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Peinture
. Helmi Al-Touni rend « hommage
à l'art copte », galerie
Akhenaton au Caire, persuadé qu'il a
été trop longtemps
occulté.
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Un art
revisité
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« Je
me suis toujours demandé pourquoi l'art
copte n'a jamais été pour nous,
artistes et peintres égyptiens, source
d'inspiration ? Pourtant, les
différents arts avec la diversité des
styles, comme l'art pharaonique, l'art islamique,
l'art populaire et l'art occidental
ont eu un impact certain sur le mouvement
artistique en Egypte. Pourquoi donc a-t-on
délibérément tourné le
dos à l'art copte ? ».
Helmi Al-Touni, dans son exposition
« Hommage à l'art
copte », force l'il en quelque
sorte à découvrir et à
reconnaître, un art oublié ?
« Non, occulté »,
pense-t-il.
Helmi Al-Touni, en rendant hommage à l'art
copte, dénonce un parti pris qui est celui
d'enfouir un art qui a caractérisé
une époque importante de la civilisation
égyptienne et qui a laissé ses
marques dans l'art islamique et dans l'art
populaire égyptien. « La
responsabilité en incombe non seulement aux
décideurs de la vie politique et
culturelle, dit-il, mais aussi aux artistes
et intellectuels, qu'ils soient coptes ou
musulmans ». Helmi Al-Touni a voulu,
par cette exposition, attirer l'attention sur une
civilisation et un art « qui sont
depuis trop longtemps
marginalisés ».
« J'ai voulu, précise-t-il,
faire redécouvrir, à travers l'art
copte, un langage visuel et esthétique qui
est non seulement le prolongement de la
civilisation de l'Egypte Ancienne, mais qui
a développé un style authentique et
original ».
En laissant l'il se promener, rêver et
passer d'une toile à l'autre, on est
happé par l'Histoire qui remonte à la
nuit des temps et qui plonge dans les racines de
tout Egyptien. L'Histoire, on la lit chez Helmi
Al-Touni, face à Eve au milieu des
Cyprès, cachant sa nudité et
regardant de ses grands yeux nostalgiques un hier
qui fut meilleur. Nous retrouvons ces yeux
pénétrants dans trois portraits de
femmes dont la beauté rivalise celle des
portraits du Fayoum dont il s'inspire directement.
Le pinceau de Helmi Al-Touni ne nous rend pas
seulement ces portraits présents, mais il
réussit à transposer à travers
couleurs et motifs la patine des
siècles.
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L'esprit de 1919
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C'est l'Histoire
encore qu'on devine dans la fougue et la
fierté du cheval de saint Georges qui
traverse le temps, chevauchant une Egypte
déchirée entre une civilisation qui
se meurt et une autre naissante dans une aube
encore noire, entachée du pourpre de la cape
de saint Georges. Une civilisation naissante, c'est
la mère et l'enfant dont on ne voit que les
mains entrelacées sortant des plis du
vêtement et qui poursuivent leur marche
à travers déserts et palmeraies.
L'ange, le rameau à la main, les accompagne.
Leur montre-t-il la route vers la terre sainte pour
qui tant de sang a coulé et continue
à couler ? Les conduit-il à
Jérusalem meurtrie aujourd'hui par
l'intolérance des hommes ?
Helmi Al-Touni abhorre, refuse, dénonce
cette intolérance. « La
religion est affaire de Dieu, mais la Patrie est
nôtre ». Cette phrase
que les foules, et à leur tête cheikhs
et prêtres, ont scandée dans toute
l'Egypte en 1919, Helmi Al-Touni la fait sienne.
Elle est inscrite en filigrane dans toutes ses
toiles. Elle est dans la femme et l'enfant
tendrement enlacés, voguant vers des jours
meilleurs. Elle est aussi dans la prière de
cet ange qui fait don de lui-même à
l'Egypte pour qu'enfin le monde s'apaise et que
l'oiseau piqueur, fétiche de Helmi Al-Touni
et des paysans égyptiens, puisse vivre dans
un monde sans haine.
Il ne nous reste qu'à rendre hommage
à Helmi Al-Touni qui dans
« Hommage à l'art
copte », et dans un style tout
à fait particulier, « fruit
d'une longue recherche à travers l'art
populaire égyptien, nous fait
découvrir tout un pan d'un art qui,
précise-t-il, n'a rien d'un art officiel,
ni d'un art académique comme les arts
chrétiens à Byzance ou en Europe.
L'art copte tire son essence d'un art populaire
foncièrement enraciné dans la culture
et les coutumes d'un peuple qui a su
expérimenter spontanément et
profondément ses croyances et ses
aspirations ».
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Hana
Farid
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