Al-Ahram Hebdo, Dossier | L'exemple kosovar
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Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
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 Semaine du 5 au 11 Mars 2008, numéro 704

 

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Dossier

Palestine. L’indépendance autoproclamée du Kosovo a soulevé la question de savoir pourquoi les Palestiniens ne feraient pas de même face à l’arbitraire israélien. Enquête.

L'exemple kosovar

C’était une nuit du printemps 1988. L’Intifada des pierres avait éclaté en Cisjordanie, Yasser Arafat, condamné à l’exil, était à Alger, le Conseil national palestinien se réunit et publie un communiqué dans lequel il annonce, qu’« au nom de Dieu et du peuple arabe palestinien, il proclame l’établissement de l’Etat arabe de Palestine sur notre terre palestinienne, avec pour capitale Jérusalem, Al-Qods Al-Charif ». Le document rappelait une résolution qui aurait été refoulée au fin fond de l’histoire ou omise de la mémoire collective de presque toute la communauté internationale. La résolution sur le partage de la Palestine et qui, en légitimant la création de l’Etat d’Israël, exige la création d’un Etat pour les Arabes. (Lire fiche). Le premier a bien émergé mais le second n’a pas encore vu le jour, plus de 60 ans après. La déclaration de 1988 restera à cet égard symbolique pour la communauté internationale, une détermination pour les Palestiniens et un rêve qui ne sera jamais réalisé aux yeux des Israéliens. Jusqu’à presque son dernier souffle, Abou-Ammar n’a cessé d’affirmer : « Nous marcherons ensemble, jusqu’à l’établissement d’un Etat palestinien indépendant, avec pour capitale Jérusalem ». Jamais épuisé ou déçu de le répéter en dépit des déclarations israéliennes comme celle de Benyamin Netanyahu : « Vous pouvez en rêver chaque nuit, mais, au matin, vous vous réveillerez toujours et constaterez qu’il n’y a pas d’Etat palestinien. Il n’y en a pas et il n’y en aura pas ».

Arafat ne renonce pourtant pas à sa conviction. Après lui, les Palestiniens non plus. Une fois l’indépendance du Kosovo déclarée, le rêve a été ressuscité. « Nous voulons aujourd’hui annoncer unilatéralement notre autonomie sur le terrain, par des moyens pacifistes, et appelons notre peuple à protéger son Etat, ses frontières, ses institutions et l’avenir de ses enfants », lance Yasser Abd-Rabbo, secrétaire général du comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine. Des déclarations qui ont sûrement été lancées avec de grandes émotions de la part de ce dirigeant palestinien qui rêve de faire ce que les Kosovars ont fait. Il a profité de l’occasion de l’indépendance du Kosovo pour inviter le peuple palestinien à imiter le nouvel Etat européen autoproclamé, en déclarant unilatéralement son  indépendance. « Notre peuple a le droit de proclamer sa souveraineté comme l’a fait celui du Kosovo ... Nous avons été occupés bien avant que le problème de cet Etat ne surgisse », a déclaré Yasser Abd-Rabbo, influent membre de l’Organisation de libération de la Palestine.

Mais l’exemple kosovar ne semble pas trop inspirer les dirigeants de l’Autorité palestinienne à l’exception de Abd-Rabbo. Le président palestinien Mahmoud Abbass s’est tout de suite démarqué de cette prise de position, affirmant qu’il entendait pour sa part poursuivre les négociations avec Israël pour parvenir à la création d’un Etat palestinien. Et si cela s’avère impossible ? « Si nous aboutissons à une impasse, nous nous en référerons à la nation arabe pour que la décision qui s’impose soit prise au plus haut niveau », a encore lancé Abou-Mazen.

Mais si l’on ne peut pas qualifier la situation actuelle d’impasse, comment peut-on la décrire ? Voilà 30 ans que les Arabes négocient, depuis les accords de Camp David, et 17 ans depuis Oslo et les négociations ont bel et bien achoppé. Alors que pour le Kosovo, les pourparlers n’ont duré que 9 ans avant que les Etats-Unis ne jettent l’éponge et l’acceptent. Ce parallèle établi par Abd-Rabbo a pourtant bien surpris les Américains qui se sont précipités à le rejeter sous prétexte que les deux cas sont assez distincts.

« Les négociations au Proche-Orient peuvent encore donner des résultats alors que celles sur le Kosovo n’offraient plus d’espoir », comme l’a expliqué le porte-parole du département d’Etat, Sean McCormack. Justification pas logique même si beaucoup de différences sont à dégager entre le cas kosovar et le cas palestinien.

Même si ces deux parties ont toutes les deux vécu des guerres sanglantes et destructives, le parallèle est difficile à établir, sur le fond au moins.

 

Une comparaison difficile ?

La nature de chaque cas impose ses règles. Sans aucun doute, la question palestinienne n’est pas celle d’une minorité ethnique qui cherche ses droits comme le sont les Kosovars, mais il s’agit d’un peuple dont les territoires ont été violés et qu’il essaye de récupérer. Le politologue Saïd Okacha précise ainsi que le problème avec les Palestiniens c’est qu’ils luttent essentiellement pour la terre, pour un tracé des frontières de leur futur Etat. En effet, Israël n’a jamais fixé ses propres frontières alors que l’« Etat de Palestine », lui, l’a fait. Il revendique la partie de la Palestine occupée par Israël en 1967. Aujourd’hui, nul ne remet en cause la souveraineté de l’éventuel Etat de Palestine sur la Cisjordanie et la bande de Gaza.

