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Entre
Allaoui et Chalabi
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Par
Mohamed Sid-Ahmed |
Lorsque
George W. Bush a déclenché la guerre contre
l'Iraq, il a déclaré qu'il s'attendait à ce
que ce pays soit le plus démocratique du monde
arabe. C'est dans cet esprit que la peine capitale
a été abrogée. On prenait à l'époque cette abrogation
comme indice de la nouvelle identité de l'Iraq
et des nouvelles valeurs qu'il allait symboliser
et qui sont tout à fait le contraire de celles
qui ont prévalu sous le régime de Saddam Hussein.
Mais
actuellement, l'image a changé. Tout d'abord,
il y eut le grand choc provoqué par les nouvelles
sur des sévices infligés par des soldats américains
à des prisonniers iraqiens. Ensuite, ce fut
le choc de la décision du gouvernement provisoire
de rétablir la peine capitale.
Avant
la guerre, on s'attendait à ce qu'Ahmad Chalabi
soit l'acteur principal de la construction du
nouvel Iraq car il était l'opposant iraqien
le plus proche de l'Administration américaine
et l'homme qui a contribué le plus à convaincre
Bush de partir en guerre. Mais encore une fois,
l'image a changé. Chalabi est à présent en disgrâce.
Les Américains lui ont retiré les quelque 340 000
dollars qu'ils lui versaient mensuellement après
la découverte de ses relations avec le régime
iranien, à qui il a remis des documents américains
importants dont le code utilisé par les troupes
américaines.
Chalabi
a perdu ainsi toute chance de pouvoir jouer
le rôle principal, comme on le prévoyait auparavant.
A surgi dans ces conditions Iyad Allaoui, qui
est devenu la personne la plus à même de remplir
les fonctions de premier ministre. Allaoui avait
beaucoup d'avantages par rapport à Chalabi.
Il a un passé de baasiste et entretenait
de bonnes relations avec les politiciens iraqiens
à l'intérieur du pays alors que Chalabi, lui,
avait quitté l'Iraq depuis longtemps et n'avait
pas de contact avec ces hommes politiques. C'est
ce qui explique probablement sa volonté de développer
de bonnes relations avec des forces régionales
comme l'Iran. Chalabi a d'autre part joué un
grand rôle pour convaincre les forces d'occupation
américaines de liquider le parti Baas.
Ce qui a encouragé les rescapés de ce parti
à se réorganiser clandestinement et à joindre
la résistance armée contre le gouvernement provisoire.
Tout ceci a porté préjudice aux tentatives de
renforcement de la sécurité et de la stabilité
et a été à l'origine du rétablissement de la
peine capitale. Ce qui a étouffé le rêve de
l'instauration d'un régime démocratique.
C'est
ainsi et contre toutes les prévisions qu'Allaoui
a émergé et est devenu l'homme fort de l'Iraq.
Allaoui ne fut pas le premier choix ni des Américains
ni de Lakhdar Brahimi, l'envoyé spécial de Kofi
Annan. Mais finalement, il fut approuvé par
tous. Et il est devenu le véritable dirigeant
de l'Iraq.
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Le
danger d'un démembrement de l'Iraq
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La
plus grande menace que confronte l'Iraq est
sa possible division en de petits Etats. Saddam
Hussein avait de nombreuses tares, mais il avait
l'avantage d'avoir su maintenir, quelle que
soit la politique qu'il avait adoptée, l'unité
de l'Iraq. Aujourd'hui, il n'y a plus de forces
qui œuvrent pour maintenir cette unité. L'Iraq
est aujourd'hui exposé à différentes formes
d'effondrement et de guerre civile.
Lorsque
l'anarchie prédomine sur l'ensemble du pays,
il est inéluctable que les relations inter-iraqiennes
s'enchevêtrent de plus en plus et deviennent
plus confuses et plus compliquées. C'est en
effet ce que l'on prévoit avec l'absence d'une
autorité centrale reconnue par toutes les parties
concernées.
Les
pressions internes et externes conduiront-elles
Allaoui à adopter des positions aussi intransigeantes
que celles de Saddam Hussein, mais qui seront
cette fois appuyées par les Etats-Unis, quel
que soit le prochain président américain, Bush
ou John Kerry ?
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L'Intifada
des chiites
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Le
chef radical chiite Moqtada Sadr a estimé qu'il
est impossible qu'un climat démocratique normal
prévale tant que l'occupation étrangère persiste.
Sadr nie que ses partisans soient un groupe
de criminels et de meurtries comme les décrit
Allaoui. Il rappelle qu'ils sont musulmans,
croyants et défendent l'islam contre les non-croyants.
Les choses glissent très rapidement vers des
confrontations que, tout porte à croire, seront
des plus dangereuses.
La
situation est amplement détériorée, l'armée
du Mahdi dirigée par Moqtada Sadr est prête
à des combats meurtriers dans la ville sainte
de Nadjaf, au sud de Bagdad. Sadr a juré qu'il
défendrait la ville sainte contre les Américains
et les Anglais jusqu'au dernier. Bien plus,
à Bassora, au sud, on menace de se séparer de
l'Iraq si les troupes étrangères poursuivent
leurs attaques. D'autre part, avec la poursuite
des combats, 90 % du budget iraqien dépend
de la vente du brut, ce qui menace le gouvernement
provisoire d'une catastrophe si les confrontations
se poursuivent, empêchant l'exportation du pétrole.
Quel
est le sort des relations arabo-iraqiennes ?
L'Iraq va-t-il se défaire de son passé et s'éloigner
de son environnement arabe ou bien va-t-il procéder
à un retour au bercail ? Et qu’en est-il
d'Israël ? Washington va certes essayer
d'exploiter tout éloignement de l'Iraq du monde
arabe pour établir des relations entre l'Iraq
et Israël. Il est probable qu'une personne comme
Allaoui avec son passé nationaliste s'opposerait
autant que possible à cette orientation. Mais
sous ce climat confus, il est difficile de trancher
quoi que ce soit. Il est plutôt presque certain
que si Washington tarde à établir des ponts
entre l'Iraq et Israël, ceci ne signifierait
pas qu'il a renoncé à le faire, mais que d'autres
réalités plus urgentes le préoccupent à l'heure
actuelle. Le sujet est donc relégué, mais pas
abandonné.
Il
est impossible que les relations avec les pays
voisins restent stables tant que la situation
sur le plan interne en Iraq se détériore davantage.
D'où le besoin d'une démocratie qui convient
à l'Iraq et à ses spécificités. Mais nous n'avons
qu'un court délai. Les élections ne peuvent
être reportées éternellement. Elles ont déjà
été reportées, ce qui a eu comme conséquence
la remise du pouvoir aux Iraqiens malgré la
présence des troupes d'occupation.
L'Iraq
parviendra-t-il à réussir son examen de démocratie
ou bien l'anarchie aura-t-elle le dernier mot ?
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