Palestine.
La fin de trêve entre Israël et le Hamas a été marquée par
une reprise de la violence et des menaces de part et d’autre
d’une intensification des opérations au risque de mettre le
feu aux poudres.
Escalade dangereuse
Aussitôt
terminée, la trêve entre le mouvement islamiste Hamas et
Israël a laissé place à des violences susceptibles de
prendre de l’ampleur dans les jours et les semaines à venir.
Après six mois de calme relatif dans la bande de Gaza, cette
région risque de s’embraser. Aucune des deux parties ne
semble en effet à l’heure actuelle calmer le jeu. Au
contraire, le ton monte de part et d’autre. Le Hamas, qui
contrôle la bande de Gaza, a menacé lundi de reprendre les
attentats suicide en Israël, face aux menaces d’opérations
israéliennes d’envergure dans ce territoire palestinien. «
Nous ne resterons pas les bras croisés face à l’agression
israélienne. Il est de notre droit en tant que peuple occupé
de nous défendre et de combattre l’occupation par tous les
moyens possibles, y compris les opérations suicide », a
affirmé à l’AFP Aymane Taha, un responsable du mouvement. «
La résistance par tous les moyens est (un droit) légitime
face à l’occupation et la poursuite des agressions. Nous
disposons de tous les moyens, y compris des opérations
suicide », a-t-il ajouté.
Cette mise en garde du Hamas intervient après que de
nombreux responsables israéliens eurent menacé de lancer des
opérations d’envergure dans la bande de Gaza. La dirigeante
du parti Kadima (centriste, au pouvoir en Israël), la
ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, est allée
jusqu’à prôner le renversement du Hamas et exigé qu’« Israël
rétablisse son pouvoir de dissuasion ». « Israël doit faire
tomber le pouvoir du Hamas et un gouvernement sous ma
direction le fera », a-t-elle fustigé.
Une menace bien directe et dont les conséquences risquent
d’être graves. Les autorités israéliennes ont donc pris leur
décision : le Hamas sera frappé. Mais selon de hauts
responsables de la Défense, Tel-Aviv doit encore décider du
moment opportun et de l’ampleur de sa riposte. « Pour
frapper, il faut se préparer soigneusement, comme pour une
opération chirurgicale », a déclaré le général de réserve
Amos Gilad, principal conseiller du ministre de la Défense,
Ehud Barak. M. Gilad a relevé le risque qu’une opération
israélienne à grande échelle ne fasse des victimes
innocentes et que le blâme n’en retombe sur Israël. Un autre
responsable israélien de la Défense a jugé une confrontation
entre l’Etat hébreu et le Hamas « inéluctable », en dépit
des appels au calme de la communauté internationale. « Le
chemin que nous empruntons concernant Gaza est évident. La
situation est à la fois intolérable et limpide. Les
considérations de l’armée sont les seules à décider du
moment où les événements se produiront », a-t-il affirmé à
l’AFP.
De son côté, le gouvernement israélien de transition a
débattu dimanche, lors de sa réunion hebdomadaire, de
l’attitude à adopter face au Hamas, deux jours après
l’expiration de la trêve. En marge de la réunion du cabinet,
plusieurs ministres ont réclamé des ripostes bien plus
sévères, faisant craindre un embrasement. Plus prudent que
sa ministre des Affaires étrangères, le premier ministre,
Ehud Olmert, qui quittera ses fonctions à l’issue des
législatives du 10 février, a déclaré au cabinet : « Un
gouvernement responsable n’est pas impatient à l’idée de
déclencher une guerre, mais ne l’évite pas non plus. En
conséquence, nous prendrons les mesures appropriées ».
Sur le terrain, une vingtaine de roquettes et d’obus de
mortiers ont été tirés dimanche par les groupes armés
palestiniens de Gaza, selon un porte-parole militaire
israélien. Dans la soirée du dimanche, l’aviation
israélienne a effectué un raid à l’est de la ville de Gaza
en visant, selon elle, « deux lance-roquettes prêts à
l’usage ». D’autre part, des témoins palestiniens ont
indiqué qu’une unité de l’armée israélienne a effectué
dimanche une incursion limitée dans le sud de la bande de
Gaza, ce qui a été démenti par l’armée israélienne.
