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Terrorisme. Les deux attaques d’Abdel-Moneim Riyad et de Sayeda Aïcha survenues le 30 avril au Caire relancent les interrogations sur l’apparition de groupuscules armés inconnus de la police.
Groupuscules isolés

Acte isolé, opération de représailles ou groupuscule inconnu ? Les deux attentats de la place Tahrir et de Sayeda Aïcha survenus le 30 avril au Caire continuent d’alimenter les spéculations. Il est environ 15h00 place Abdel-Moneim Riyad sous le pont du 6 Octobre lorsqu’un bruit d’explosion se fait entendre. Sur le sol, gît un cadavre dont le crâne a été défoncé par la déflagration. Il s’agirait, selon la police, de l’auteur de l’attentat. Quatre touristes sont blessés : un Israélien et son épouse, un Suédois, une Italienne et trois Egyptiens. Une heure plus tard, sur la place Sayeda Aïcha, non loin de la Citadelle, c’est une autre scène qui se produit. Deux femmes entièrement voilées surgissent de la zone située sous le pont de Sayeda Aïcha armées de revolvers et prennent pour cible un autobus de touristes. Approchées par les policiers, elles se suicident en tirant chacune sur l’autre. Ces deux attentats font suite à l’attaque d’Al-Azhar du 7 avril dernier au cours de laquelle 3 touristes (deux Français et un Américain) ont été tués. L’auteur de l’attaque, un jeune homme de 18 ans, Hassan Bachandi, avait lui aussi perdu la vie au cours de l’opération. Existe-t-il un lien entre les trois attentats ? Sommes-nous confrontés à une nouvelle vague de terrorisme ? Des questions sur lesquelles se penchent les enquêteurs. Selon la police, l’auteur de l’attaque d’Abdel-Moneim Riyad est Ihab Yousri Yassine, un fugitif recherché dans le cadre de l’enquête sur l’attentat d’Al-Azhar. « L’homme qui était en possession d’un engin explosif était poursuivi par des policiers qui le traquaient. Il a sauté du pont (pour leur échapper) ce qui a entraîné l’explosion de l’engin », affirme le communiqué du ministère de l’Intérieur. Quant aux deux femmes qui ont exécuté l’attaque de Sayeda Aïcha, elles ont été identifiées par la police comme étant la sœur d’Ihab Yousri, une dénommée Nagat, et sa fiancée Imane Ibrahim Khamis. La première est morte sur les lieux de l’attaque et la seconde à l’hôpital, succombant à ses blessures. « L’identité des auteurs des deux attaques a pu être identifiée grâce au témoignage du père d’Ihab Yousri. De même, des papiers prouvant l’identité de Yousri ont été trouvés sur lui le jour de l’attentat », explique une source sécuritaire ayant requis l’anonymat affirmant que des tests ADN sont également en cours pour confirmer les faits. Ihab Yousri faisait partie, selon la police, de la cellule qui a exécuté l’attaque d’Al-Azhar. Il était recherché avec trois autres personnes. C’est la version officielle des faits contestée en partie par certains témoins présents sur les lieux de l’attaque qui affirment n’avoir aperçu aucune poursuite entre la police et l’assaillant. Cependant, le lien établi par la police avec l’attaque d’Al-Azhar paraît probable. Tout porte à croire qu’il s’agit en effet de cette fameuse cellule de Choubra Al-Kheima qui a planifié et exécuté l’attaque d’Al-Azhar. C’est exactement le même type d’explosif qui a été employé dans les deux cas. « Nous avons eu affaire dans les deux cas au même type de matériel rudimentaire. La façon avec laquelle ont été menées les attaques révèle le peu d’expérience des auteurs parmi lesquels se trouvent deux femmes. Un fait inédit qui prouve qu’il s’agit d’une cellule familiale limitée », analyse Ahmad Al-Moslémani, chercheur au Centre d’Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. Il s’agit en réalité d’une nouvelle forme d’organisation qui n’a rien à voir avec le Djihad ou la Gamaa Islamiya dont les attaques avaient touché l’Egypte au cours des années 1990.