Le cas du Kosovo est autre, la province ex-yougoslave est bien définie géographiquement et l’indépendance recherchée est plutôt politique. Il n’y a pas de conflit de terre entre les Serbes, les Croates et les Kosovars alors qu’avec les Palestiniens, il s’agit d’un seul territoire, d’une occupation et de répartition de terre. Du coup, les Kosovars se sont accordés sur plusieurs plans pour parvenir d’une manière ou d’une autre à leur indépendance alors que les Palestiniens sont obligés soit de suivre cette stratégie de négociation avec les Israéliens, soit d’entamer une lutte armée. Même s’il a été confirmé par une résolution de l’Onu, le sort de cet Etat palestinien reste ainsi intimement lié à une acceptation de la part d’Israël. En d’autres termes, l’indépendance est tributaire de la fin de l’occupation.

Effectivement, c’est uniquement en se débarrassant du lourd fardeau de l’occupation que les Etats de l’ex-Yougoslavie ont pu proclamer, au départ, une sorte de souveraineté et exiger par la suite une indépendance en bonne et due forme. La Serbie, qui refusait toujours toutes les revendications d’indépendance des anciennes entités yougoslaves, n’a pas hésité à mener des conflits et des guerres sanglantes pour maintenir son emprise sur elles. Mais la volonté de séparation a été plus forte, une volonté née surtout d’une expérience d’union imposée, durant laquelle ces provinces ont vécu toutes sortes d’injustices (lire page 5). En outre, elles répondaient plus ou moins aux critères juridiques selon lesquels l’indépendance d’un Etat est définie. En effet, outre l’établissement de relations diplomatiques, « quatre critères définissent un Etat souverain à savoir : l’existence d’un territoire déterminé, dont nul autre ne revendique la souveraineté ; la présence permanente d’une population ; le contrôle effectif de ce territoire et de cette population ; la volonté et la capacité de satisfaire ses obligations envers la communauté internationale et de remplir les clauses d’un traité », écrit John V. Whitbeck dans le Monde diplomatique. De quoi démontrer qu’en dépit de certaines différences, l’exemple kosovar peut inspirer les Palestiniens.

Car si on se réfère à ces critères, « l’Etat palestinien n’est pas moins légitime que l’Etat juif. Seul manquait, du moins jusque récemment, le dernier critère : le contrôle effectif des territoires et de la population ». En 1988, lorsqu’Abou-Ammar proclame l’Etat palestinien, Gaza et la Cisjordanie étaient sous occupation, « mais les accords d’Oslo ont modifié la situation. Démocratiquement élu et assuré du soutien de la communauté internationale, le pouvoir palestinien contrôle effectivement — avec ses institutions législatives, exécutives et juridiques — une partie du territoire palestinien où réside la majorité de la population palestinienne. Même les Etats-Unis et les pays européens qui n’ont pas établi de liens diplomatiques avec l’Etat palestinien recevaient Yasser Arafat avec les honneurs dus à un chef d’Etat », précise V. Whitbeck. La Palestine a son propre drapeau qui ne manque pas d’être hissé dans les conférences internationales les plus importantes, elle a un ambassadeur aux Nations-Unies et dans plusieurs dizaines de pays.

En chiffres, le Kosovo, qui vient juste de déclarer son indépendance, n’est reconnu que par 17 Etats, alors que l’Etat palestinien, lui, bien que reconnu par 105 pays, continue à être considéré comme non-Etat. Pourquoi l’indépendance des uns est reconnue alors que celle des autres ne l’est pas ?

La réponse est loin d’être compliquée. C’est uniquement les Américains qui décident. C’est Washington qui était derrière la séparation du Timor, elle l’est aussi pour l’indépendance du Kosovo. Selon Saïd Okacha, « la communauté internationale n’osera jamais prendre ce pas et adopter une mesure contre le gré des Israéliens et certes des Américains ».

Essentiellement donc, tout est basé sur le principe d’intérêt entre les Etats. En reconnaissant l’indépendance du Kosovo, Washington envoie un message à la Russie. Il voudrait contourner son influence dans cette région. En effet, le ton monte entre Américains et Russes. Le Kosovo n’est dans ce contexte qu’une carte du jeu.

Et pour l’instant, les Etats-Unis sont loin de jouer avec la carte palestinienne. Les Arabes ne semblent leur offrir aucune contrepartie. Voire, ils les considèrent comme des Etats peu développés et source de terrorisme. Ils n’ont pas hésité à occuper un de leur pays, l’Iraq, à menacer un autre, la Syrie. Un bâtiment de guerre l’USS Cole n’est-il pas au large du Liban sans l’autorisation de celui-ci ? Même leurs alliés, l’Arabie saoudite et l’Egypte, en l’occurrence, n’ont pas grâce à leurs yeux. Pour eux, Israël est donc un allié plus que stratégique. L’exemple du Kosovo est donc à écarter pour l’Amérique en attendant ce que décidera Tel-Aviv.

Chaïmaa Abdel-Hamid

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Résolution 181 sur le partage de la Palestine

Le 29 novembre 1947, le plan de partage de la Palestine est approuvé par l’Assemblée générale de l’Onu, à New York, comme la résolution 181 de l’Assemblée générale. Ce plan propose, après fin du mandat britannique, le partage de ce territoire entre deux Etats, l’un juif, l’autre arabe, avec Jérusalem sous contrôle international.

La résolution a été adoptée par 33 voix (dont les Etats-Unis et l’URSS), contre 13 voix opposées et 10 absentions (dont la Grande-Bretagne).

Elle exige 14 000 kilomètres carrés, avec 558 000 juifs et 405 000 Arabes pour l’Etat juif, 11 500 kilomètres carrés, avec 804 000 Arabes et 10 000 juifs pour l’Etat arabe. Et pour la zone internationale qui comprend les Lieux saints, Jérusalem et Bethléem : 106 000 Arabes et 100 000 juifs.

 

 




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