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Une journée riche en découvertes

Nasma Réda, Mardi, 15 mai 2018

La Journée de l’archéologie française, organisée la semaine dernière à l’Institut Français d’Egypte (IFE), a dressé le bilan de certaines missions françaises opérant en Egypte, et a évoqué les perspectives d’une nouvelle saison archéologique.

Une journée riche en découvertes
Vue de Plinthine depuis le sud-est. (Photo : MAFTP)

La journée de l’archéologie a regroupé cette année les trois grands instituts français travaillant en permanence en Egypte, dont l’Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO), le Centre Franco-Egyptien d’Etudes des Temples de Karnak (CFEETK) et le Centre d’Etudes Alexandrines (CEAlex). Leurs travaux archéologiques en Egypte se poursuivront avec plus de 30 missions sur différents chantiers de fouille et de restauration, allant de la côte alexandrine au nord à la Haute-Egypte au sud en passant par la vallée du Nil, et jusqu’aux côtes de la mer Rouge et aux déserts. « La France est le premier partenaire de l’Egypte en matière d’archéologie », affirme Laurent Bavay, directeur de l’IFAO, qui a organisé cette journée conjointement avec l’Institut Français d’Egypte (IFE), afin de présenter la diversité et la richesse du travail des missions françaises en Egypte.

L’IFAO travaille dans l’urgence

Concernant l’IFAO, Laurent Bavay a choisi d’expliquer les travaux sur le chantier de Wadi Jarf sur la mer Rouge. C’est sur ce chantier que l’égyptologue Pierre Tallet, directeur de la mission de fouilles dans la région, a trouvé des papyrus remontant à l’Ancien Empire et appartenant au roi Chéops, bâtisseur de la grande pyramide. L’année 2017-2018 est fructueuse, elle répond, d’après lui, à une question importante pour les chercheurs du chantier, à savoir quel était le lieu « d’approvisionnement en matières premières ». Les études du port et des ateliers de Wadi Jarf, et également l’exploitation des fours de minerais à Sarabit Al-Khadem dans le Sinaï, ou des ateliers fouillés à Al-Aïn Al-Sokhna répondent à cette question qui a tant préoccupé les archéologues.

« La même mission vient de terminer aussi les travaux de fouilles dans un bâtiment d’environ 2 250 m2 situé entre la montagne et la côte de la mer Rouge », déclare Bavay, ajoutant qu’il s’agit d’une configuration importante, de grande taille, qui rappelle les logements des ouvriers, constructeurs des pyramides de Guiza qui se trouvent sur le Plateau des pyramides. « C’était une fondation pour loger les ouvriers qui travaillaient à cet endroit et qui partaient en expéditions vers le Sinaï à l’époque de l’Ancien Empire, afin d’apporter du cuivre ou de la turquoise ou même de produire des lames ou d’apporter de la pierre calcite », a-t-il expliqué.

Un autre aspect du travail était le développement et l’aménagement des zones touristiques qu’effectue le gouvernement égyptien à proximité des travaux archéologiques à Al-Aïn Al-Sokhna et à Gabal Al-Galala, cela a fait que les chercheurs français travaillaient dans l’urgence. Ils voulaient enregistrer les informations archéologiques avant qu’elles ne disparaissent à jamais. Toujours dans le Désert oriental, l’IFAO a une mission qui opère dans le chantier de Samoute pour exploiter les mines d’or remontant à l’époque hellénistique. Il y a aussi des études sur la monnaie de l’époque gréco-romaine. Quant aux travaux dans le Désert occidental, Bavay souligne que « comme les années précédentes, les chantiers du Désert occidental, dans les oasis de Dakhla et Kharga ainsi que dans le Sinaï ne sont pas ouverts pour des raisons de sécurité ».