Cette fois-ci, il s’agit de jeunes livrés à la pauvreté et au désespoir politique. Ces jeunes subissent l’influence des événements en Iraq et en Palestine. Un groupe totalement inconnu qui se fait appeler les Brigades des martyrs d’Abdallah Azzam (à l’instar des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa qui opèrent en Palestine) s’est déclaré responsable des deux attentats du 30 avril. La participation de deux femmes pour la première fois en Egypte à de tels actes suivant le modèle palestinien et iraqien est également révélatrice. Les membres de la fameuse cellule de Choubra Al-Kheima (au nombre de 7 selon la police) sont tous très jeunes et sont issus de catégories sociales défavorisées. « Contrairement aux groupes islamistes armés traditionnels qui ne sont plus dangereux aujourd’hui, ces groupuscules disposent de très peu de moyens. Ils fabriquent des bombes artisanales et se procurent des armes de manière clandestine. Ils sont très sensibles à certaines idées extrémistes et subissent l’influence de l’Internet », affirme Nabil Abdel-Fattah, du CEPS. La menace de tels groupes, peu connus des services de sécurité, est à prendre avec beaucoup de sérieux car ils peuvent être manipulés. Achraf Saïd, considéré par la police comme la tête pensante de l’attentat d’Al-Azhar, arrêté cette semaine, a reconnu qu’il avait l’intention de mener d’autres attaques. De plus, la police craint des actes de représailles. « Nous cherchons actuellement le frère d’Ihab Yousri, Mohamad, un jeune âgé de 17 ans, de peur qu’il ne tente de faire un attentat pour venger la mort de son frère et sa sœur », explique un responsable de la sécurité. Suite aux deux attaques de samedi, les mesures de sécurité ont été renforcées au Caire. Plusieurs dizaines de personnes ont été arrêtées dans le cadre de l’enquête. L’ensemble de la classe politique égyptienne a condamné les attentats du 30 avril. Le sentiment qui se dégage est qu’il est urgent de faire face à ce nouveau danger avant qu’il ne s’aggrave .

Chérine Abdel-Azim

3 question à un responsable de la sécurité qui a requis l’anonymat.
« La thèse de la manipulation reste valable »

Al-Ahram Hebdo : La version évoquée par le ministère de l’Intérieur sur l’attentat d’Abdel-Moneim Riyad a été contestée par certains témoins qui ont affirmé que l’engin explosif a été lancé par une personne qui a pris la fuite. Qu’en pensez-vous ?
La source sécuritaire :
Lorsqu’un tel acte survient, il y a toujours un état de confusion et les rumeurs circulent rapidement. En réalité les opinions sont divergentes. Certains ont dit que l’auteur de l’attentat a sauté par-dessus le pont, d’autres ont dit qu’il se trouvait en bas. La même chose s’est produite à Sayeda Aïcha. Certains ont affirmé que les deux femmes ont tiré sur un car de touristes israéliens. C’est faux. C’étaient des Autrichiens. Puis on a dit qu’elles étaient armées de mitrailleuses. En réalité, c’étaient de vieux pistolets. C’est la preuve que dans de tels cas, il est impossible de se fier totalement à ce que les gens racontent même s’il s’agit de personnes qui se trouvaient dans l’endroit même où ont eu lieu les faits.

— La police a déclaré que les auteurs des deux attentats appartenaient à la cellule de Choubra Al-Kheima qui a planifié l’attaque d’Al-Azhar du 7 avril. Comment analysez-vous ce qui s’est passé ? Ces groupuscules jusque-là inconnus représentent-ils un danger ?
— Ce que nous craignons, ce sont des actes de représailles de la part des familles pour venger leurs morts. A mon avis, ces gens ne sont pas un prolongement des organisations qui existaient déjà comme le Djihad. C’est un nouveau genre de groupuscules. Par exemple, ils admettent l’idée d’actes suicidaires. La participation de deux femmes est un fait nouveau. Dans les années 1990, le rôle des femmes se limitait à collecter des informations, à transmettre des messages ou à transporter des armes, mais commettre un attentat avec des kamikazes, c’est une conception complètement nouvelle pour nous. Bien qu’il s’agisse de groupes isolés ou peu expérimentés, ils ont une certaine organisation. C’est certain.

— Pensez-vous que de tels groupuscules peuvent être manipulés, de l’étranger par exemple ?
— Cela n’est pas exclu. Il est possible que des groupes de l’extérieur exercent une influence sur ces jeunes qui ont entre 18 et 24 ans seulement. Les personnes que nous avons arrêtées dans le cadre de l’attentat d’Al-Azhar ont affirmé qu’elles ne savaient pas que l’attaque se déroulerait à l’endroit où elle est survenue. Cela signifie que ces personnes obéissent à des ordres différents. La thèse de la manipulation reste valable .

Propos recueillis par Ch. A.

 

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