Sept mois après son inauguration, le Palais du Baron Empain connaît quelques dégradations au niveau des murs et du plafond. Une situation qui mécontente les passionnés d’architecture. Explications.
Depuis fin janvier, des traces d’humidité et des fissures sont apparues sur les murs extérieurs du Palais du Baron Edouard Empain. Une dégradation bien visible malgré les travaux de restauration qui ont pris fin il y a quelques mois. Alaa Zaher, amateur de patrimoine et inconditionnel du monument, a souvent visité ce palais énigmatique. Il observe qu’après des décennies de fermeture, des traces d’humidité s’étalent sur quelques murs. « On peut apercevoir des traces d’humidité sur les murs de l’entrée principale du palais. C’est un mauvais présage car la tache s’agrandit et des traces salines apparaissent clairement », explique Zaher. Cette détérioration a suscité la colère tant des professionnels que des amateurs qui ont diffusé des images des détériorations sur les réseaux sociaux. Le ministère du Tourisme et des Antiquités a tout de suite réagi en publiant un communiqué de presse qui assure que les murs du palais héliopolitain sont sécurisés et que la visite se poursuit normalement. « L’humidité et le résidu de sel qui apparaissent sur les murs extérieurs du palais ne sont que les résultats de l’ancienne irrigation défectueuse des jardins du palais », se défend l’ingénieur Hicham Samir, assistant du ministre du Tourisme et des Antiquités pour les projets d’ingénierie. Selon lui, ce système d’irrigation a été remplacé par l’irrigation au goutte-à-goutte. Les parcelles cultivées sont actuellement placées loin du palais pour préserver sa valeur architecturale et ses éléments de décoration. Des déclarations réfutées par les passionnés de l’architecture exceptionnelle de ce monument unique en Egypte. « Il ne s’agit pas d’une question d’irrigation. Le palais a été abandonné il y a des dizaines d’années et son jardin n’a jamais été irrigué. De plus, sa restauration et sa réhabilitation ont duré plus de trois ans, alors que la dégradation actuelle est intervenue quelques mois seulement après son inauguration », se lamente l’archéologue et chercheur d’art islamique Hossam Zidaine.

Des traces d’humidité et des fissures apparaissent à l’extérieur ainsi qu’à l’intérieur du Palais du Baron.
Toutefois, pour éviter plus de dommages, les travaux de maintenance ont déjà commencé et les échafaudages ont été à nouveau déployés sur la structure depuis début février. « C’est la compagnie Arab Contractors qui tentera de régler ce problème d’humidité en faisant appel à des professionnels qui vont traiter par infiltration les parties dégradées ou chargées de sels minéraux. Puis viendra le séchage avant de refaire l’enduit au mortier et la peinture de finition », explique Hicham Samir, sans préciser la durée de ces travaux, en assurant que le Palais d’Héliopolis continue à accueillir normalement ses visiteurs.
Outre les traces de sel qui se sont répandues sur les murs, des fissures sont aussi apparues. « Les fissures se trouvent du côté des escaliers menant à l’entrée principale du palais », reprend Alaa Zaher. Par ailleurs, les dommages ne se sont pas limités aux taches d’humidité et aux fissures puisqu’ils ont atteint également l’intérieur de l’édifice. « Les éléments de mosaïque décorant la terrasse du palais sont tombés », dit Zaher, ajoutant que les responsables en charge du palais assurent que ces pièces seront prochainement replacées. Les administrateurs du musée restent silencieux, refusent de faire des déclarations ou de donner des explications sur les raisons de la détérioration de l’édifice et affirment qu’il s’agit d’une question technique qui exige une réponse des spécialistes. Il est à préciser que la restauration et la réhabilitation de l’édifice et de son jardin, qui représentent au total 24 000 m2, ont coûté près de 175 millions de L.E., soit environ 9 millions de dollars.
Les kiosques du Baron
Les dégâts muraux et l’apparition de fissures ne sont pas les seuls problèmes qui ont surgi dernièrement autour du palais. Les amoureux du patrimoine égyptien ont aussi protesté contre l’édification d’un kiosque qui déforme le style architectural du palais. « Nous nous élevons contre la mise en place de ce genre de verrue commerciale au sein d’un monument historique. Depuis l’inauguration, l’idée d’offrir des services aux visiteurs était une évidence afin d’établir un revenu qui participerait aux travaux de réfection et de réparation de l’endroit », a déclaré Choukri Asmar, membre de l’initiative « Héritage héliopolitain ». Il souligne qu’il est indispensable que les installations annexes s’harmonisent avec l’ensemble architectural et la beauté du palais. Avis partagé par l’expert en archéologie Bassam Al-Chamaa, qui a proposé de déplacer ces kiosques hors du périmètre du palais et de créer de simples boutiques pour la vente des livres et des souvenirs. Un restaurant avec peu de tables et dans un style qui convient à l’époque peut également être envisagé. Tout cela en bannissant les marques commerciales tape-à-l’oeil.

Kiosque original présentant du fast-food, au jardin du palais, avec peu de tables et chaises.
A la suite de ces protestations, le ministère a fait retirer le kiosque en question et a entamé des travaux d’aménagement dans le jardin derrière le palais. Un café, un restaurant haut de gamme et une petite boutique de souvenirs seront installés. « Le ministère travaille à offrir des services supplémentaires pour répondre aux besoins des visiteurs et aussi pour étoffer les revenus du monument », explique Eman Zidan, assistante du ministre du Tourisme et des Antiquités pour les affaires d’investissements et de développement des ressources financières. Elle a ajouté que toutes les constructions sont simples et suivent un style cohérent qui correspond à l’atmosphère historique du début du XXe siècle. Il est à noter que depuis l’inauguration du Palais du Baron Empain fin juin 2020, un bus du XXe siècle a été mis en place, il est entouré d’une dizaine de petites tables. « Ce kiosque offre différentes boissons et de la restauration rapide aux visiteurs », a indiqué Chaïmaa Mamdouh, conservatrice du palais. En guise de conclusion, on peut affirmer que les légendes et les contes autour du Palais du Baron belge Edouard Empain susciteront toujours des polémiques car ce lieu emblématique restera toujours une énigme.
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