des concessions à moyen terme en
vue d’un objectif à plus long terme : évincer le président
Mahmoud Abbass lors des prochaines élections, ou au moins
garder un poids politique capital et influent.
Abir
Taleb