Egypte
- états-unis . Washington
se dit enfin prêt à entamer des négociations pour l’établissement
d’une zone de libre-échange entre les deux pays. Une décision
soudaine, accueillie avec suspicion par les Egyptiens.
Explications. |
Discussions
en vue |
Une délégation de la mission économique
égyptienne appelée « Frapper aux portes »
s’est rendue cette semaine aux Etats-Unis
afin de préparer la visite du président Hosni Moubarak,
attendu le mois prochain à la Maison Blanche. Ces déplacements
s’inscrivent dans le cadre de l’intensification des
relations économiques entre les deux pays après l’annonce
de l’ouverture de négociations pour l’établissement
d’une zone de libre-échange entre l’Egypte et les Etats-Unis
(Free Trade Agreement, FTA). Des négociations maintes
fois reportées en raison du retard pris par le gouvernement
égyptien à appliquer les réformes économiques requises
par son vis-à-vis américain. La semaine dernière, une
importante réunion s’est en effet tenue entre le ministre
du Commerce extérieur et de l’Industrie, Rachid Mohamad
Rachid, et l’assistante du représentant américain au
Commerce pour l’Europe et la Méditerranée, Catherine
Noveli, à l’issue de laquelle décision a été prise d’entamer
les négociations sur la FTA, même si aucune date n’a
encore été précisée. « D’importantes questions demeurent
et doivent être examinées. Mais nous sommes impressionnés
par la détermination des Egyptiens à mener à bien les
réformes », a souligné Noveli, à la sortie de cette
réunion. Côté égyptien, Rachid a annoncé la formation
de groupes de travail égypto-américains qui comprennent
des représentants des douanes, de l’agriculture, des
télécommunications, de la justice et de la propriété
intellectuelle. Ils constitueront les intérêts communs
des deux parties de la négociation, ce qui risque d’être
une tâche plutôt délicate. Car il faut dire que, malgré
des déclarations officielles très optimistes, le scepticisme
règne. Plusieurs observateurs se plaignent du fait que
les Américains se contentent de faire des promesses
qu’ils ne tiennent pas par la suite. D’abord, ils n’ont
cessé de réclamer des réformes économiques, ensuite,
ils ont appuyé l’établissement d’une coopération économique
avec Israël à travers le QIZ, puis, dernièrement, un
bras de fer avec le gouvernement égyptien a été déclenché
par le lobby des firmes pharmaceutiques américaines
pour entraver les négociations sur la FTA. Un enchaînement
d’événements qui nourrit la suspicion d’un expert comme
Gouda Abdel-Khaleq, professeur de sciences politiques
à l’Université du Caire, qui se demande : « Comment
les Etats-Unis peuvent-ils annoncer le début de négociations
sur une zone de libre-échange, alors qu’on vient de
signer le QIZ le mois dernier ? Ce n’est pas logique,
je doute qu’il y ait vraiment un début de négociations
». Une opinion qu’est loin de partager Samir Radwan,
directeur de l’Economic Research Forum, pour qui « le
QIZ a été signé pour réaliser le souhait des Etats-Unis
de voir l’Egypte entretenir des relations avec Israël
et son but est donc plus politique que purement économique.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’annonce de
l’ouverture prochaine de négociations sur la FTA vient
comme une récompense ». Les Etats-Unis ont en effet
entamé des négociations sur des zones de libre-échange
avec d’autres pays arabes, comme le Sultanat d’Oman
et les Emirats arabes unis et a déjà conclu un accord
de FTA avec la Jordanie et le Maroc. Ce qui a nourri
la méfiance des observateurs égyptiens a été cette campagne
virulente menée depuis un mois par les firmes américaines
du médicament qui ont clairement annoncé qu’elles seraient
prêtes à entraver les négociations sur la FTA au cas
où le ministère de la Santé s’entêtait à ne pas répondre
à leurs demandes. Même si le ministre du Commerce extérieur,
Rachid Mohamad Rachid, considère que cette campagne
n’aura « aucune influence sur les négociations », il
affirme dans le même temps que « l’on tient à résoudre
ces problèmes ». Les Etats-Unis veulent sans doute préserver
les intérêts de ces firmes. En dehors du cadre des accords
avec l’OMC, les Américains souhaitent conclure des accords
bilatéraux avec les pays en voie de développement. «
Les médicaments génériques feront sans doute l’objet
d’un examen particulier au cours des négociations sur
la FTA. Les négociateurs égyptiens devraient se montrer
prudents », met en garde Radwan.
En revanche, du côté des milieux d’affaires
égyptiens, l’heure est à l’impatience. Selon un rapport
du Centre égyptien des études économiques (ECES), une
zone de libre-échange entre les Etats-Unis et l’Egypte
a d’abord des retombées politiques pour les Américains,
alors que pour les Egyptiens, le gain ne peut être qu’économique.
Les enjeux, en effet, d’un tel accord ne sont pas seulement
économiques et la politique y joue un rôle de première
importance.
Les Etats-Unis constituent, en termes
d’échanges commerciaux, l’un des principaux partenaires
de l’Egypte après l’Union Européenne (UE). Les exportations
égyptiennes vers les Etats-Unis se sont élevées à 542,2
millions de dollars en 2003, alors que les importations,
elles, ont atteint 1,3 milliard de dollars pendant la
même année. Et, toujours selon le rapport du ECES, les
retombées pour les Egyptiens d’une zone de libre-échange
avec les Etats-Unis seront certes positives mais minimes,
alors que les dividendes politiques que vont en tirer
les Américains seront bien plus importants. « L’essentiel
est d’avoir une stratégie bien claire en ce qui concerne
la capacité d’exportation. La question qui doit être
résolue du côté égyptien est : Comment bénéficier de
l’ouverture de ces marchés, que ce soit avec l’UE ou
les Etats-Unis ? », ajoute Radwan. Depuis 1995, officiels
et hommes d’affaires égyptiens ont tenté lors de toutes
les occasions de convaincre leurs homologues américains
de l’établissement d’une zone de libre-échange, mais
ces tentatives se sont toutes soldées par des échecs.