Quant à la mission du CNRS, opérant dans la région alexandrine de Taposiris Magna et Plinthine, Bérangère Redon, ancienne membre scientifique de l’IFAO et directrice de la mission française opérant sur le site, affirme que les fouilles ont donné lieu à des découvertes spectaculaires. « On sait que Taposiris Magna est une ville grecque dans son architecture domestique et funéraire et ses traditions culturelles. Les fouilles ont montré que la ville a été fondée bien avant l’époque grecque vers la XXVIe dynastie av. J.-C. et s’étale jusqu’à la conquête arabe », indique Bérangère Redon, ajoutant que la mission a découvert sous l’un de ses bains d’énormes vases avec de magnifiques inscriptions de Saint Menas. « Cela nous a permis donc de savoir que les pèlerins chrétiens passaient par cette région pour arriver au monastère de Saint-Menas dit Abou-Mina en arabe », a-t-elle expliqué lors de son allocution. Sur le site de Plinthine situé à 2 km de Taposiris, la mission a découvert un lieu qui servait de « fouloir à raisins » datant du VIIe siècle av. J.-C. « En poursuivant les fouilles, on a découvert que ce site mène à un grand complexe qui comporte des pièces d’habitation », dit-elle, suggérant, d’après les photos premières du site, que le complexe appartenait probablement à un homme riche.

Une année riche pour le CFEETK

L’année 2017 a été celle de la célébration des 50 ans de la fondation du CFEETK. Une exposition de photos d’archives au sein du temple a été organisée en avril 2017 et un nouvel ouvrage a été publié mettant en valeur les travaux accomplis depuis 1967. « Maintenant les travaux se poursuivent normalement », souligne Christophe Thiers, directeur du centre. En fait, les archéologues reprennent tous les programmes commencés l’année dernière. Il s’agit des fouilles dans le quartier romain-byzantin, et les travaux de restauration de la partie nord de l’Akh-menou. « Le travail a débuté par un important nettoyage et la conservation des reliefs peints de la chapelle d’Alexandre le Grand. En mars 2017, la restauration des chambres funéraires a été achevée, mais le travail se poursuit dans les salles voisines », explique Thiers. De même, les travaux d’anastylose se poursuivent dans la cachette de la cour du VIIe pylône, en plus des études épigraphiques. Il est à noter que le VIIe pylône et les murs est et ouest de la cour ont été construits par Thoutmosis III, mais la décoration du mur ouest date du règne de Ramsès II.

CEAlex, nouvelles autorisations de restauration

Les travaux du CEAlex, fondé en 1990, se poursuivent dans presque toute la ville d’Alexandrie. « On a continué les fouilles qui ont débuté en 2016 sur les deux sites archéologiques de Kom Bahig et de Borg Al-Arab, non loin du lac Mariout », souligne Marie-Dominique Nenna, directrice du centre, ajoutant que les archéologues ont découvert des blocs appartenant aux murs d’un temple qui ressemblent aux blocs des temples pharaoniques, dont les études sont en cours. « Ce site archéologique est magnifique. Il vient former, avec Taposiris Magna et Plinthine, les frontières de l’Egypte à l’époque pharaonique », dit-elle.

Entre fouilles et études de l’histoire de la ville, le CEAlex a commencé des travaux de restauration dans un bâtiment remontant à l’époque allide et construit en 1840 par Mohamad Ali, qui a été attribué au centre depuis une vingtaine d’années par le ministère des Antiquités pour y travailler. « On utilise ce bâtiment comme entrepôt pour les objets découverts par le centre », indique Nenna.

Il s’agit de la restauration de deux grandes salles du bâtiment situées dans le jardin de Chalalate dans la région de Nahhassine. « Ce bâtiment sur deux niveaux abrite tous les objets mis au jour lors des fouilles du CEAlex à Kom Bahig ou partout à Alexandrie », reprend Marie-Dominique Nenna, affirmant la continuité des travaux de fouilles et de sauvetage d’urgence de cette ville côtière antique ainsi que des fouilles sous-marines du fort de Qaïtbay. « Le centre a pris la charge depuis longtemps de restaurer les mosaïques, qui sont une spécialité de la ville d’Alexandrie antique. On a découvert une très grande mosaïque remontant au VIe siècle, qui est en cours de restauration. Elle renferme des bandeaux magnifiques qui montrent des scènes métalogiques successives », souligne-t-elle. Le centre contribue aussi à la restauration des objets et des mosaïques du Musée gréco-romain, qui prépare son inauguration. « Ces pièces antiques peuvent être les piliers du musée spécial consacré à la mosaïque à Alexandrie », prévoit-elleز

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