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Paternité. Un projet de loi obligeant le père naturel à subir un test ADN pour prouver son lien de parenté avec l’enfant suscite une controverse avant même sa discussion au Parlement.

Un projet qui suscite des remous

A la demande de l’épouse, le tribunal doit avoir le droit de contraindre le conjoint à subir un test ADN pour prouver la paternité de son enfant naturel. C’est en gros ce que réclame le projet de loi proposé par le député Mohamad Khalil Qoweita. Pour se prémunir contre tout abus, le projet de loi prévoit contre la mère une amende allant jusqu’à 20 000 L.E. assortie d’une peine de prison entre un et trois ans en cas de résultat négatif. Par ailleurs, si le père refuse de subir le test, son refus serait considéré comme une preuve à charge.

La société peut-elle assumer la présence de quelque deux millions d’enfants sans père ? C’est la question que lance le député pour défendre son projet de loi. « Ces enfants dirigeront leur haine et leur déception contre la société qui refuse de les reconnaître », assure-t-il.

C’est le procès et l’affaire à scandale mettant en cause Hind Al-Hennawi, qui a rouvert le dossier épineux de la paternité. Celle-ci affirme avoir eu une relation avec le comédien Ahmad Al-Fichawi, une relation qui s’est soldée par un enfant, Lina. Or, Al-Fichawi, qui nie être le père de l’enfant, a refusé de subir le test ADN pour éclaircir sa responsabilité dans l’affaire. Et jusqu’à présent, aucune loi ne l’oblige à le faire.

Ce projet de loi a suscité une vive polémique dans la mesure où il s’attaque à l’un des principes de la charia, laquelle refuse aux enfants naturels nés hors mariage toute revendication paternelle. Mais avec l’augmentation du nombre de ces enfants, qui varient selon les statistiques entre 14 000 et deux millions, le problème est devenu trop important pour être ignoré.

Quatre ONG ont récemment publié un communiqué conjoint assurant le droit des femmes à revendiquer la reconnaissance paternelle de leurs enfants extra-conjugaux. Les militants des ONG prônent le recours au test ADN pour résoudre ce genre de problèmes dont les seules victimes sont souvent les enfants eux-mêmes.

Mais face à ceux qui veulent se référer à la science, d’autres mettent en avant les principes de la religion et de la société, craignant qu’en facilitant la tâche à ceux qui bafouent les préceptes de la religion, la société encourage implicitement les mauvaises mœurs.

Les opposants à ce projet de loi sont principalement les hommes de religion, mais aussi des juristes et des députés de tendance islamiste. « Selon la Constitution, la charia (loi religieuse) est la principale source de législation. Or l’islam ne reconnaît que le mariage légal, la paternité ne saurait donc être prouvée qu’en fonction de trois principes, à savoir la reconnaissance du père, le lit et les témoins. Le fait de s’écarter de ces principes reviendrait à bafouer la loi divine », explique l’avocat Adel Hassan. Selon lui, ce projet de loi est anticonstitutionnel dans la mesure où il contredit les règles de la charia.

De son côté, l’ancien président du comité des avis religieux (fatwa) à Al-Azhar, Gamal Qotb, affirme que l’enfant naturel peut prendre le nom de son grand-père maternel mais pas celui de son père, faute de documents officiels. Dans le même registre, le député islamiste Akram Al-Chaër, rejette absolument ce projet de loi auquel il a l’intention de s’opposer lors des débats parlementaires. « Ce projet de loi veut résoudre un problème en en créant un autre et guérir une maladie en en provoquant une autre ». Al-Chaër affirme qu’étant lui-même médecin, il sait que les tests d’ADN ne donnent jamais des résultats sûrs à 100 %. « Il ne faut pas non plus exclure que certaines femmes pourront profiter d’une telle loi pour corrompre des laborantins afin de fabriquer le résultat voulu », ajoute-t-il. Mais si le député Qotb appelle à clore définitivement ce dossier, les pour et les contre devront affronter leurs arguments ce jeudi au Parlement, lors de la discussion du nouveau projet de loi .

Ola Hamdi

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3 questions à
Youssef Qassem, professeur de charia à l’Université d’Al-Azhar, qui défend le point de vue religieux en matière de paternité des enfants extra-conjugaux.

Al-Ahram Hebdo : Dans quelle mesure le projet de loi visant à rendre obligatoire le test ADN dans les procès de paternité peut-il être adapté aux exigences religieuses ?

Youssef Qassem : Si la charia est véritablement appliquée, on remarquera tout de suite que ce projet de loi est en porte-à-faux avec les principes de la religion. Tous les imams de l’islam sont d’accord là-dessus. L’enfant qui est le fruit d’une relation illégitime ne peut pas être attribué à son père naturel si celui-ci refuse de le reconnaître en tant que tel. C’est uniquement si le père le reconnaît comme son fils que celui-ci peut porter son nom. Par contre, obliger l’homme à recourir au test d’ADN pour prouver une relation illégale qui reste impunie, cela est tout à fait contraire à la charia.

— Ne pourrait-on pas interpréter la religion de façon à l’adapter aux exigences des temps présents, comme le réclament certains ?

— Lorsque le texte religieux est clair, il n’y a pas lieu d’interpréter. Le prophète Mohamad a dit : « L’enfant appartient au lit et le fornicateur reçoit la pierre ». Le hadith est clair. Autrement dit, il n’existe aucun lien de paternité légal entre l’enfant naturel et son auteur et celui-ci ne pourrait pas l’obtenir par reconnaissance. De plus, si les médecins disent que les résultats de ce genre de tests sont sûrs à 99 %, qu’en sera-t-il du 1 % restant ? Ce sera le chaos. La charia a donné la solution à ce problème, et il ne faut plus en discuter.

— Comment trouver une issue aux quelques 14 000 procès de paternité intentés par des femmes contre leurs ex-conjoints ?

— La solution est simple, il s’agit d’appliquer la charia et d’insister sur le fait qu’il n’existe qu’une seule forme d’union conjugale, à savoir le mariage légitime. Il ne faut pas résoudre un problème et en créer un autre, ce projet de loi risque de brouiller les idées des jeunes et les encourager à s’engager dans des relations sexuelles illégitimes .

Propos recueillis par
O. H.
 

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