Restauration.
Afin de contrer la disparition de la cité antique d’Abydos,
et notamment de son complexe funéraire, le Conseil suprême
des antiquités lance un vaste projet de réhabilitation qui
devrait durer cinq ans.
La mort aux trousses
La
plus grande et la plus ancienne construction funéraire en
brique crue est en danger et risque de disparaître.
Celle-ci, édifiée par Khasekhemoui, le dernier souverain de
la IIe dynastie (vers 3100 av. J.-C.), est située dans le
gouvernorat de Sohag et est communément nommée par les
actuels habitants Chonet al-zébib (le grenier du raisin
sec). En fait, les vestiges de cette construction sont
toujours dressés. De 12 mètres de haut, cette construction
est pour les experts d’une grande importance archéologique,
architecturale et religieuse mais vu la croissance
démographique, elle risque actuellement de disparaître. Pour
l’éviter, le Conseil Suprême des Antiquités (CSA) a décidé
de la restaurer et de la consolider. « C’est un grand projet
dont le budget atteint près de 10 millions de L.E. Il vise à
restaurer, développer et consolider non seulement le
bâtiment funéraire, mais encore toute la zone antique
d’Abydos », explique Abdel-Hamid Qotb, directeur du
département polytechnique au CSA. Selon lui, la durée prévue
de ce projet est de 5 ans pour ensuite ouvrir la zone à la
visite touristique. En effet, pour Zein Diab, directeur
général des antiquités de Sohag, « la planification des
constructions antiques annexées assure que ce bâtiment fait
partie d’un complexe funéraire composé d’un temple
funéraire, du cimetière d’Oum Al-Guéag qui remonte aux Ire
et IIe dynasties. Temple et nécropole, tous les deux, sont
liés par un chemin montant ». Selon Sabri Abdel-Aziz,
directeur des antiquités égyptiennes au CSA, le complexe
religieux, le chemin montant et les nécropoles d’Oum
Al-Guéag, sont les composants de
la cité antique d’Abydos.
L’importance de cette construction est que l’architecture du
mur de brique crue reflète pour les archéologues l’évolution
de l’Ancien Egyptien durant cette période historique. Le
mur, bien qu’il soit en brique crue, est niché. « C’est
cette architecture qui a consolidé le mur. En même temps,
ces niches jouaient le rôle de fausses portes trouvées dans
les tombes des Ve et VIe dynasties à travers lesquelles le
défunt passe à l’au-delà », explique Abdel-Aziz. Cette
architecture, selon Diab, a été reprise plus tard, mais de
façon plus développée dans le complexe funéraire de Djoser,
fondateur de la IIIe dynastie, à Saqqara.
Trésors méconnus
C’est en fait ce complexe, à la fois religieux et funéraire,
qui a fait d’Abydos un lieu vénéré par l’Ancien Egyptien,
qui s’y rendait en pèlerinage tout au long de l’époque
pharaonique. L’intérêt a dépassé même les simples habitants
pour englober encore les rois qui cherchaient à bâtir leurs
temples dans cette région dans le but de commémorer leurs
noms, ce qui explique la présence, au centre de la cité
antique, des temples de Séthi Ier et son fils Ramsès II,
sans oublier la pyramide d’Ahmosis, vainqueur des Hyksos et
fondateur de la XVIIIe dynastie. L’antique Abydos comprend
en fait beaucoup de trésors, peu connus même pour les
spécialistes. Raison pour laquelle Abydos a attiré beaucoup
de missions archéologiques à l’instar de la mission
américaine dépendant des universités de Pennsylvanie, de New
York et de Michigan et la mission allemande de l’Institut
allemand des antiquités. #
En dépit de tout cela, le site risque d’être complètement
détruit. « Le temple risque de s’effondrer à tout moment. La
brique est une matière peu apte à résister à la fois à une
longue durée de temps, aux changements climatiques et en
plus à l’ambiance générale des alentours », déplore
Abdel-Hamid Qotb. Avis partagé par Zein Diab, assurant que
la zone n’est plus désertique et son climat n’est plus assez
sec pour protéger les constructions archéologiques. Selon
lui, l’extension des champs entraîne une irrigation
permanente. Quant à l’accroissement démographique, il exige
un réseau sanitaire. Deux raisons qui ont comme conséquence
de rehausser la nappe phréatique et augmenter le taux de
l’humidité dans toute la cité antique. C’est en fait ce qui
fragilise les monuments historiques bâtis en brique crue et
affaiblit les bases des antiquités en pierre.
Ainsi pour sauver Abydos de disparition, le CSA compte
commencer une restauration qui sera la première étape. « On
a pris des échantillons de la muraille pour les soumettre à
des analyses scientifiques en Espagne afin de connaître les
composants exacts de la brique et préciser les méthodes
adéquates de leur restauration », explique Abdel-Hamid Qotb.
Quant à la protection de la cité antique des dangers
extérieurs, celle-ci sera la deuxième étape effectuée par le
CSA. Vient en dernière étape le développement touristique de
la région. Tout un grand projet qui « permettra de mettre
Abydos sur la carte touristique égyptienne, tout en prenant
en considération qu’elle est actuellement peu fréquentée »,
conclut Abdel-Aziz .
Doaa
Elhami