La situation a commencé à se détériorer dès l’expiration de
la trêve, vendredi dernier. Le lendemain, Israël a lancé un
premier raid sur la bande de Gaza, tuant un Palestinien et
en blessant trois autres, dont deux grièvement. Parmi ces
Palestiniens, trois appartiennent aux Brigades des martyrs
d’Al-Aqsa, la branche armée du Fatah, le parti du président
palestinien Mahmoud Abbass, ont indiqué des témoins, le
quatrième étant un civil. Dans un communiqué, les Brigades
des martyrs d’Al-Aqsa ont menacé : « Notre réponse ne
tardera pas. Toutes les options sont possibles et la
réaction doit venir de tous les groupes palestiniens ».
De l’autre côté, un porte-parole de l’armée israélienne a
affirmé que dix roquettes tirées de Gaza s’étaient abattues
samedi en Israël, sans faire de victimes. Le Djihad
islamique a revendiqué les tirs de roquettes, tandis que les
Brigades Ezzeddine Al-Qassam, branche armée du Hamas, ont
dit avoir tiré 19 obus contre Israël.
Israël ignore les appels au calme
Mais c’est surtout la mort d’un activiste palestinien tué
samedi par un missile israélien visant la ville de Beit
Lahiya qui a mis le feu aux poudres et qui a entraîné la
région dans un cycle infernal de représailles et
contre-représailles.
Et il semble qu’Israël soit déterminé à aller jusqu’au bout.
L’Etat hébreu a lancé une campagne diplomatique destinée à
justifier à l’avance les opérations que pourrait lancer
l’armée israélienne dans la bande de Gaza. A cet effet, la
ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, a déclaré
avoir l’intention de « convoquer prochainement les
ambassadeurs accrédités en Israël et s’adresser à ses
homologues ». Dans le même temps, lundi, dans une lettre
adressée au secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, la
représentante d’Israël aux Nations-Unies a averti de la
détermination de l’Etat hébreu à réagir aux tirs de
roquettes.
Une façon d’ignorer les appels lancés par la communauté
internationale. En effet, face à cette escalade, le
secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, a de nouveau
exprimé son inquiétude concernant la situation à Gaza et
appelé au rétablissement de la trêve négociée par l’Egypte
et à la fin des violences.
Déjà, à la veille de la rupture de la trêve, l’envoyé
spécial des Nations-Unies pour le Proche-Orient, Robert
Serry, avait mis en garde le Conseil de sécurité de l’Onu
contre les risques d’« une escalade majeure de la violence
qui aurait des conséquences graves » pour la population
civile en Israël et à Gaza. Même inquiétude de la part des
Européens, Paris ayant exprimé vendredi la « plus vive
inquiétude » de l’Union européenne sur la situation à Gaza,
tandis que la Russie, un des rares interlocuteurs du Hamas,
a appelé le mouvement islamiste à revoir sa décision de
mettre fin à la trêve.
Or, si la trêve a été rompue par le Hamas, c’est justement
en raison de la situation dans la bande de Gaza. Entrée en
vigueur le 19 juin après une médiation égyptienne, elle n’a
pas été reconduite, « car l’ennemi sioniste n’a pas respecté
ses conditions », ont affirmé vendredi les Brigades
Ezzeddine Al-Qassam sur leur site Internet. Le Hamas
reproche notamment à Israël de ne pas avoir levé le blocus
de la bande de Gaza, entièrement coupée du monde. Ce blocus,
en vigueur depuis la prise de pouvoir par le Hamas en juin
2007, a été renforcé début novembre, ce qui a aggravé la
situation humanitaire dans cette région où vivent 1,5
million de Palestiniens dans des conditions misérables.
Abir
Taleb