Musique.
L’ensemble marocain Ibn Arabi
fait escale au Caire, animant deux concerts à l’occasion du
Ramadan. Emanation soufie et spiritualisme en perspective.
Fusion d’amour
Sur
scène, ils sont cinq. Ahmed Al-Kheligh
au qanoun (fondateur de la
troupe), Abdellah
Al-Kheligh, à la fois chanteur
et joueur de bendir
(percussion), Oussama
Al-Kheligh à l’alto,
Abdelhouahid
Senhaji au
nay (flûte orientale) et Haroun
Teboul au luth. Chacun porte son instrument et ils
entrent sur scène en uniforme révélateur de leur origine
arabe et marocaine. Des pantalons noirs, des chemises
blanches et des tenues brodées et colorées. Seul, le plus
jeune d’entre eux, Abdellah
porte fièrement la djellaba blanche marocaine.
Ainsi se présente souvent l’ensemble Ibn
Arabi, une troupe musicale qui
puise dans les chants soufis arabo–andalous
et qui va donner au Caire deux concerts pendant le mois du
Ramadan, dans le cadre du Festival de l’Euphrate au
Guadalquivir. Un festival organisé par le Fonds du
développement culturel, l’ambassade d’Espagne et le CFCC et
dont l’objectif est de célébrer le mois saint par des
mélodies arabo-andalouses. Pour
ce faire, ils ont convié le groupe
Musica Antigua qui puise dans la musique médiévale
espagnole (islamique, juive et chrétienne), le luthiste
iraqien Nassir
Chamma qui s’inspire dans
certaines de ses créations de la culture andalouse et
l’ensemble marocain Ibn Arabi.
Un air sacré émane des compositions et des chansons de ce
dernier qui se produira le 24 septembre, à 21h, au Palais
Al-Ghouri dans le
Vieux-Caire et le 25 septembre,
à 21h30, au CFCC avec les musiciens invités du festival dans
une jam-session.
Cette fois-ci, l’ensemble est accompagné du percussionniste
iranien résidant en France, Keyvan
Chemirani, qui ajoutera aux
rythmes de ces soirées religieuses et soufies un air
différent. Originaires de Tanger (Maroc), les membres de la
troupe ont fréquenté dès leur plus jeune âge les chants
soufis de samaa (audition),
propres aux rites de la confrérie
Seddikiya du cheikh Abdel-Aziz
Seddiq, et à laquelle ils sont
encore affiliés.
Pourquoi donc le poète Ibn Arabi
? Parce que l’ensemble puise en fait dans les textes et les
écrits de ce grand maître du soufisme, le cheikh
Al-Akbar
Moheïddine Ibn Arabi
(1165 - 1240). Il traduit son esprit mystique dans la
musique jouée, chante ses vers et ressuscite sur scène une
époque où la culture arabe et musulmane était florissante.
S’ajoute à cela, les poèmes d’autres grandes figures du
soufisme telles : Rabea
Al-Adawiya, Ibn
Al-Farid,
Al-Chuchtari, Al-Harrak,
etc.
Dans L’Amoureux a accepté qu’on le prenne pour un fou, S’Ils
comprenaient les secrets de l’amour de
Leïla, ou Ses Paroles me ressuscitent, les vers
soufis mêlent amour divin et profane. Le chant s’unit aux
airs instrumentaux. Le rythme s’accentue.
Psalmodier le Coran fait partie également du répertoire de
l’ensemble Ibn Arabi. Les
versets coraniques sont récités d’une manière différente.
Là, le chant interprété par la voix de
Abdellah Al-Kheligh tout
seul est basé sur un jeu d’inflexion et de répétition. C’est
le cas avec Al-Hadid (le fer).
Juste les premiers versets de la sourate
Al-Hadid constituent un morceau
mélancolique et touchant de deux minutes.
Les chants de l’éloge de Dieu et de son prophète, évoquant
le monde des derviches sont également au programme. Les
rythmes répétitifs et les rimes des vers qui résonnent
ensemble rappellent le mouvement des derviches tourneurs et
leurs rites dans les séances du zikr
comme Je crois en la religion de l’amour.
Quelques morceaux sont consacrés uniquement au jeu
instrumental. Les membres de l’ensemble se distinguent
chacun lors d’improvisations (taqsim)
au qanoun, au oud, au
nay, etc. Créer un dialogue
entre deux instruments met souvent en évidence l’habileté
des musiciens. A la fois, une certaine entente et une vraie
concurrence.
Dans ses concerts, l’ensemble Ibn Arabi
propose au public un voyage vers un monde spirituel et
nostalgique, évoquant l’amour de Dieu et de son prophète.
May
Sélim