Al-Ahram Hebdo, Enquête | Fragile équilibre
  Président Morsi Attalla
 
Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
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 Semaine du 19 au 25 décembre 2007, numéro 693

 

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Enquête

Subventions. Le gouvernement peine à mettre en œuvre son intention de les diminuer, dans un contexte de hausse continuelle du cours mondial des denrées de base.

Fragile équilibre 

Toujours plus lourde pour le budget de l’Etat, le gouvernement s’est penché sur la politique des subventions à maintes reprises, avec la ferme intention de les revoir à la baisse. Le débat sur la révision des politiques de subvention, lancé il y a plus de deux semaines, et initié par le président Moubarak, n’a pas épargné, et ceci pour la première fois, les subventions à l’aliment de base des Egyptiens : le pain.

La subvention au pain absorbe près de 7,3 milliards de L.E. durant l’exercice 2007/08. Or, cette somme sera désormais révisée à la hausse, malgré la décision de l’Etat de baisser les subventions. Une source du ministère des Finances explique que cela est dû notamment à la hausse spectaculaire du prix mondial du blé. Ainsi, vendredi dernier, le Conseil des ministres a-t-il approuvé la décision de doubler le montant de la subvention au pain, selon un communiqué de presse. Une somme exagérée ? L’Egypte, deuxième plus grand importateur mondial de blé, importe quelque 4,5 millions de tonnes par an. Or, le prix mondial a dernièrement atteint 350 dollars la tonne, contre 200 dollars un an auparavant. Cette hausse signifie que la facture des subventions devra augmenter à presque 11 milliards de L.E.

Il semble donc que le gouvernement sera amené à remettre la révision du système de subvention à l’année prochaine. La source du ministère des Finances, qui a préféré l’anonymat, salue le débat actuel sur la révision de la politique des subventions. « Un tabou est brisé », a-t-elle déclaré. En fait, il y a près de 20 ans que le prix de la galette de pain traditionnelle égyptienne est stable, contre vents et marées, à cinq piastres.

Le fardeau budgétaire n’est cependant pas la seule cause pour laquelle le gouvernement appelle à modifier le système actuel des subventions. C’est aussi parce que les subventions profitent plus aux riches qu’aux pauvres. Les chiffres de la Banque mondiale indiquent en effet que le quart des plus démunis n’ont pas accès au pain subventionné. En fait, en Egypte, il y a 17 000 boulangeries produisant du pain subventionné. Elles sont majoritairement situées dans des zones urbaines, plus ou moins aisées. Lorsque la subvention au pain a été instaurée dans les années quarante, elle était allouée à la classe moyenne résidant majoritairement dans les villes. Les paysans cultivaient alors leur blé et préparaient leur pain à la maison. Mais les temps ont changé, les paysans ne cultivent plus de blé, car c’est devenu trop coûteux, et cherchent donc à acheter le pain subventionné. A cause de l’absence de boulangeries et de l’isolement géographique, les Egyptiens sont obligés de perdre deux heures chaque jour dans de longues queues pour s’approvisionner en pain. Pire, le ministre de la Solidarité sociale, Ali Al-Mosselhi, a à maintes reprises accusé les propriétaires des boulangeries qui revendent au noir la farine subventionnée, cumulant ainsi d’immenses profits. Il suffit de savoir qu’ils achètent un sac de farine à 80 L.E. et le revendent aux restaurants ou à d’autres boulangeries à plus de 200 L.E. « Il est temps de se demander qui mérite notre subvention, le citoyen, le boulanger ou les restaurants ? », a-t-il lancé lors d’une interview télévisée.

La Banque mondiale, qui conseille de maintenir la subvention sur le pain, avait alors proposé au gouvernement de séparer la production de la distribution. Ainsi, chaque boulangerie devra-t-elle rendre au ministère une quantité déterminée de pain, d’après la quantité de farine qu’elle reçoit. Le ministère s’occupe ensuite de la distribution du pain dans les régions les plus démunies et les plus isolées. Mais après avoir créé en juin une entreprise pour atteindre cet objectif, le gouvernement semble tout à coup peu engagé dans cette voie.

 

Une aide directe

En revanche, la semaine dernière, le gouvernement a commencé à plaider pour une autre alternative plus radicale : L’élimination complète de la subvention de la farine et en revanche, donner en espèces aux plus démunis l’équivalent de la subvention au pain. Ainsi, le premier ministre s’est-il entretenu avec les rédacteurs en chef de journaux gouvernementaux et de l’opposition pour lancer le débat sur cette proposition. Pour Ali Al-Mosselhi, cette solution mettrait fin au marché noir de la farine subventionnée. Par ailleurs, elle garantirait que la subvention profite uniquement à ceux qui en ont besoin.

Gouda Abdel-Khaleq, professeur d’économie à l’Université du Caire, rejette l’idée que le gouvernement remette aux plus pauvres les subventions en espèces. Selon lui, dans un contexte d’inflation élevée, ce qui est le cas pour l’Egypte, l’injection de plus d’argent dans l’économie alimenterait encore davantage la hausse des prix. De plus, « qu’est-ce qui garantit que le gouvernement pourra augmenter les subventions l’année prochaine pour compenser la hausse continuelle des prix ? ». Par exemple, si une famille mérite cette année une subvention au pain de 50 L.E. par mois, qui lui permet d’acheter 200 galettes de pain, et si l’inflation sur les denrées alimentaires persiste à 20 %, le gouvernement devra élever la subvention à 60 L.E. l’année prochaine, pour garantir le même pouvoir d’achat. Gouda doute que l’Etat puisse compenser ces hausses, et conclut que la proposition gouvernementale n’est qu’un détour pour finalement, de fait, « réduire les subventions ».

Par ailleurs, Samir Radwan, rédacteur en chef du Rapport annuel de la compétitivité de l’économie égyptienne, appelle le gouvernement à profiter de la toute récente carte géographique de la pauvreté, élaborée en juin 2007 par le ministère du Développement économique et la Banque mondiale, afin de redessiner la carte des subventions. Cette carte précise en effet la localisation des 1 000 villages les plus pauvres et aussi les 200 quartiers les plus démunis des régions urbaines.

Il semble donc qu’une révision de la politique des subventions immédiate est délicate. Le risque d’une grogne sociale est grand. Et comme le note Radwan, la subvention au pain, en dépit de ses défauts actuels, « a sauvé 7 % de la population de tomber en dessous du seuil de pauvreté ».

Salma Hussein

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Le dilemme de l’énergie 

Une L.E. sur cinq des dépenses publiques est allouée aux subventions. En gros, elles sont à la hauteur de 55,7 milliards de L.E., les deux tiers étant allouées aux produits pétroliers. Le gouvernement a annoncé qu’il devrait diminuer ces subventions, mais a remis la discussion concernant l’énergie à l’année prochaine. Parmi les produits les plus subventionnés sont ceux qui sont utilisés dans le transport, notamment le gasoil et l’essence.

 

 




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