Hebdomadaire égyptien en langue française en ligne chaque mercredi

L'Egypte

La Une
L'événement
Le dossier
L'enquête
Nulle part ailleurs
L'invité
L'Egypte
Affaires
Finances
Le monde en bref
Points de vue
Commentaire
d'Ibrahim Nafie

Carrefour
de Mohamed Salmawy

Idées
Portrait
Littérature
Arts
Société
Sport
Escapades
Loisirs
Echangez, écrivez
La vie mondaine
Censure . Un ouvrage de l'écrivain Nasr Hamed Abou-Zeid a été interdit cette semaine par Al-Azhar car « portant atteinte à la religion ».
Al-Azhar revient à la charge

L'écrivain Nasr Hamed Abou-Zeid, accusé il y a 7 ans d'apostasie, est à nouveau au centre d'un débat agité. Un de ses livres, Le Discours et l'interprétation, a été interdit cette semaine suite à un rapport de l'Académie des recherches islamiques (relevant d'Al-Azhar). « Le livre porte atteinte à deux doctrines fondamentales de l'islam, le monothéisme et le Coran », affirme le rapport de l'Académie des recherches. Dans son ouvrage, Nasr Hamed Abou-Zeid livre sa conception sur l'interprétation des textes religieux en affirmant que celle-ci doit prendre en considération le contexte dans lequel elle se situe. Il s'oppose ainsi à la lecture textuelle des textes. Nasr Hamed Abou-Zeid vit aux Pays-Bas depuis 1995. Il a été condamné par un tribunal cairote à se séparer de sa femme pour apostasie.

Le livre d'Abou-Zeid, paru il y a quelques années et qui a été réédité, devait être approuvé par Al-Azhar avant d'être autorisé en Egypte. Une commission présidée par l'écrivain islamiste Mohamad Emara a été chargée d'étudier le livre. La commission a rédigé un rapport au ministère de l'Information, estimant que le livre était contraire aux préceptes de la religion. Abdel-Moeti Bayoumi, membre de l'Académie des recherches islamiques, affirme que cette décision ne reflète aucune intention d'Al-Azhar de nuire à la liberté de pensée et de créativité, mais il s'agit de conserver les principes de la société de toutes déviations. « C'est pourquoi tous les organismes concernés doivent respecter les recommandations d'Al-Azhar en ce qui concerne les œuvres religieuses. Je réclame également d'attribuer à quelques membres de l'académie le droit juridique de saisir directement toute œuvre portant atteinte à la religion et aux mœurs », ajoute Bayoumi.

Il ne s'agit pas du premier acte de ce genre ; plusieurs ouvrages similaires avaient été saisis ces dernières années. L'affaire relance le débat sur le rôle d’Al-Azhar et son impact sur la liberté de pensée et de créativité. Pour Mahmoud Amine Al-Alem, penseur de tendance gauche, la saisie des œuvres constituent une sorte de terrorisme intellectuel menaçant la créativité et la liberté de pensée. « L'islam au nom duquel ces livres ont été saisis défend la liberté d'expression en incitant ses adeptes à l'Ijtihad (l'effort d'analyse et de réflexion). Il est scandaleux que depuis des centaines d'années les oulémas et les penseurs ont pu renouveler les concepts religieux selon les nouvelles données de la société, et aujourd'hui nous voulons nous en tenir à la lettre au texte religieux et non pas à son esprit », dénonce Al-Alem. Il ajoute que tout le monde a le droit de faire part de ses idées, même les plus osées. « Les idées doivent être combattues par les idées et non pas par la confiscation, qui témoigne de l'incapacité d'Al-Azhar de défendre son point de vue. Au lieu de saisir le livre d'Abou-Zeid, il fallait argumenter pour dénoncer ses idées. C'est la seule garantie d'une évolution ».

Avis partagé par Hussein Abdel-Razeq, écrivain secrétaire général adjoint du parti du Rassemblement unioniste progressiste (qui a organisé cette semaine un colloque sur l'interdiction du livre d'Abou-Zeid). Il critique l’ambiguïté des clauses des lois qui permettent à Al-Azhar de poursuivre les intellectuels et leurs œuvres religieuses. « Sous l'étiquette des bonnes mœurs, tout peut être interdit. Ces lois sont formulées dans des termes tels que tourner les religions en dérision et atteindre les bonnes mœurs ». Il explique que les idées et les pensées sont relatives. Les gens ne voient pas les choses du même œil. « L'Ijtihad existe depuis l'ère du prophète. Mais cette tendance conservatrice refusant l'interprétation du Coran et son adaptation selon les nouvelles données de l'époque reflète une mentalité bornée incapable de comprendre l'esprit de la religion », ajoute Abdel-Razeq.

Des accusations que rejette Abdel-Moeti Bayoumi, qui estime que la liberté n'est pas absolue et doit avoir des limites à ne pas dépasser. « C'est une règle appliquée dans tous les pays du monde ». Fahmi Howeidi, écrivain de tendance islamiste, ne refuse pas pour sa part l'interprétation et l’Ijtihad s’ils ne touchent pas le fond de l'islam, mais il ajoute : « Pourquoi les gens se révoltent dès qu'on parle de manque de liberté en matière de pensée, pourquoi ne se révoltent-ils pas quand on parle d'absence de liberté politique ». « Il s'agit d'une crise de liberté en général », conclut-il.

May Al-Maghrabi

Retour au Sommaire

 

Pour les problèmes techniques contactez le webmaster

Adresse postale: Journal Al-Ahram Hebdo
Rue Al-Gaala, Le Caire - Egypte
Tél: (+202) 57 86 100
Fax: (+202) 57 82 631