Qu’en sera-t-il cette fois-ci ?.
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Les Emirats
arabes unis et les Etats-Unis entameront, dans le courant
mars, un nouveau round de négociations pour la signature
de la convention sur une zone de libre-échange. Ce qui
n’est pas pour plaire aux autres pays du Golfe. |
L’idée
de créer une zone de libre-échange (FTA) a été conçue
par l’équipe du président Bush en 2003 dans le but de
réaliser le projet américain de création, d’ici à 2013,
d’une convention de libre-échange dans la région du Moyen-Orient
et de l’Afrique du Nord. La première étape donc de ce
projet se fonde sur la signature par les Etats-Unis de
l’accord de la FTA avec chacun des pays de la région dans
un cadre bilatéral.
« Les Emirats bénéficieront
de la signature de la convention de libre-échange qui
aura des effets positifs sur l’accès des exportations
des Emirats au marché américain », c’est ainsi que le
ministre émirati des Finances et de l’Industrie, Khaled
Ali Al-Bostani, a commenté l’enthousiasme de son pays
pour la signature d’un tel accord.
Un enthousiasme qui n’est
pas partagé par le Conseil de Coopération des pays du
Golfe (CCG), qui juge que Washington néglige délibérément
tous les blocs économiques, préférant les cadres bilatéraux.
Raison pour laquelle l’Arabie saoudite accuse les Emirats
arabes unis et Bahreïn (qui a déjà signé l’accord de la
FTA en septembre dernier) d’aller à l’encontre des tendances
du CCG. Riyad insiste sur l’importance de conclure un
tel accord en tant que bloc, à l’exemple de l’Union européenne.
Mais la question qui se pose encore est de savoir si les
Emirats bénéficieront de l’accord FTA autant que les Etats-Unis.
Cet accord portera dans
un premier temps sur une réduction des barrières douanières
qui devront plus tard être totalement supprimées. Selon
une étude de la Chambre de commerce et de l’industrie
de Doubaï, les Etats-Unis ont inclus des clauses dans
la FTA en faveur de leurs intérêts économiques sans tenir
compte de ceux de leur partenaire.
Ces clauses portent notamment
sur l’ouverture du marché des services à l’exemple des
télécommunications et des assurances, ajoutant une exemption
de 95 % des tarifs douaniers. Cette étude de la Chambre
de commerce de Doubaï critique également les Etats-Unis
qui tentent d’accélérer la conclusion de la FTA sans tenir
compte du temps nécessaire aux Emirats pour la mise en
application de l’accord, sans leur donner non plus celui
d’étudier les impacts économiques et sociaux de la FTA
sur le moyen et le long termes. Par ailleurs, la FTA n’accorde
aucune place aux aides financières et techniques accordées
jusque-là par Washington aux Emirats.
Le Conseil des ministres
des Emirats a donc finalement décidé, il y a deux semaines
de cela, la formation d’un conseil de consultation qui
planchera sur les recommandations pour étayer le point
de vue du gouvernement des Emirats dans la négociation
avant de signer la FTA. Pour mieux examiner les effets
de cette convention sur l’économie des Emirats, Bostani
a fait appel, fin janvier dernier, à un bureau de consulting
international, Maxell Stamp, qui a envoyé un groupe d’experts
aux Emirats pour rencontrer les représentants du gouvernement,
mais aussi les hommes d’affaires, et affiner ainsi ses
recommandations pour les prochaines négociations. L’étude
porte principalement sur l’impact de l’entrée des exportations
des deux pays, y compris celles de services tels que les
télécommunications, les services financiers et les transports.
« Nous examinerons aussi les résultats des négociations
entre les Etats-Unis et les pays qui ont déjà signé l’accord
de la FTA, notamment le Bahreïn, le Maroc et la Jordanie
», souligne Khaled Ali Al-Bostani.
Il est à noter que les
exportations américaines vers les Emirats se sont élevées
à 3,5 milliards de dollars en 2003, tandis que celles
des Emirats vers les Etats-Unis ont atteint 1,1 milliard
de dollars pour la même période. Les Emirats arabes unis
sont considérés comme un pays très important pour les
Etats-Unis car les trente plus grandes compagnies américaines
y sont déjà implantées. Les Emirats avaient déjà signé,
le 15 mars 2004, la convention du commerce et de l’investissement
(Trade and Investment Framework Agreement, TIFA) pour
renforcer leur secteur privé.
Dans ce cadre, Robert
Zoellick, le représentant américain au commerce, a souligné
que la TIFA avait pour but de soutenir l’activité du secteur
privé, ouvrant de nouvelles opportunités de travail aux
entreprises américaines se trouvant aux Emirats. Cela
est d’autant plus intéressant pour les Américains que
la législation émiratie est très ferme en ce qui concerne
la part de contribution étrangère dans les entreprises
locales, part qui ne doit pas dépasser le seuil des 49
% du capital. Washington demande donc l’annulation de
ces entraves, qui si elles venaient à tomber, permettraient
aux compagnies américaines d’envahir le marché des Emirats
en toute liberté.
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Dahlia
Réda |
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